L’école inclusive s’inscrit sans controverse dans notre corpus revendicatif. Parce qu’elle correspond à l’affirmation d’une école pour toutes et tous, parce qu’elle s’appuie sur les principes d’égalité et d’éducabilité.
Pourtant, cumulant les paradoxes, elle est l’une des principales sources de déstabilisations quotidiennes dans les écoles comme dans notre militantisme.
En effet, si un discours d’évidence s’installe depuis 20 ans, l’absence de moyens suffisants et de changements structurels en délègue la responsabilité aux personnels, entraînant des culpabilités et maltraitances professionnelles.
La piste d’équipes pluriprofessionnelles dans les écoles est à co-construire dans une connaissance mutuelle et une culture intermétier partagée, sur des temps institutionnalisés et prenant en compte les territoires ruraux ou d’outremer… Sauf que cette perspective est percutée par l’affaiblissement de la formation spécialisée, par le démantèlement organisé des RASED, par le changement de missions des psyEN détournées de la prévention -que les Assises de la santé accélèrent-, par l’inscription en force des PAS dans le Code de l’éducation, par la précarité continue des AESH, etc etc…
Dans la suite de notre campagne « inclusions », l’organisation d’États généraux par la FSU-SNUipp, en lien avec la fédération, permettra d’avancer sur les moyens, la formation, le rôle des RASED ou encore la place des établissements médicaux-sociaux.
Autre paradoxe : L’inclusion, c’est-à-dire l’égalité de participation des individus dans la société, se frotte scolairement à une sur-individualisation et une approche médicalisée qui essentialise les obstacles d’apprentissage. Cela occulte les difficultés liées au rapport aux savoirs des élèves issu∙es de milieux populaires, comme les enfants handicapé∙es.
D’ailleurs, “ Existe-t-il des enfants qui n’ont pas de besoins éducatifs particuliers ?” interrogeait Yves Reuter lors du webinaire de mars… confirmant la nécessité de mettre en œuvre notre mandat d’étude sur les EBEP.
La concrétisation d’une école inclusive se heurte donc à une école enfermée dans une forme scolaire qui reste rigide, avec des attendus désespérément normatifs.
Pire, si elle vise légitimement à rompre avec une histoire de ségrégations scolaires, elle s’inscrit dans un contexte d’accélération d’une école de la performance et de compétition… Comment penser que ce modèle pourrait être inclusif alors qu’il s’appuie sur des politiques éducatives créant échecs, assignations sociales et exclusions ?
C’est parce que notre syndicalisme continuera de porter une école prête à aller vers des changements structurels, prête à déconstruire les normes de références, tout en respectant et mobilisant les personnels, qu’il peut porter la construction d’une école inclusive, émancipatrice, prémices d’une société juste et égalitaire.