Vague de précarité dans les écoles

intervention de Sandrine Monier au Conseil National de la FSU-SNUIPP – septembre 2023 –

Comme l’an passé, cette rentrée n’aurait pas pu se faire sans l’appui d’un nombre croissant d’enseignant·es contractuel·les dans les écoles. Grâce à elles et eux, le ministre a ainsi pu décrire une rentrée « plutôt dans de meilleures conditions que l’année dernière », et se féliciter de remplir sa promesse « d’un enseignant devant chaque élève ». Pourtant, une logique délétère est à l’œuvre.

En quelques années, le recrutement de non titulaires, circonscrit à quelques situations clairement identifiées, a laissé la place à une tout autre logique. Celle d’un système structurel – à l’instar de celui du second degré – où les viviers de non titulaires permettent d’anticiper les vacances de postes et d’assurer tant bien que mal la continuité du service public d’éducation.

Ce système à deux têtes « titulaires/non titulaires » – au sujet duquel nos camarades des DROM nous ont déjà alertés à cette tribune – se banalise dans nos écoles. Après avoir été longtemps proche de zéro, le taux de contractuel·les dans le premier degré est passé à 2,1% des effectifs en 2022. Il se nourrit à la fois d’un manque de titulaires lié à la crise de candidatures aux concours, mais aussi des attaques néolibérales portées au statut de fonctionnaire. Ainsi, le premier degré n’échappe pas aux logiques qui transforment la Fonction publique et qui écornent ses fondements.

Le recrutement par voie contractuelle permet de mieux « manager » au sens où il introduit une meilleure adaptation aux besoins, une plus grande flexibilité du service, des économies d’échelle sur les salaires et une possibilité de pression sur des agent·es maintenu·es par contrat dans la précarité. 

Envoyé·es sans formation devant les élèves, moins rémunéré·es que les autres enseignant·es de l’école, soumis·es aux pressions de l’institution et, dans une moindre mesure, à celle des parents d’élèves, sans pouvoir se projeter sur un avenir à moyen terme… Tout cela concourt, à leur insu, comme au nôtre, à dégrader le service public d’éducation et à prolétariser le métier d’enseignant·e. Ainsi il suffirait de se rendre à un job dating pour enseigner en primaire, ou exceptionnellement de justifier seulement de deux années d’études après le bac, voire d’avoir un peu d’expérience auprès d’enfants. Au final de quoi amener à proposer de placer le concours après le bac….

Ces mutations, qui portent en germe la transformation de notre métier, justifient que la FSU-SNUipp n’abandonne pas la bataille. Comme il n’est pas question non plus de dénigrer nos collègues contractuel·les, ni d’abandonner leur défense. Ils et elles sont les premières victimes de ce système que nous devons dénoncer : celui de la dégradation des enseignements et des conditions de travail des enseignant·es, celui du renoncement à un haut niveau d’exigences pour le service public d’éducation et pour le métier d’enseignant.

Pour cela nous devons continuer à refuser les recrutements sous contrat et exiger la titularisation de tous·tes les contractuel·les.