Edito de la revue n°83
Un des problèmes matériels centraux auquel nous sommes confronté-es au cours de la pandémie de nouveau coronavirus, c’est l’approvisionnement en masques de qualité. Le gouvernement a menti sur ses stocks, sur sa capacité à se fournir. Il met encore en danger des milliers de personnes du fait de choix politiques criminels.
Loin d’avoir compris la leçon, et bien que l’actualité en fasse la démonstration concrète chaque jour, les ministres continuent de promouvoir l’économie de marché pour satisfaire les besoins de la population. Or on ne compte plus les prix abusifs, les masques de mauvaise qualité, les arnaques en tout genre. Était-il si compliqué en deux mois de confinement de planifier une production de qualité sur notre territoire ? C’est l’idéologie néo-libérale qui a disqualifié cette solution. Cet exemple simple montre le prisme choisi pour solutionner les problèmes auxquels nous sommes confrontés.
Enjeux environnementaux, enjeux d’emploi : est-ce que le marché y pourvoira ?
Le ralentissement économique met en difficulté de nombreux secteurs d’activité. Les activités du quotidien : restauration, librairie, coiffure… Mais aussi automobile, transports aériens… Si le redémarrage de certaines activités se fera sans doute petit à petit, il semble qu’elle se fasse au détriment des plus petits. Comment la librairie du quartier, fermée par le confinement, peut-elle rivaliser avec le géant Amazon, qui continue de livrer des livres sur tout le territoire, malgré la victoire syndicale en justice l’obligeant à fermer ses centres en France ? Comment penser qu’il est possible, sans poursuivre la destruction de la biodiversité (qui contribue à l’apparition de pandémies), de redémarrer à toute vitesse des activités climaticides comme la production en masse des automobiles individuelles et le transport aérien ? Si le marché y pourvoit, c’est toute la planète qui le paie !
Pour l’éducation des jeunes, est-ce que le marché y pourvoira ?
À l’heure des écritures de notre revue, les écoles rouvrent leur porte. Le volontariat des parents semble dicter l’accueil des enfants, les masques manquent, les personnels manquent pour organiser une école toute hospitalière, nécessaire à l’endiguement de la pandémie. Il se profile une école prison, incapable d’instruire tou-tes les élèves. Sur ce dossier comme sur les autres, le gouvernement a ses recettes : l’école publique comme garderie, le numérique et le privé comme solution d’enseignement des plus initié-es à la culture scolaire.
Ainsi le marché ne pouvant pourvoir, il nous faudra prévoir ! Nos batailles pour une société et une école démocratique, pour travailler moins et travailler toutes et tous, pour des activités socialement et écologiquement utiles deviennent d’une urgente actualité. Aussi, dé-confinons nos luttes, inventons les masques FFP « 2.0 » que le gouvernement ne nous fournira pas et avançons dans la réflexion pour construire des initiatives de mobilisation empreintes des gestes protecteurs de la santé, pour les services publics, l’emploi et l’environnement ●
Clément Lefèvre
Crédit image : (cc) Jeanne Menjoulet sur Flickr