Construire les mobilisations contre les régressions sociales

  • Intervention de Claire Bornais au CDFN de novembre 2022 – Débat texte action

Je reviens ici sur la question de la stratégie syndicale au sujet de la réforme des retraites.

Il est bien sûr essentiel que les actions soient les plus unitaires possibles. De ce point de vue, chercher à préserver le cadre intersyndical large qui s’est réuni depuis juin dernier est tout à fait cohérent.

Mais les organisations qui le composent ont des visions différentes de la mobilisation et des actions à engager, ce qui rend les choses très compliquées, il faut le reconnaître. De ce fait, cette intersyndicale est peu visible actuellement. Nombre de militantes et militants « de base » s’en inquiètent, car l’intersyndicale leur donne l’impression de rester l’arme au pied en attendant de se faire écraser par un bombardement. Or, comme cela a été dit ici hier à plusieurs reprises, il nous faut du temps en amont pour mobiliser sur une action annoncée.

Même si la bataille sur la réforme des retraites n’est pas « la mère des batailles », elle ne peut être considérée comme secondaire par rapport à celle sur les salaires. Nos collègues ne nous pardonneraient pas de ne pas avoir suffisamment alerté en amont sur un tel sujet, et cela pourrait avoir des conséquences très négatives sur notre syndicalisation à l’avenir. 

Le gouvernement a très finement joué avec ses « concertations » bilatérales et le calendrier annoncé pour dévoiler son projet complet, mi-décembre. Il va s’arranger pour ne rien dire de précis d’ici la mi-décembre, c’est dans son intérêt. A la période autour des fêtes de fin d’année, les organisations syndicales ne seront pas en capacité de mobiliser réellement, nous le savons. Le gouvernement le sait aussi. Et il entend bien passer son projet de loi en janvier, le plus tôt possible dans la session parlementaire qui redémarre le 16 janvier, avec la semaine du gouvernement qui débute le 23 janvier. Ce qui laisse très peu de temps pour mobiliser si on attend la parution du projet précis. 

C’est pourquoi la programmation de la mobilisation en amont est essentielle et le texte action nous mandate bien sur ce point, c’est une bonne chose.

Nous devons en effet activer l’intersyndicale pour qu’elle propose des actions dès sa prochaine réunion. Il nous faut convaincre toutes les organisations qu’une mobilisation sur le sujet qui n’émanerait pas d’elle serait un clou de plus dans le cercueil des syndicats que le gouvernement, ainsi que l’extrême-droite, cherche à planter. Or si l’intersyndicale traîne trop à se décider, il se peut que d’autres initiatives soient annoncées en dehors de l’intersyndicale, très prochainement. Le financement des retraites est en effet un choix de société et concerne donc aussi la gauche dans son ensemble, plus largement que les seules organisations syndicales. 

Bien sûr, les initiatives peuvent être multiples, de façon à permettre la mobilisation de toute la société. Mais si on veut  que les mobilisations matérialisent l’opposition réelle de la majorité de la population à cette régression sociale, il faut qu’elles soient massives.  Une floraison d’initiatives qui apparaîtraient comme concurrentes risque de faire désespérer de la gauche une partie de la population et donc de démobiliser. 

Il nous appartient donc, en vertu de la vocation unitaire affirmée dans le nom de notre fédération, de travailler à l’unité d’action dans la durée dans les cadres les plus larges possibles, y compris non syndicaux.

La question reste ouverte de l’articulation des deux grèves proposées par la FSU en janvier : comment ne pas affaiblir la participation à une grève sur les retraites  avec l’annonce d’une grève dans l’éducation sur les salaires, ou inversement ?