Faire échec au “choc des savoirs”

Intervention de Marie Haye

Le « choc des savoirs » touche tout le système éducatif, mais la mesure-phare des groupes de niveaux, rejetée par l’ensemble de la communauté éducative, impacte très directement le collège. C’est là que, pour l’instant, la mobilisation est en pointe, portée conjointement par les collègues et les parents d’élèves, ce qui est à la fois remarquable et inédit. Le projet d’école démocratique que la FSU porte haut rencontre de l’écho, et l’austérité appliquée à l’école publique est contestée.
A cet égard, la saignée dans l’Éducation n’est pas sans lien avec les mesures « choc des savoirs », qui visent non seulement à donner des gages à la partie la plus réactionnaire de l’opinion, mais aussi à justifier de nouvelles coupes budgétaires. A quoi vont servir les groupes de niveaux et le DNB examen d’entrée au lycée, sinon à exclure le plus précocement possible du système scolaire des masses coûteuses d’élèves ? Celles et ceux issu·es des classes populaires sont les premières cibles, mais pas seulement.
C’est aussi à un changement radical de l’activité enseignante qu’il faut s’attendre, dans toutes les disciplines et à tous les niveaux, y compris dans le premier degré : pilotées par les évaluations nationales annuelles, la refonte des programmes, les manuels labellisés, la réforme de la formation initiale, les redoublements, l’inclusion sans moyens, les pratiques enseignantes seront de plus en plus tournées vers l’assignation des élèves des classes populaires à de petits savoirs, le temps d’une scolarité réduite. 
Attal l’assume lorsqu’il vante l’augmentation du taux d’échec au DNB et au Bac : le « choc des savoirs » est un renoncement explicite à l’objectif d’élévation des qualifications hérité du CNR, contesté depuis près de 20 ans mais que jamais aucun pouvoir auparavant n’a osé liquider. Ce renoncement va toucher toutes et tous les élèves, et tous les métiers de l’École.
On voit combien, dans un effet miroir saisissant, la caporalisation et la déqualification des élèves va de pair avec celle des personnels. Les stages de Seconde, la généralisation du SNU et de l’uniforme, la casse des lycées pros, obéissent à cette logique.
Le pouvoir est fragilisé sur les groupes de niveaux, d’où la reprise en main par Attal, la publication des textes dans la foulée, et les réunions pour caporaliser les chef·fes d’établissements. Cette victoire idéologique peut se transformer en défaite syndicale si nous n’arrivons pas à embrayer sur la mobilisation qui se construit depuis janvier.
Nous avons la responsabilité de faire échec à ce train de réformes, qui constitueront une violence professionnelle et sociale inédite, parachevant la casse libérale de l’école tout en faisant le lit des idées d’extrême-droite qui les inspirent.
Alors oui, là où la mobilisation est en pointe, elle est le fruit d’un fort volontarisme syndical. Oui, le niveau de mobilisation est très hétérogène. Mais ce n’est pas une fatalité : la FSU est le bon outil pour visibiliser, amplifier et fédérer, en articulant « choc des savoirs » et choc des moyens !
Cela implique de mettre en lumière la cohérence des mesures de la maternelle au lycée par une élaboration fédérale, de multiplier les rencontres militantes inter-degrés, d’initier des réunions publiques et des manifestations associant les parents d’élèves. Tout cela pour construire, dans la suite des départements les plus mobilisés, un grand mouvement de toute l’éducation au mois de mai pour donner un coup d’arrêt à cette politique, et mettre en perspective sa réorientation vers une école égalitaire respectant ses personnels.