Battre Macron et Blanquer tant qu’on est chauds

Et enseignant-es et parents se sont levé-es…

19 mars, 30 mars, 4 avril… des assemblées générales d’enseignant-es de nouveau importantes, des centaines de réunions publiques, des occupations d’écoles, des départs en grève reconductible dans quelques départements… Oui, depuis maintenant près de deux mois, les enseignant-es et les parents d’élèves se sont levé-es contre l’inscription dans la loi des déterminants de la politique éducative menée par Jean-Michel Blanquer. Si l’article ouvrant la possibilité juridique de création des EPLESF a certainement été celui qui a mis le feu aux poudres, l’importance du travail militant d’explicitation de la loi et l’inscription dans la durée de la mobilisation ont permis d’élargir la critique, d’affirmer massivement une vision politique de ce que cette loi entend faire à l’école. Cette loi est à juste titre vécue par toutes et tous comme une loi contre l’école, qui affronte directement l’idée d’une école émancipatrice, porteuse de justice sociale. Loi manifestant la volonté d’assujettir les personnels, loi avançant encore plus dans la rupture avec la logique d’unification du système scolaire qui prévalait jusqu’à la fin des années 90, loi en parfaite cohérence avec les éléments les plus libéraux des politiques éducatives menées ces dernières années qui ont conduit à l’augmentation des inégalités scolaires et du poids des déterminismes sociaux dans la réussite scolaire. De premiers reculs : l’article 6 quater sur la sellette ou l’annonce d’effectifs maximum de 24 élèves en GS, CP et CE1 sont à mettre au crédit de la mobilisation.

Mais les réponses restent engluées dans le paradigme libéral et autoritaire dominant

La volonté manifestée par le Sénat de calmer le jeu avec les EPLESF s’accompagne d’une série d’amendements à la loi portant leur lot de régressions : enseignant-es placé-es sous l’autorité de directeurs-trices ayant un statut hiérarchique et participant à leur évaluation, chef-fes d’établissement exerçant un droit de regard sur la nomination des professeur-es, extension des possibilités de l’expérimentation permettant de déroger au cadre des ORS… sans compter la probable réécriture en séance publique de l’article sur les EPLESF, dans une version qui serait plus favorable aux élu-es locaux. Et puis il y a tout ce qui reste : la possibilité de mettre en place des établissements d’excellence, les EPLEI qui manifestent la volonté d’amplifier la ségrégation scolaire, le recours aux contractuel-les, le financement du privé, la scission de l’école maternelle en deux avec la possibilité de renvoyer à des structures hors éducation nationale la prise en charge des petites et moyennes sections, la disparition de toute instance indépendante permettant d’évaluer les politiques éducatives, le poids de l’évaluation sur les élèves, les enseignant-es et les établissements… L’annonce de la réduction des effectifs en GS, CP et CE1 se fait dans un cadre budgétaire toujours contraint, ce qui occasionnera une dégradation des conditions de scolarisation pour tous les autres niveaux, du remplacement, des RASED…

Tout comme les réponses aux mobilisations

Les réponses du président Macron aux mouvements sociaux qui agitent notre société depuis maintenant six mois sont du même ordre. En entamant leur lutte le 17 novembre et en conservant, malgré le traitement médiatique et le dénigrement du pouvoir, un large soutien de la population, le mouvement des Gilets jaunes surprend par son opiniâtreté. Cette inscription dans la durée et l’ouverture d’espaces de discussions et de débats ont permis de faire de la justice sociale la revendication première et de rejoindre ainsi les revendications du mouvement syndical. Tout en la liant avec la question climatique grâce aux journées de mobilisation sur cette question. Ce mouvement a obligé le pouvoir à répondre. 15 milliards d’€ de mesures que Macron n’entendait pas débourser. Mais ces réponses traduisent toujours plus son enfermement dans une logique libérale et autoritaire, animant une politique menée au profit des plus riches. La suppression de l’ISF n’est pas remise en cause. La flat-tax demeure et les revenus du capital resteront imposés de manière forfaitaire, sans progressivité, à un taux inférieur au premier taux de l’impôt sur le revenu. La question du pouvoir d’achat n’est envisagée que par des baisses d’impôts qui bénéficieront d’abord aux classes moyennes et supérieures. Si une partie des retraites est de nouveau indexée sur la hausse des prix, l’économie générale des mesures va conduire à une réduction de la sphère du public, et donc à une mise en danger des services publics et des régimes de solidarité. L’absence de mesures concrètes en réponse à la catastrophe écologique qui est devant nous est dramatique. Le président va jusqu’à mentir, user de l’intox pour, entre autres, justifier sa volonté de voir le temps de travail augmenter et voulant la matérialiser au travers de la réforme des retraites à venir (ou l’ajout d’un férié travaillé).

Un premier mai qui a valeur d’exemple

La manipulation de l’information par l’État est aujourd’hui patent. Le traitement des manifestations du premier mai en est un nouvel exemple et nécessite un positionnement clair de la FSU. Ce recours à l’escobarderie par le pouvoir a un double-objectif. Il vise à rendre invisibles les violences policières (5 mains arrachées, 23 éborgné-es, 279 blessures à la tête…) qui ont valu une condamnation de la France par la haute-commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unies. Il entend aussi minimiser la mesure du mécontentement et participer à la discréditation du mouvement des Gilets jaunes et  à sa requalification en mouvement violent ou aux accents d’extrême-droite, antisémites et homophobes. La crainte que ne s’agglomèrent symboliquement et concrètement les contestations à sa politique a poussé le gouvernement à s’en prendre aussi aux organisations syndicales ! C’est pourquoi il tape sans discernement. C’est pourquoi il gaze. C’est pourquoi il fait passer des manifestant-es brutalisé-es par la police pour des hordes s’attaquant à un hôpital public. Au vue de son bilan et de ses contrevérités répétées, le SNUipp et la FSU doivent demander la démission du Ministre de l’intérieur.

Un autre enseignement est à tirer de ce premier mai. 

Partout en France, les manifestations ont été importantes et elles ont rassemblé syndicalistes, Gilets jaunes et acteurs-trices des mouvements écologiques. Des rencontres avaient déjà existé. Des initiatives communes avaient déjà été prises. Mais on a pu, mercredi dernier, faire l’expérience, collectivement et à une échelle de masse, que les convergences sont possibles.

Poursuivre la lutte

en convergeant pour la justice sociale, les services publics et la défense du climat Il nous faut donc poursuivre la lutte. Et ce, fort-es d’un rapport de force que nous n’avons pas eu depuis bien des années et qui nous laisse entrevoir qu’une victoire peut être au bout de l’action. Après la journée de grève du 9 mai pour les services publics et contre la loi Blanquer, et avant la manifestation du 18 mai, nous devons maintenir pendant toute la semaine la pression sur les débats du Sénat, en multipliant les actions dans les écoles. Nous devons aussi construire un calendrier d’actions pour les semaines à venir , en mettant en débat la grève reconductible, pour obtenir l’abandon intégral de la loi pour une école de la confiance. Mais plus largement, il nous faut suivre les traces de ce premier mai : œuvrer à rassembler les mouvements pour la justice sociale, les services publics et la défense de la planète , pour mettre un coup d’arrêt aux politiques de Macron et son monde, pour stopper le démantèlement des communs auxquels aspirent ces plus riches qui vivent définitivement au-dessus de nos moyens.

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