LES FEUILLES MORTES d’Aki Kaurismaki

CULTURE – FILM

  • p. 37 du numéro 103 de la revue de l’Ecole Emancipée, par Olivier Sillam –

Aki Kaurismaki nous revient avec un film dans la même veine que ceux que nous avons déjà pu admirer de sa part, toujours aussi pince-sans-rire, durs et déjantés, de Leningrad cowboys go to America (1989) à Le Havre (2011), en passant par L’homme sans passé (2001) et aux Lumières du faubourg (2005).

Dans Les feuilles mortes, il est question de la communication entre deux êtres aussi solitaires l’un·e que l’autre, quoique chacun·e à leur manière. Il s’agit pour Ansa (Alma Pöysti) et Holappa (Jussi Vatanen) de trouver leur premier, unique et dernier amour. Mais comme chacun.e est maladroit.e, rien ne se passe facilement. Ah ! Cette scène où Holappa perd le numéro de téléphone que lui a donné Ansa sur un papier, alors qu’il ne sait même pas comment elle s’appelle ! Cela, qui peut paraître anachronique aux jeunes générations, a très bien marché pendant très longtemps. Problème de communication donc mais aussi d’acceptation de l’autre, passé un certain âge, avec ses qualités et ses défauts. Sauf que quand ce défaut c’est l’alcoolisme, cela peut devenir rédhibitoire. Les feuilles mortes est aussi un film sur la précarité non pas des sentiments, mais sur la précarité sociale.

Les juré·es du festival de Cannes ne se sont donc pas trompé·es en lui accordant le Prix du Jury (la troisième distinction dans le protocole cannois). Lorsqu’un réalisateur chevronné comme le finlandais Aki Kaurismaki sort un nouveau film (le 20 septembre 2023, en France), la curiosité l’emporte et on passe vraiment un bon moment car il n’y a pas de longueur. Les deux acteurs principaux jouent juste, de même que les seconds rôles, notamment Janne Hyytiäinen qui est dans le film le meilleur et seul ami d’Hoppala, en même temps que son collègue de travail. Aki Kaurismaki continue donc de tourner après plus de 40 ans de carrière pour le grand bonheur des cinéphiles. Et surtout, restez pour le générique de fin qui est en adéquation avec le titre du film. ■