Débat général – Femmes et retraites


Par Sophie Abraham


Publié hier, le 2ème baromètre du sexisme du Haut Conseil à l’Egalité met en évidence la persistance du sexisme ordinaire dans la société malgré une prise de conscience des inégalités entre les femmes et hommes. Il montre que les filles et les femmes subissent encore de nombreuses discriminations sexistes à l’école, dans la famille, dans l’espace public et au travail.

Plus grave encore est l’ancrage d’une « pensée masculiniste », qui va jusqu’à se manifester sous une forme violente chez les plus jeunes (25-35 ans). En effet, 23% de ceux-ci considèrent qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter. Les effets du patriarcat sont toujours délétères et nous en avons trop souvent la preuve. L’éducation encore très empreinte de stéréotypes de genre, couplée à un accès de plus en jeune à la pornographie en ligne et à une quasi absence d’éducation à la sexualité contribuent en bonne partie à structurer les rapports sociaux entre les hommes et les femmes, en termes de dominants et dominées. Ce constat met en évidence les enjeux cruciaux que revêt l’éducation à l’égalité, à la sexualité et à la vie affective comme leviers dans la lutte contre les violences masculines à l’égard des femmes. Et à la nécessité de travailler plus encore ces questions dans notre champ syndical pour faire bouger les lignes. 

Cette violence sexiste s’exerce dans tous les domaines et s’exprime aussi dans les choix politiques.

A postes ou à compétences égales, 23% des femmes ont vécu un écart de salaire avec un collègue homme, c’est même 34% chez les cadres.

Les inégalités de salaires sont fondées sur un déroulement de carrière impacté par le sexisme et les discriminations qui en découlent (dans le choix des métiers, à l’embauche, au moment de la maternité, au temps partiel subi plus que choisi, à une évaluation en défaveur des femmes). Elles trouvent un prolongement au moment du passage à la retraite. A l’inverse du discours du gouvernement sur une réforme annoncée plus juste, l’étude d’impact qui accompagne le projet de loi prouve qu’elle va pénaliser davantage les femmes. Le recul de l’âge légal de départ à 64 ans, couplé à une accélération de l’allongement de durée de cotisation obligera les femmes à travailler en moyenne sept mois de plus, contre cinq pour les hommes, alors qu’elles partent déjà un an plus tard. Quant au relèvement du minimum de pension à 1 200 euros bruts, présenté comme une mesure d’égalité, il ne s’appliquera qu’à celles qui auront une carrière complète et à taux plein.

Alors même qu’une politique volontariste de réduction des inégalités salariales entre les femmes et les hommes permettrait de générer 5,5 milliards de recettes pour financer les retraites, le Président reste droit dans ses bottes et dans sa volonté de faire passer sa réforme profondément inégalitaire.

Nous devons dénoncer le mensonge cynique que cette réforme serait plus juste pour les femmes. En construisant des outils, des argumentaires ciblés à destination des 62% d’agentes, en prévoyant une communication spécifique à destination des plus précaires. Mettre en évidence cette injustice passe aussi par une visibilisation des femmes lors des mobilisations (prise de parole, tract spécifiques, autocollants, slogans, chorégraphies des Rosies, cortège en non mixité…).

Ainsi, le 8 mars s’inscrit dès à présent dans le calendrier des mobilisations et nous engage à construire activement la grève féministe et sa visibilisation.