La situation est difficile mais on a parfois des rayons de soleil. La mobilisation des Algérien-nes, qui a amené le pouvoir à reculer et le chef des Armées à demander le retrait d’Abdelaziz Bouteflika, redonne espoir.
En ce qui concerne la situation en France, l’étau se resserre : imaginez l’ambiance en salle des profs quand le chef sera tout puissant car il décidera de qui travaille dans l’établissement après la fin des CAPA pour les mutations, quand la majorité des profs seront contractuel-les, quand il faudra se taire car nous pourrons être sanctionné-es si nous critiquons l’institution…
La loi Blanquer est le bras armé de la loi Fonction publique dans l’éducation : autoritarisme, dérégulation, casse du service public, restriction des droits des personnels.
Pour empêcher le gouvernement d’appliquer ces deux lois, il faut un niveau de rapport de force important. Nous avons donc besoin d’une réaction du mouvement syndical, en alliance avec tout le mouvement social, pour mener campagne pour la défense des services publics. Une ou deux journées de grève ne suffiront pas, il faut un mouvement de toute la société pour défendre ce bien commun. Un mouvement dans la société qui se mobilise pour la justice sociale, pour la justice fiscale, pour le rétablissement de l’ISF, pour davantage de démocratie ? Vous voulez parler des gilets jaunes ?
Comment demander à tou-tes les usager-es de lutter avec les personnels si nous ne sommes pas capables d’être solidaires d’un mouvement qui porte une critique sociale de la politique d’Emmanuel Macron ? Comment est-ce possible qu’aucune motion du CDFN de la FSU ou de la CAN du SNES n’ait apporté un soutien explicite à ce mouvement, n’ait appelé à le soutenir, n’ait donné les armes pour converger avec lui ?
Il est de la responsabilité des organisations syndicales de faire converger et d’élargir les mobilisations populaires pour plus de justice sociale.
Surtout quand les libertés publiques sont attaquées comme elles le sont : l’ONU condamne la France pour « usage excessif de la force », l’armée menace d’ouvrir le feu sur les cortèges, des manifestant-es, comme Geneviève Legay à Nice, sont violemment agressé-es alors qu’ils et elles manifestent pacifiquement. Ces restrictions impactent également les organisations syndicales dans leurs capacités à agir.
Et quand le gouvernement fait diversion avec sa prétendue lutte contre l’antisémitisme, qu’il l’instrumentalise pour lancer une nouvelle grande union nationale, ne tombons pas dans le panneau. Rappelons que Macron a voulu réhabiliter le grand soldat qu’aurait été selon lui le maréchal Pétain. Par son amalgame de l’antisémitisme et de l’antisionisme, le gouvernement fait en réalité le jeu des antisémites. Lutter contre la politique de l’État d’Israël, qui a lancé plus de 100 raids aériens sur Gaza dans la nuit de lundi à mardi, c’est lutter contre un État criminel, et non contre une religion. Le mouvement syndical doit au contraire lutter contre l’antisémitisme et tous les racismes par ses propres moyens. La FSU a su le faire en dénonçant l’attentat terroriste islamophobe de Christchurch aux côtés d’autres organisations syndicales et associations. Il faudra également rejoindre la Voix des Rroms dans sa dénonciation des récentes agressions rromophobes suite aux fausses rumeurs d’enlèvements d’enfants diffusées ces derniers jours.
Nous avons besoin d’une campagne large pour les services publics, contre la loi Fonction publique. Le SNES et la FSU doivent mener cette bataille de manière intersyndicale, contrairement à ce qui a été fait avec la seule pétition FSU qui n’a recueilli que 30 000 signatures. Ils doivent convaincre en invitant toutes les organisations du mouvement social à s’unir pour défendre les services publics, et ce afin que les prochaines actions envisagées, dont la grève nationale du 9 mai, rassemblent un maximum de collègues dans la rue. Cela permettra de montrer la légitimité de notre lutte et d’entraîner l’opinion publique avec nous.
Face à la loi Blanquer, la journée de samedi permettra de rebondir sur la mobilisation du 19 mars, pour préparer l’action du 4 avril et faire en sorte que la grève soit suivie le plus largement possible. Cela permettra d’envisager des suites, malgré les départs en vacances décalés, réussir la grève du 9 mai et s’appuyer sur ce mouvement pour poser la question du boycott des surveillances du bac, par exemple le 17 juin.
Le SNES et la FSU doivent proposer un plan d’action qui permette de faire converger les luttes et qui donne espoir aux collègues dans les chances de victoire, en articulant toutes ces batailles indispensables dans les domaines de l’éducation, de la Fonction publique et dans le champ interprofessionnel. Loin de concurrencer les mouvements des gilets jaunes, des stylos rouges et des autres collectifs, ces initiatives doivent permettre de rassembler pour porter un coup d’arrêt à la politique de casse sociale d’Emmanuel Macron et de son gouvernement.