- Intervention de Mathilde Blanchard – Conseil national de la FSU-SNUIPP mai 2023 –
A la rentrée dernière, Macron s’engageait à augmenter le salaire des enseignant·es « d’environ 10 % ». Loin des promesses de revalorisation inconditionnelle ou de redonner sens au métier, le Président brandit un pacte. La FSU-SNUipp a été claire sur sa dénonciation et doit s’engager à présent dans une campagne de refus du principe même du « travailler plus pour gagner plus ». Ce pacte est en effet un perfide outil de divisions multiples.
D’une part, il renforce l’individualisation des carrières et les inégalités de rémunération. Entre les collègues volontaires et les autres, mais surtout entre celles et ceux qui pourront et les autres. Aller travailler au collège du secteur -brique incontournable- relève de possibilités diverses selon les territoires, entre horaires et trajets non conciliables. Travailler sur des missions supplémentaires relève aussi de possibilités inégales selon la charge familiale, fonction qui continue d’être assumée majoritairement par les femmes. La mise en place du pacte c’est donc le renforcement des inégalités en particulier femmes/hommes.
D’autre part, c’est un éclatement des collectifs de travail. Les enseignant.es comme les équipes fonctionnent déjà à flux tendus. Des missions supplémentaires ce sera moins de temps serein pour penser son métier, individuellement, comme collectivement, ce sera moins de temps pour échanger et construire des réponses entre profesionnel.les, en inter-métier ou avec les familles. Et c’est bien un objectif du concept « travailler plus pour gagner plus… Pour penser moins. »
Le pacte, c’est aussi l’opportunité de développer la hiérarchisation dans l’école puisque c’est à la directrice de valider les missions, percutant la particularité organisationnelle actuelle des écoles, instaurant insidieusement, à petits pas le new management public.
Le pacte, c’est encore une conception éducative susceptible de diviser les collègues dans leurs conceptions pédagogiques. Il s’appuie sur un soutien individualisé, différé au moment du collège, en dehors des temps collectifs d’apprentissages que constitue la classe. Cette externalisation supplémentaire de la difficulté, difficulté pourtant inhérente à tout apprentissage, constitue un prétendu remède aux inégalités scolaires, actant le renoncement institutionnel à une culture commune pour toutes et tous. Le pacte est un apparat déculpabilisant dans un contexte de suppression de postes empêchant une amélioration des conditions de travail et d’apprentissage, sans moyen pour la prévention ni l’adaptation.
Alors, comment résister collectivement alors que c’est justement une mesure d’individualisation ?
Continuons évidemment de dénoncer ces mesures discriminantes, sans pour autant culpabiliser les collègues qui s’y engageraient, car en effet le lissage des carrières engendré par la partie socle fait du pacte la seule entrée pour une perspective d’augmentation salariale pour beaucoup, dans un contexte d’inflation.
Cette fin d’année doit permettre de réunir nos collègues : informer, faire discuter… faire sentir que quelque chose se joue de l’unité de la profession.
La FSU-SNUipp doit poursuivre son engagement dans la dénonciation du pacte et le refus du pacte. Il importe également d’offrir une perspective d’expression à définir ensemble (lors de ce CN), dans le but d’une mobilisation, en construisant fédéralement et le plus unitairement possible, toutes les oppositions à même d’empêcher cette déconstruction néo-libérale du service public d’éducation.
Le pacte c’est non. Ce que nous voulons, ce sont des augmentations inconditionnelles de tous les salaires, c’est l’amélioration des conditions de travail, des conditions d’apprentissage pour un projet éducatif émancipateur.