Criminalisation du mouvement social

  • Intervention école émancipée par Julie Bernat au CDFN de la FSU mai 2023 –

Depuis le début du mouvement contre la réforme des retraites, dans une unité sans faille, l’intersyndicale n’a eu de cesse de dénoncer que la réforme des retraites est injuste, inutile et brutale. La brutalité se concrétise aussi dans l’escalade répressive. Le Syndicat de la magistrature estime que « l’utilisation dévoyée de la garde à vue illustre les dérives du maintien de l’ordre, un maintien de l’ordre qui détourne l’appareil judiciaire pour le mettre entièrement à son service ». Une brutalité qui se caractérise à travers les multiples exemples de répression du mouvement social : des manifestant.es nassé.es, chargé.es, gazé.es puis frappé.es dans plusieurs villes alors que la technique de nasse a été jugée illégale par le Conseil d’Etat en 2021. Des expulsions violentes de grévistes sur les piquets de grève ou comme celles envers des lycéen.es ou encore l’utilisation à Sainte Soline de « produits de marquage codé » qui ont servi à l’arrestation de manifestant·es, les mesures de garde à vue et les arrestations dégradantes en marge des manifestations comme l’ont connu certain.es de nos camarades de la FSU dans plusieurs départements.

Les déplacements du Président et de son gouvernement s’accompagnent désormais fréquemment d’arrêtés préfectoraux fondés sur la législation antiterroriste. C’est sur ce fondement qu’à Ganges, par exemple, les « objets sonores portatifs » ont été confisqués privant les manifestant.es de moyens d’expression et de communication.

Face à ce détournement des dispositifs antiterroristes, les tribunaux administratifs ont suspendu ces arrêtés grâce aux associations qui ont déposé un référé-liberté dont la LDH. Une LDH menacée par le ministre de l’Intérieur d’une perte de subventions publiques alors qu’elle effectue ce travail reconnu de veille et d’observation des pratiques du maintien de l’ordre pour protéger le droit de manifester inscrit au cœur de notre contrat social. Jamais de telles menaces à l’exception des heures les plus sombres de l’histoire n’avaient été proférées à ce niveau. L’intimidation ne sert qu’à affaiblir les contre-pouvoirs et donc la démocratie.

Ces violences qui ont été constatées partout en France, viennent confirmer qu’il s’agit bien d’une doctrine du maintien de l’ordre choisie et assumée qui semble clairement avoir pour objectif non pas le maintien de l’ordre public, mais l’intimidation des manifestant.es et la répression du mouvement social au seul service des politiques de destruction des droits démocratiques et sociaux.

Pour les néolibéraux, il s’agit de bâillonner toutes expressions critiques « au libre-échange économique et à la concurrence du marché » dont les syndicats sont les « ennemis de l’intérieur » comme l’écrivait Thatcher à propos des syndicats de mineurs, afin d’asseoir leur doctrine mortifère.

La permissivité totale vis-à-vis de la soif de pouvoir et de fortune des ultras-riches ainsi que le dévoiement autoritaire des institutions sont des caractéristiques de la politique menée par Emmanuel Macron et ses différents gouvernements.

La FSU se doit d’être intransigeante, condamner sans relâche tout usage disproportionné de la force, les dérives liberticides et ne jamais oublier le caractère intrinsèquement autoritaire du néolibéralisme. Rappelons la formule de Hayek : « Je préfère un dictateur libéral à une démocratie sans libéralisme » qui résume l’idéologie néolibérale de la démocratie : acceptable quand elle est inoffensive, contestée, y compris par les moyens les plus violents, lorsqu’elle menace les intérêts du marché et du capital.