Dès le printemps dernier, des établissements des Hauts de Seine se sont mis en grève pour protester face à la sortie du classement ZEP actée en 2015 et la fin annoncée des mesures compensatoires (conservation des bonifications de mutations et des primes). De nouvelles journées de grève en septembre puis en octobre ont fait tache d’huile en région parisienne et à partir de novembre, de nombreuses académies ailleurs en France (Marseille, Amiens, Rouen…) rejoignent Versailles et Créteil pour de bon. Tout le travail de coordination et d’ex- tension de la mobilisation est assuré par un collectif militant constitué de collègues syndiqué-e-s et non syndi- qué-e-s qui se reconnaît dans un appel intitulé « Touche Pas A Ma Zep (TPMZ) » et bientôt signé par une centaine d’établissements et des sections syndicales départementales. Cet appel exige la publication d’une carte élargie de l’éducation prioritaire en lycée avec un label unique assurant des moyens et des dispositifs adaptés avant la fin du mandat de Hollande. Face à la contestation qui monte, la ministre fait des concessions : elle prolonge d’abord de deux ans les mesures compensatoires, puis annonce la dotation de 450 postes spécifiques réservés aux lycées dits « défavorisés » la veille de la journée de grève du 29 novembre. Cette avancée donne confiance aux collègues mobilisés, et la décision est alors prise d’accentuer la pression sur le ministère en appelant à la grève reconductible dès la rentrée des vacances de Noël.
Le pari était risqué, mais au final une cinquantaine d’établissements en France sont en grève au moins les trois premiers jours de la première semaine de janvier, et enchaînent avec les temps forts du 10 et du 19 janvier. Une nouvelle journée de grève et de manifestation est alors actée pour le vendredi 27 janvier, notamment pour exiger un décret rapide du président dont le parti choisit son futur candidat aux présidentielles le week-end même via ses primaires.
Alors que l’avenir du mouvement est encore en suspens, il est sans doute déjà utile d’en analyser les points forts et les limites : sa capacité à durer aussi longtemps, à s’étendre sur plusieurs académies, et à mobiliser des col- lègues au-delà des équipes militantes qui peuvent exister dans les établissements est remarquable, pour ne pas dire exceptionnelle dans un contexte d’élections propice à l’attente plutôt qu’à l’action. Par ailleurs, le savoir-faire du collectif TPMZ en matière de communication et de média- tisation aura permis de planter une véritable épine dans le pied de la ministre qui souhaitait faire de son bilan un argument de campagne électorale. Néanmoins, hormis dans l’académie de Marseille et quelques établissements de Versailles et Créteil, les taux de grévistes sont toujours restés minoritaires et sur ce plan le mouvement a plafonné sans jamais monter en puissance.
Une des limites est sans doute liée au rôle des syndicats. Même si ceux-ci – notamment le Snes pour Créteil- ont soutenu les actions du collectif – en particulier sous la forme d’intersyndicales académiques- ils n’ont jamais joué de rôle moteur dans l’orientation du mouvement et le collectif s’est finalement retrouvé assez isolé
dans cette lutte sectorielle et contraint à faire des choix stratégiques difficiles. C’est regrettable car le rythme et les modalités d’action auraient gagné à être discutés en ag avec les représentant-e-s de l’inter- syndicale et pas seulement ceux et celles du collectif TPMZ. Une préoccupation à garder à l’esprit pour entraîner des établissements qui auraient dû se retrouver dans cette lutte, notamment si l’on souhaite qu’elle rebondisse et s’élargisse dans les mois qui viennent autour de la question des DHG très insuffi- santes présentées en ce moment.