Adrien Martinez
Consciente de l’importance de l’appropriation des savoirs pour l’émancipation et des inégalités dans leur acquisition socialement déterminé, la FSU s’est doté d’un projet éducatif ambitieux fondé sur une l’exigence d’une égale acquisition d’une culture commune comme moyen de démocratiser la réussite scolaire.
Il est vrai que la définition des savoirs mis en jeu à l’école fait l’objet de conflits âpres auxquels participent activement les classes sociales dominantes, car derrière ce conflit ce sont des intérêts et des modèles de société radicalement divergents qui s’opposent. L’imposition du modèle utilitariste et inégalitaire d’un socle commun de compétences ou aujourd’hui des fondamentaux de Blanquer, la défense d’une culture au service d’un nationalisme identitaire, ou d’un curriculum pléthorique, accessible uniquement à ceux qui ont socialement les outils pour réussir à l’école, en sont des aspects auxquels la FSU répond par son projet.
La crise sanitaire,si elle n’a pas rebattu les cartes de cette opposition, a toutefois rendu les choses plus urgente. Elle a éclairé de façon plus saillante des traits fondamentaux de nos sociétés : un régime général des inégalités dont profite une minorité, un clivage nord-sud, y compris dans le rapport aux soins, insoutenable, une intrication de la question climatique et des fondements même de l’organisation capitaliste de nos sociétés, des décisions politiques, comme l’absence de levée des brevets, prises contre les peuples, le dévoilement de ce qu’est la science « en train de se faire », avec ses hésitations, ses débats, dont l’absence de compréhension nourrit à la fois les discours complotistes et l’autoritarisme du pouvoir.
Oui il y a une urgence, climatique et sociale, à changer de société. C’est devenu une question de survie.
Au vu de cette urgence, il y a nécessité à ce que nous affinions notre projet fédéral pour l’Éducation, afin de mener plus radicalement l’offensive contre les modèles dominants de ségrégation des acquis scolaires qui donnent aux dominants le quasi-monopole sur les savoirs permettant d’assujettir le monde à leur profit. Il nous faut à revers identifier les savoirs nécessaires pour non seulement penser, mais aussi agir sur les inégalités du monde et le désastre écologique qui vient.
Il nous faut dessiner les contours d’une nouvelle culture commune, rassemblant ces savoirs critiques et une réflexion plus poussée sur les conditions nécessaires à ce que leur appropriation soit émancipatrice, qu’elle renforce les capacités des dominé·es à agir sur le monde. L’urgence climatique et sociale est aussi une urgence scolaire. L’engagement de notre fédération dans ce chantier, y compris avec les mouvements pédagogiques et disciplinaires, et la recherche critique, peut permettre de définir la contribution scolaire à une transformation du monde émancipatrice, égalitaire et écologique.