Marie Haye (Secrétaire Nationale, Nantes)
Alors que Macron s’apprête à reprendre le refrain du « c’est pas la rue qui gouverne » en piétinant le mouvement social, le SNES-FSU doit sortir de cette CAN avec des mandats offensifs.
La journée de jeudi doit être une déferlante en forme de grosse claque à cette suffisance. Les axes de communication pour mobiliser évoqués dans le texte sont bons, mais il faut y ajouter le déni de démocratie sociale et parlementaire auquel se livre Macron, quoiqu’il en dise, et la crise politique qu’il a choisie d’ouvrir. Son entêtement est aussi le signe de sa fébrilité et nous avons l’opportunité de porter un coup fatal au monde d’inégalités qu’il promeut.
Ce sont aussi les suites qu’il nous faut penser dès maintenant, en évitant trois écueils :
- Le premier est l’idée que le Référendum d’Initiative Partagée puisse se substituer à la mobilisation. Il faudrait le dire explicitement dans le texte, et ne pas s’en remettre principalement à cette perspective, qui est lointaine, pas suspensive de la loi et dont la concrétisation très incertaine.
- Le second écueil serait de distinguer crise sociale, politique et démocratique. L’adoption de la loi par 49.3 a créé une situation nouvelle, où la crise démocratique s’est ajoutée à la crise sociale. Le rejet à 9 voies près de la Motion de censure transpartisane a ouvert quant à lui une crise politique. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas négliger le lien du mouvement social avec la NUPES : c’est une coalition unitaire ne joue pas les intérêts de tel ou tel parti contre tel autre mais peut contribuer à renforcer notre camp social.
- Le troisième écueil qu’il nous faut éviter est de penser que le SNES et la FSU ne pèsent pas lourd dans l’interpro. Les enjeux sont cruciaux pour notre syndicalisme : gagner sur les retraites, c’est gagner ensuite pour l’école que nous voulons, comme l’ont dit Agnès et Damien. Nous avons la responsabilité de tout faire pour renforcer la mobilisation dans notre champ. En rester à la même stratégie de grosses journées saute-mouton même un peu plus rapprochées comme le texte le propose paraît donc en deçà des enjeux, comme l’a dit Emancipation.
D’autant que l’on dirait bien que c’est au tour de notre syndicalisme de lutte et de transformation sociale de prendre le leadership du mouvement. L’indifférence totale du pouvoir, du moins celle qu’il affiche, met le syndicalisme réformiste en grande difficulté. Notre arme privilégiée est plus que jamais la mobilisation, en portant, dans l’unité, et résolument, la nécessité d’élargir et d’amplifier la grève, et de la faire durer, en coordonnant et en donnant de la visibilité aux actions locales.
Depuis jeudi, un foisonnement d’initiatives avec rassemblements très déterminés sur les places publiques, grèves reconduites, blocages de sites stratégiques et barrages filtrants, toujours couronnés d’expressions de solidarité, le fait que notre secteur prenne sa place dans ce foisonnement, l’arrivée de la jeunesse dans le mouvement, sont des signaux très positifs que nous devons prendre en compte, pour proposer un panel élargi et renouvelé d’actions : nouveaux grands temps forts, mais aussi manifestation nationale collant au rendu du Conseil constitutionnel, grèves tournantes par secteurs professionnels sur une semaine, appel à deux jours de grève la semaine prochaine, impulsions d’actions coordonnées nationalement à la fois en terme d’horaire et de modalité… Il ne faut rien s’interdire et pousser dans la FSU pour qu’elle porte ce type de mandatement à la fois ouvert, dynamique et combatif dans l’interpro. C’est pourquoi nous soutenons les propositions d’amendement de Créteil.
Cela ne veut pas dire qu’il faille laisser tomber les questions éduc. Comme le propose le texte, informer et mobiliser les collègues contre le projet éducatif de Macron doit servir de carburant à la mobilisation retraite, sans s’y substituer. Les amendements proposés par Toulouse vont dans le bon sens. Mais le texte mériterait encore d’être renforcé en faisant mieux le lien entre ce qui se joue au collège et au lycée comme le proposait Romain. C’est une école néolibérale au service du patronat qui se concrétise, où l’émancipation des élèves est supplantée par l’empressement à embrigader la jeunesse et à la soumettre au patronat. Quant au PACTE, en valorisant le surtravail extensif dans notre secteur, il obéit aussi à cette même vision du monde, celle aussi qui justifie la réforme des retraites. Le texte de la CAN doit établir clairement ces liens.