Le collège unique n’existe pas. Les élèves sont aujourd’hui séparés par le jeu des options, des langues, des projets, des parcours individualisés, de l’alternance, des 3ème PVP, de l’option découverte professionnelle, des classes européennes, des classes de niveau, des classes « ethniques », de la concurrence entre établissements, des stratégies d’évitement des usagers, de la concurrence anti-laïque du privé. Le collège actuel est tout sauf unique et les pratiques de diversification pérennisent sa fonction de niveau où s’accomplit une étape importante du tri social. Dans ce système inégalitaire, des élèves échouent, des enseignants se résignent et des établissements sombrent.
Renoncement et adaptation
Le Ministère en tire argument pour renouer avec la théorie des dons et l’idée d’une inégalité de nature qui imprégnaient les discours réactionnaires contre la scolarisation des filles ou des enfants de pauvres au XIXème et au XXème siècle. Il en profite aussi pour aggraver la relégation des élèves en difficulté avec les parcours individualisés et les dispositifs relais ; pour imposer un socle commun indigent qui rend caduque les programmes nationaux ; pour créer les collèges ambition-réussite, véritables collèges de proximité attachés à leurs territoires, où la « pédagogie de l’adaptation » et la réduction de l’école à une antichambre de l’entreprise prennent le pas sur toute forme d’exigence scolaire. Le coup de grâce est porté au collège par le recours généralisé à la précarité (AED, CA-CAE, vacataires) notamment dans les collèges réputés difficiles.
Le SNES pour un collège unifié
Plus que jamais l’objectif du SNES doit être un véritable collège unique ayant pour but de donner une culture entièrement commune à tous les élèves. A la diversification des parcours, des horaires et des contenus, nous devons opposer la diversité des pratiques pédagogiques, le développement des pédagogies explicites, le recentrage de l’action de l’école sur les apprentissages scolaires, l’abaissement des effectifs, l’hétérogénéité des classes, le travail en groupes, le développement du travail en équipe pour rompre avec l’isolement des enseignants et accélérer la mise au point d’outils pédagogiques qui favorisent la réussite de tous. Le SNES doit aussi prendre fermement position pour l’abrogation de la loi Fillon et la réintroduction des EP1 dans le cadre du régime commun à tous les collèges, ainsi que contre tout ce qui tend à séparer les élèves comme les dispositifs relais qui ne résolvent pas l’échec scolaire, stigmatisent les élèves, accroissent le sentiment d’une injustice collective et n’ont pour seul résultat tangible que de leur faire accepter une orientation non choisie et une éviction précoce du système scolaire.
Sylvain Marange, Ecole Emancipée, Nantes