Individualisation des parcours et des apprentissages. Externalisation du traitement de la difficulté scolaire. Renforcement des dispositifs de territorialisation du système éducatif. Logique d’autonomie de gestion et de pilotage par l’évaluation des établissements. Ce sont ces axes qui déterminent le projet éducatif d’Emmanuel Macron.
Et pour en anticiper les conséquences, il suffit de regarder l’état dégradé de notre système éducatif, tant est grande la familiarité des mesures envisagées avec les éléments les plus libéraux des politiques menées depuis près de 20 ans.
Depuis près de 20 ans donc, le nombre d’élèves en grande difficulté a augmenté. Les inégalités scolaires se sont aggravées. Les conditions de travail se sont dégradées. Et ce sont les élèves des classes populaires qui payent le prix fort d’un système scolaire parmi les plus inégalitaires des pays de l’OCDE.
Devant ce constat, il y avait urgence à entrer en rupture avec les politiques menées jusque là : agir pour transformer les pratiques de classe afin qu’elles tiennent compte du rapport au savoir des enfants des classes populaires, considérer l’hétérogénéité comme un levier de réussite en donnant les moyens aux enseignants de faire d’une classe un collectif apprenant, reconstruire des collectifs de travail nourris de l’ensemble des savoirs professionnels indispensables à la démocratisation du système scolaire.
Mais voila.
Face à l’idée d’égalité réelle, de démocratisation de l’école, Macron répond égalités des chance.
Face au pari de l’hétérogénéité, il affirme sa volonté d’individualiser les apprentissages, et ce dès la maternelle, en développant les supports numériques, les applications adaptées, ce qui va au passage augmenter le poids du prescrit sur nos pratiques. Il renforce la place de l’évaluations des élèves avec une évaluation annuelle.
Face à la nécessité d’agir sur le temps de classe, il promeut des dispositifs d’externalisation du traitement de la difficulté scolaire, avec les stage de remise à niveau pendant les vacances ou l’accompagnement éducatif. Et reste indigent en terme de formation.
Et il entend augmenter le poids du patronat dans la déterminations des contenus de formation des lycées professionnels, restreindre l’accès à l’enseignement supérieur par la mise en place de prérequis définis par les universités.
Et Il fait des choix qui vont renforcer les inégalités territoriales : dans le premier degré par le pouvoir accru des maires dans l’organisation du temps péri-scolaire et donc du temps scolaire. Dans le second degré, par l’autonomie donnée aux chefs d’établissement sur l’organisation des enseignements, pilotée par une évaluation tri-annuelle ou par la promotion du recrutement des personnels par les établissements volontaires.
Ce projet a sa cohérence qui va conduire à une aggravation des inégalités scolaires. Et c’est dans cette cohérence qu’il faut entendre sa volonté de mettre fin au dispositif de plus de maître que de classe, en redéployant les personnels vers le dédoublement des classes de CP en REP+.
Il nous faut affronter ce projet. Dans sa cohérence. Et ce dès maintenant.
Dans un contexte marquée tout à la fois par l’instabilité politique dont l’absence de visibilité de ce que sera la composition de la future assemblée nationale est une indication, et par la volonté du nouveau président de légiférer par ordonnance, le rôle de notre syndicat est d’organiser dès à présent l’opposition à sa politique éducative. Cela passe bien évidemment par notre refus l’abandon du dispositif de plus de maîtres que de classe, abandon qui est un coin mis dans la reconstruction de collectifs de travail. Refus clair, immédiat, qui doit engager les enseignants dans l’action. Mais cette action sera d’autant plus forte que, dans le même temps, on aura donné à voir à toute la profession vers où va Macron et on aura fait valoir auprès d’elle, mais aussi dans le débat public, notre projet de transformation de l’école qui lui, contrairement à celui de Macron, est à même de réaliser la démocratisation du système scolaire.