Les prochaines élections professionnelles dans les trois fonctions publiques vont marquer les rapports de force entre organisations syndicales et peser sur l’avenir du syndicalisme français.
Pour la première fois, les élections professionnelles vont se dérouler en même temps dans les trois Fonctions publiques du 27 novembre au 4 décembre prochain. 2,3 millions de salarié-es de la Fonction publique d’État, 1,8 million de la Territoriale et 1,1 million de l’Hospitalière seront concernés. L’enjeu est la détermination de la représentativité des différents syndicats dans ces trois sphères et la manière dont les agents seront défendus au sein des différentes structures les impliquant. C’est-à-dire les commissions paritaires, les comités techniques, les commissions consultatives paritaires pour les agents non-titulaires et les différents Conseils supérieurs, mais aussi, d’autres instances non éligibles directement comme les CHSCT.
Ces élections vont dessiner l’état du paysage syndical et les rapports de force entre les syndicats de la Fonction publique. Elles viendront compléter le référendum de représentativité dans le privé de 2013.
Elles se situent dans un contexte particulier avec la nomination du gouvernement Valls 2, accentuant la fuite en avant dans les politiques austéritaires libérales, avec tous les dégâts sociaux en résultant. Celles-ci ont bien sûr des effets concrets pour les fonctionnaires au quotidien avec le blocage salarial (depuis 7 ans), les réductions budgétaires et la mise à mal dans de nombreux ministères des services au public.
Ces élections seront-elles un moment d’expression du ras-le-bol, de la colère, avec la volonté de soutenir les organisations combatives, porteuses d’alternatives et enracinées dans leurs milieux professionnels ? De toute évidence, cette dynamique serait positive. Il faudrait qu’elle se traduise dans le taux de participation. Une abstention maintenue traduirait, à l’inverse, une résignation, un désenchantement, une distanciation entre les personnels et les syndicats, avec un processus renvoyant aux phénomènes de crise de la représentation politique. Ce serait un révélateur alors d’un manque de crédibilité et d’utilité des syndicats devant leur difficulté, face aux attaques sociales, à développer des mobilisations conséquentes et surtout à remporter des succès.
L’enjeu de la participation
Les équilibres entre organisations syndicales seront également scrutés avec beaucoup d’attention. Les scores de celles spécialistes de l’approbation des mesures gouvernementales (notamment du pacte de responsabilité…) seront révélateurs de l’état de la situation sociale et politique.
Pour la FSU, le scrutin concentre un certain nombre d’enjeux. Elle est présente dans la Fonction publique d’État (FPE) en étant notamment la première organisation dans l’Éducation Nationale qui représente le plus gros ministère de la FPE. Elle est représentative nationalement aussi à la Culture, la Justice, l’Agriculture, à Jeunesse et sports, au Sup recherche, au MEDDTL, au MAE, au Travail… Mais souvent avec des positions fragiles. Deux de ses syndicats sont présents dans la Fonction publique territoriale où elle n’est pas représentative nationalement. Elle est absente de la Fonction publique hospitalière.
Les résultats du dernier scrutin de 2011 ont été marqués par une énorme baisse du taux de participation dans l’Éducation Nationale (24 points en moins). Le changement des modalités de vote, avec la généralisation du vote électronique, en a été la principale cause mais un tel fléchissement a aussi, sans aucun doute, d’autres causes. Le rétablissement du taux de participation au MEN par rapport à ce dévissage est en soi un objectif.
Dans l’Éducation nationale, la FSU est restée la première organisation et de loin. Elle représente 41 % à elle toute seule, devant l’UNSA (21 %), le SGEN-CFDT (10 %), FO (10 %), la CGT (6 %), SUD éducation (6 %). Malgré cette avance, le manque massif d’électeurs/trices n’ayant pas voté a conduit à la perte de sa première place dans la FPE en étant devancée de très peu par FO avec 16,6 % et à égalité avec la CGT avec 15,8 % (250 voix d’avance pour la FSU). Les syndicats suivants étant à 14,8 % (CFDT), 14,25 % (UNSA), Solidaires (8,7 %), CGC (5,3 %) et CFTC (4 %).
À l’échelle de l’ensemble de la Fonction publique, c’est la CGT qui est devant avec 25,4 %, devant la CFDT (19,1 %), FO (18,1 %), l’UNSA (9,3 %), la FSU (8,2 %), Solidaires (6,6 %), la CFTC (4 %), la CGC (2,9 %), la FA FPT (2,5 %).
Les objectifs et enjeux pour la FSU sont donc de redevenir la première organisation dans la FPE et de gagner sa représentativité dans la FPT (il faut qu’elle y fasse 5 %).
Par l’image révélatrice de l’état du paysage syndical, cette élection pèsera très fort sur l’avenir du syndicalisme,
au-delà des trois fonctions publiques. Nous y reviendrons dans notre prochain numéro. ●
Laurent Zappi