De la torpeur… à la lutte d’ampleur !
Marc ROLLIN (BN, secteur Langues Vivantes, Lyon)
Le 13 janvier a sorti nos collègues et certains syndicats de la torpeur dans laquelle ils et elles étaient plongé·es depuis quelque temps et qui s’explique par la triple crise que nous connaissons.
Tout d’abord, une crise sanitaire qui pose de nombreux défis au syndicalisme :
des défis pédagogiques : le retard pris tant sur les contenus que sur les méthodes de travail ou l’autonomie se font sentir au quotidien dans les classes. Des aménagements et allègements de programmes et d’épreuves doivent donc enfin être décidés tant au collège qu’au lycée sur plusieurs années.
des défis relevant de l’hygiène et de sécurité, question rarement abordée dans les établissements : les protocoles successifs ont effectivement le double désavantage de ne pas assez protéger les personnels et les élèves et de rendre le quotidien lourd et pénible.
des défis d’investissement : des moyens devront être mis dans le bâti pour mieux accueillir les élèves, en tant de pandémie ou pas. Car n’oublions pas que cette crise sanitaire pose la question de comment intégrer les problématiques d’environnement à l’action syndicale au quotidien, la préoccupation climatique étant majeure pour la jeunesse de nos salles de classes. Mais il faut aussi des moyens, notamment en postes, pour réduire enfin les effectifs de classe et nous aider à remettre les élèves dans des situations d’apprentissage plus confortables, après ce qu’ils ont subi et subissent encore du fait du COVID et d’un ministre qui, n’ayant plus la moindre crédibilité, mériterait de quitter son poste ou de rester à Ibiza ! Qui sait ? Cela lui permettrait peut-être de mieux comprendre la situation des langues dites régionales qu’il ne chérit guère.
La demande de sa démission qui aurait pu être faite le 13 aurait été un symbole du mécontentement. Ni plus ni moins qu’un symbole mais un symbole fort. Il n’est toujours pas trop tard car les annonces faites ne sont que des promesses et, même si elles sont tenues, elles sont plus qu’insuffisantes pour faire face à tous les besoins que j’ai énumérés auparavant.
Ensuite, une crise politique avec une extrême-droite en force, un néo-libéralisme qui l’a nourrie en amont et une gauche morcelée, incapable de s’entendre, qui doit nous alerter en tant que syndicalistes.
Le 13 a montré qu’il faut bousculer les partis à partir des luttes, des mouvements citoyens, afin de confronter les points de vue, les obliger à se positionner, tant sur les aspects catégoriels ou statutaires, comme les salaires, que sur la place des services publics dans la société.
Mais cette actualité française ne doit pas nous faire oublier les nécessaires luttes contre les logiques guerrières, néo-coloniales, oppressives qui peuvent exister de partout sur la planète, parfois à côté de nous. L’actualité est malheureusement remplie d’exemples : du sort accordé aux migrant·es en Europe à la mascarade de référendum en Nouvelle-Calédonie, en passant par l’oubli généralisé de la situation syrienne ou le silence de l’Europe sur un certain nombre de pays de l’Est.
En l’absence d’un texte DL, il nous semble qu’il faut intégrer certains de ces éléments dans le texte général.
Enfin, une crise syndicale. Le contexte politique et économique qui perdure depuis une vingtaine d’années, et sur lequel les alternances politiques ne semblent pas avoir changé les logiques à l’œuvre, rendent les mobilisations sociales et syndicales compliquées, même si elles existent. Pour qu’elles durent et soient suffisamment massives pour peser vraiment, il faut travailler à la réduction de la division syndicale et repenser les liens entre syndicats et salarié·es.
C’est un défi pour le SNES mais aussi pour la FSU. C’est pourquoi la question de la place des services publics dans la société nous semble centrale, surtout en cette année d’élections, et a fait l’objet d’un focus dans notre texte.
Les journées du 13, comme celle du 27, doivent donc avoir comme ambition de poursuivre et d’amplifier les mobilisations les plus unitaires possibles. Mais il faut aussi penser en termes d’alliances dans la perspective des prochaines élections professionnelles, pour redonner un nouveau souffle au syndicalisme de transformation sociale, si nécessaire dans la période. La question de l’information et de la communication auprès des adhérent·es doit donc devenir centrale.
Ainsi, il nous semble nécessaire de mieux communiquer sur l’après 13 janvier auprès de toute la profession, et pas que des adhérent·es, pour préciser ce qu’on défend et ce qu’on critique et pour bien faire le lien avec le 27.
En effet, si le 13 janvier a permis de rendre visibles les conditions difficile de travail, son pendant, les salaires, est au centre de l’action du 27. En plus d’articuler les deux questions, il nous faut donc convaincre que nos revendications sont légitimes. Si la comparaison avec les autres pays peut être intéressante, il faut évidemment parler des dividendes des actionnaires mais aussi du surcoût et de la difficulté du travail dans la période, au service des élèves. Un salaire digne et mérité en somme.
Dans notre texte, nous avons également pointé la nécessité d’envisager les suites dès à présent et de les conditionner : il faut que nous soyons à l’initiative de mobilisations si nos revendications ne sont pas entendues.
Pour terminer, si l’actualité nous entraîne sur ces terrains de mobilisation, cependant, il nous faut continuer aussi de communiquer sur les autres questions qui traversent notre quotidien : les discriminations, la protection sociale, la multiplication d’évaluations chronophages et inutiles, Parcoursup, à la fois pour parler à toutes et tous les collègues mais aussi pour faire émerger les questions d’éducation dans la campagne électorale car, que la macronie soit reconduite ou non dans ses fonctions, l’enjeu est aussi de préparer le terrain des mobilisations futures.