La question de la durée du temps scolaire et de son découpage est depuis longtemps au cœur des réformes successives dans l’éducation nationale. Souvent, les ministres obéissent à des considérations qui ressortissent plus de la communication que de la politique dans le sens de la recherche de l’intérêt général. Claire Leconte, dans sa contribution au débat, donne quelques pistes. Que faut-il en retenir, et peut-on les utiliser pour construire une réponse syndicale ?
Dépasser quelques certitudes
Pour Claire Leconte, la fameuse alternance 7 semaines de classe/2 semaines de vacance ne s’appuie sur aucun fondement scientifique. Il vaudrait mieux tenir compte, dans un calendrier équilibré, des conditions naturelles – une période hivernale plus difficile… – et sociales – un mois de mai riche en jours fériés… – pour construire l’année scolaire.
La fin de semaine avec ses deux jours libérés serait aussi propice à une vie familiale plus épanouie. C’est oublier que, pour trois quarts des familles interrogées (dans une étude du CREDOC datée de 2001), les départs en week-end sont très rares. De même les parents séparés ont certes plus de facilité pour organiser leur temps, mais ils perdent aussi la possibilité de contact avec l’école que le samedi matin leur offrait.
Au sujet de la pause méridienne aussi, les affirmations péremptoires sont nombreuses. Il est vrai que le sujet est sensible dans les rangs des enseignants ! La coupure de midi est donc importante, c’est vrai, mais elle doit être aménagée de manière à être un temps de repos, ce qui est pour l’instant loin d’être le cas partout.
Gagner d’un côté, perdre de l’autre
On se heurte dans toute volonté d’aménagement du temps scolaire à des contradictions dont il faut tenir compte.
Augmenter le nombre de semaines de l’année scolaire, par exemple, pour diminuer le temps de la semaine augmente aussi le nombre de lundis, jours de reprise dont tout le monde s’accorde à dire qu’il n’est pas propice aux apprentissages.
Ainsi aussi les coupures (mercredi, fin de semaine, vacances…) qui pourraient permettre aux élèves de se ressourcer, sont également autant de reprises qu’il faudra affronter. D’autant plus que les cycles de sommeil seront bouleversés. Il n’est évidemment pas question ici de stigmatiser l’attitude des parents, mais bien de tenir compte d’une réalité. Claire Leconte souligne que certains enfants prennent l’école en grippe parce qu’elle les oblige à se coucher tôt !
Cadrage et souplesse
« Il faut impérativement préserver l’Éducation nationale, c’est donc au niveau du cadrage à respecter que cette préservation sera assurée » écrit Claire Leconte. Dans le même temps, il faut tenir compte des réalités locales, des ressources à disposition, des temps de transport… Les rythmes de vie des élèves d’une commune rurale des Ardennes ne sont pas les même que ceux des élèves d’une grande métropole du sud de la France !
Le cadrage préconisé par Claire Leconte devrait imposer au moins cinq journées de classe, avec une durée matinale plus longue. Dans le même temps, elle insiste sur la nécessaire formation des enseignants, pour le moins laissée pour compte ces derniers temps, afin de rendre vraiment possible les alternances entre les temps qui demandent une forte dépense cognitive et d’autre moins coûteux.
Libérer du temps sur la journée scolaire doit aussi permettre aux collectivités d’investir ce temps, à la condition de leur donner les moyens, aussi bien matériels qu’en terme de personnels, formés à cette fin.
…et nous dans tout ça ?
Quelles que soient les solutions envisagées, elles ne peuvent pas tenir compte uniquement des besoins de nos élèves, même si l’on conçoit que ceux-ci sont centraux dans ce domaine. Une organisation du temps scolaire qui ne prendrait pas en compte l’amélioration des conditions de travail des enseignants serait vouée à l’échec. Même si l’on ne se place pas du côté des travailleurs de l’éducation que nous sommes, on sait bien que la « production » dépend fortement de ses conditions de mise en œuvre. Et si l’on se place du côté des enseignants, à quoi servirait donc le syndicat s’il ne le faisait pas ? Cette préoccupation devrait être première.
La solution ? Le SNUipp-FSU l’a construite il y a déjà longtemps avec le « plus de maître que de classe ». Même si elle doit être toujours réinterrogée, elle doit rester notre boussole. Elle permet, en premier lieu, de décrocher le temps élève du temps enseignant.
Nous ne sortirons de ce débat sur les rythmes scolaires par le haut qu’en portant très fort cette revendication.