par Lucie Lefèvre
A l’École Émancipée du SNES-FSU, nous partageons les constats énoncés précédemment, mais il nous semble aussi que nous devons bien nommer ce qui fragilise psychologiquement tant d’agent-es de la fonction publique.
Les crises de vocations, les arrêts de travail, les suicides montrent la violence imposée dans le monde du travail par notre système économique et politique : le capitalisme néolibéral.
Le grand travail que nous faisons dans le cadre des F3SCT, notre expertise, les formations portant sur la prévention du suicide sont évidemment à saluer.
Mais est-ce que ces formations ne sont-elles pas, en creux, la preuve d’une souffrance au travail systémique ?
Le manque de temps, l’impossibilité du travail bien fait, le déséquilibre entre vies personnelles et professionnelles, la quête de productivité intériorisée, l’impression de maltraiter les usager-es viennent de la segmentation des tâches, de l’augmentation de la charge de travail, du New public management qui sont théorisées.
Notre fatigue et notre désespoir même pour certaines et certains ne sont pas des vues de l’esprit et c’est encore pire pour les plus fragiles : les personnes en situation de handicap, celles qui traversent une période personnelle éprouvante, les plus précaires, souffrant en plus de discriminations etc.
Si prévenir, c’est médicaliser ce qui devrait être politisé, cela ne s’appelle pas de la prévention mais du palliatif.
Le système psychiatrique alerte actuellement : des gens malades et pauvres errent dans la rue, sont attachés dans un lit pendant des heures, se retrouvent emprisonnés. Nous devons bien percevoir le coup social que représentent tant de travailleurs et de travailleuses abîmé-es. On en vient à devoir prendre des cachets contre l’éco-anxiété et les burn-out alors que les personnes victimes de schizophrénie, de bipolarité, de dépression chronique etc. n’ont pas pu peu de réponse médicale.
C’est une vraie alternative politique qu’il nous faut co-construire au sein d’une vraie gauche rassemblée et multiple.
Ce qui nous broie dans l’ombre, c’est la même machine sans cœur qui a fait tant de morts à France Telecom, qui impose la quête de performance, qui met en concurrence, obligent aux résultats quand il faudrait de l’humain.
C’est pour cela que nous vous invitons à voter l’amendement portant sur le paragraphe 220. Et nous demandons s’il ne serait pas possible, à minima, d’intégrer simplement la notion de « choix politiques néolibéraux » à la suite de la notion « conditions de travail » au début du paragraphe.
Pour conclure, une citation à méditer :
Dans A la ligne, Joseph Ponthus cite une ouvrière qui travaille avec lui à l’usine : « Tu te rends compte aujourd’hui c’est tellement speed que j’ai même pas le temps de chanter. » Il ajoute : « Je crois que c’est une des phrases les plus belles les plus vraies et les plus dures qui aient jamais été dites sur la condition ouvrière. Quelle part de machine intégrons-nous inconsciemment dans l’usine… »