Débat général – Intervention introductive de l’EE

  • Par Marie Haye et Julie Schmitt (secrétaires nationales)

Cher·es camarades,

Ce congrès se tient alors que la mobilisation dans l’éducation s’ancre et s’amplifie. Pour l’École Émancipée, le SNES-FSU, syndicat de luttes et de transformation sociale, majoritaire dans son champ, est le bon outil pour renforcer cette dynamique, et ce congrès l’occasion de donner au SNES-FSU le profil combattif et offensif indispensable pour relever les défis de la période charnière que nous vivons.

Ce congrès s’ouvre dans un contexte international plus que préoccupant :

La guerre en Ukraine dure depuis deux ans, sans perspective pacifiste crédible. A Gaza, c’est un massacre qui se joue : les bombardements et attaques de l’armée israélienne ont déjà fait plus de 30 000 victimes, plus de 70 000 blessé·es, sans compter les milliers de déplacée·es. Il faut continuer d’appeler, de participer aux mobilisations pour obtenir un cessez-le-feu immédiat et mettre un terme au génocide dont le risque est dénoncé par la cour internationale de justice.

La situation internationale, c’est aussi le sort des migrant·es jeté·es sur les routes de l’exil et qui sont refoulé·es aux portes de pays-forteresses. Selon l’ONU, l’année 2023 a été la plus meurtrière de la décennie.

Le contexte international est aussi marqué par une montée sans précédent de droites radicales et autoritaires : Pays-Bas, Argentine, Portugal, sans compter le possible retour de Trump aux États-Unis. Ces droites se retrouvent sur de nombreux points de leur programme : contre l’avortement, contre ce qu’elles appellent la « théorie du genre », contre les LGBTI, les migrant·es, contre les services publics…

En France, l’extrême-droite progresse électoralement, et le RN est annoncé en tête des intentions de vote aux élections européennes. Ce sont les politiques ultralibérales, produisant de la désespérance sociale, aggravant les inégalités, divisant la société, qui favorisent la progression continue du RN. Macron et son camp entrevoient, comme seule façon de gagner les élections à venir, un face à face avec le RN qui les pousse, d’un côté, à plagier son programme et donc à le faire monter, et de l’autre, Macron surjoue le rôle régalien du chef de l’État en déployant un discours va-t-en-guerre.

Alors même que le prix des matières premières s’envole et grève les budgets depuis des mois, en particulier ceux des classes populaires, du côté de la transition écologique, plus que jamais nécessaire, rien n’a réellement été fait. Le programme de relance nucléaire annoncé est une fausse bonne idée tant cette énergie est dangereuse.

Dans un contexte si sombre, il y a urgence de faire l’unité de notre camp, en commençant par celle du syndicalisme de luttes et de transformation sociale.

Heureusement des raisons d’espérer existent :

Malgré la répression, la vitalité des luttes écologiques est une réalité.

L’inscription de l’IVG dans la Constitution répond à une revendication du mouvement féministe. C’est une victoire face aux remises en cause de ce droit. Mais pour qu’il soit effectif, il faut des financements pour les plannings familiaux et des centres d’IVG partout sur le territoire.

La mobilisation du 8 mars a été réussie. De plus en plus, l’idée d’une grève féministe fait son chemin. Il faut se donner les moyens de la faire exister concrètement dans notre champ. Par du matériel régulier, il faut ancrer dans la tête de toutes nos collègues que si nous les femmes nous arrêtons de travailler, le monde s’arrête !

La bascule idéologique ne se fait donc pas forcément du côté du camp réactionnaire. La gauche sociale et politique peut et doit regagner du terrain.

C’est le cas dans l’éducation : les mesures « choc des savoirs », groupes de niveaux en tête, sont très majoritairement rejetées par nos collègues et les parents d’élèves.

Le pouvoir est fragilisé : certes, il tente de dérouler, mais Belloubet n’ose plus parler de groupes de niveaux et Attal a été contraint d’écourter sa conférence avec les chef·fes d’établissements qu’il tente d’acheter avec des primes.

Le projet d’école démocratique que le SNES-FSU porte haut rencontre de l’écho, le débat sur le dualisme scolaire connaît une actualité nouvelle et l’austérité appliquée à l’école publique est contestée. C’est LA bonne nouvelle de cette séquence.

Mais cette victoire idéologique peut se transformer en défaite syndicale si nous n’arrivons pas à embrayer sur la mobilisation qui se construit depuis janvier.

Ayons confiance en nos capacités à mobiliser massivement ! Alimentons la confiance de nos collègues dans leurs capacités à gagner face au rouleau-compresseur macroniste !

C’est le moment, c’est maintenant qu’il faut pousser les feux. Contribuons à faire de cette semaine une étape marquante de la grande mobilisation pour la défense de l’école publique qui se construit et qu’il faut amplifier.

Le mouvement connaît différents rythmes de mobilisation. Il s’ancre très localement. C’est une difficulté mais c’est aussi une force. Au SNES-FSU de visibiliser, coordonner et fédérer !

Demain a lieu une nouvelle journée de grève à l’appel d’une intersyndicale unie. Elle s’annonce forte dans notre secteur, avec appels à reconduire dans plusieurs départements. C’est notamment le cas dans le 93, où la mobilisation des collègues, avec les parents, impressionne y compris le pouvoir. À nous d’amplifier sa force d’entraînement.

Dès aujourd’hui, le congrès peut envoyer une adresse aux collègues les appelant à investir massivement la journée de demain, et à reconduire partout où cela est possible. Il peut rappeler largement l’existence de notre fonds de solidarité (alimentons-le en y versant nos journées de salaire à partir de demain !). Rappeler aussi que lorsqu’un mouvement est victorieux, il négocie le paiement des jours de grève.

Il faut également penser aux suites : une ou plusieurs journées avant le départ en vacances de la première zone sur un appel national le plus large possible, mot d’ordre du type « mettre l’école à l’arrêt » en articulation avec des actions à l’initiative des parents, manifestation nationale, ultimatum pesant sur la rentrée de septembre… Il faut aussi se poser la question d’un appel au refus des groupes de niveau, qui cristallisent la colère, et au boycott des instances et réunions qui servent à les mettre en place.

Nous avons la responsabilité de faire échec à ce train de réformes éducatives, qui, si elles se mettent en œuvre, constitueront une violence professionnelle et sociale inédite, parachevant la casse libérale de l’école tout en faisant le lit des idées d’extrême-droite.

« Un autre monde est possible ». C’est pour le faire advenir que nous militons au SNES-FSU. C’est avec cet objectif que nous nous apprêtons à fixer sa feuille de route pour les trois prochaines années.

La période donne à nos délégations pluralistes une responsabilité particulière : celle d’aboutir, dans un esprit de synthèse, à des mandats efficaces qui politisent la question sociale, comme nos statuts nous y invitent. Je cite : « Le but final du syndicat est l’émancipation complète des travailleur·euses, cette émancipation ne pouvant être obtenue que par l’expropriation capitaliste. »

Des mandats offensifs qui renforcent encore le SNES-FSU, le positionnent encore plus résolument dans le camp de la lutte et de la transformation sociale, contre Macron et son camp.

Alors, à toutes et à tous, bon congrès !