Une pétition monstre et historique en ligne, un emballement sur les réseaux sociaux du hashtag #OnVautMieuxQueCa, une première journée très réussie le 9 mars, une deuxième le 17 mars avec encore plus de jeunes dans la rue… La mobilisation contre la loi travail est enclenchée. Elle catalyse le rejet des politiques libérales et antisociales du gouvernement tout en remettant la question du travail sur le devant de la scène. Fleurissent par exemple dans les cortèges des pancartes sur la baisse du temps de travail ou le partage des richesses. Face au gouvernement qui parachève son virage libéral, le peuple, dans la rue, fait face avec fierté.
Cette loi travail est porteuse de lourdes régressions : renversement de la hiérarchie des normes ouvrant la voie à un affaiblissement des salariés face à leur employeur, recours au référendum d’entreprise dévoyant la représentation des salariés via les syndicats, nouveaux critères facilitant les conditions de licenciement économique, trop nombreuses dérogations à la durée légale du temps de travail tendant à achever ce qui reste des 35 heures…
Privé, jeunes et public : tous concerné-es
La jeunesse scolarisée, souvent déjà salariée et a fortiori future salariée, et les salariés du privé sont percutés de plein fouet par ces enjeux et ces dangers. Penser que la fonction publique ne sera pas impactée est une illusion qu’il nous faut syndicalement déconstruire.
La journée de grève unitaire du 22 aurait dû permettre une mobilisation des fonctionnaires sur les salaires, complémentaire et convergente avec le mouvement social naissant. Malgré la forte légitimité de cette journée, l’éclatement de l’arc syndical ne l’a pas permis. D’un côté, Cgt et Solidaires priorisent le 31 et se désengagent de tout appel ferme à la grève et de l’autre, après s’être engagé avec beaucoup de réserve, l’Unsa se retire de toute mobilisation tandis que la Cdft appelle à la grève le vendredi soir pour le mardi suivant, sans bien évidemment évoquer le projet de loi travail qu’elle a avalisé quelques jours avant. Pour construire un fiasco, on ne s’y prendrait pas autrement… Pourtant, jusqu’au bout la FSU a fait en sorte de maintenir le cadre unitaire national et l’ÉÉ a argumenté sur la complémentarité et la convergence entre la mobilisation fonction publique et celle sur la loi travail. C’était légitime, mais cela n’aura pas suffi et le 22 n’a pas été la journée de grève nationale unitaire attendue et nécessaire après l’indigence des augmentations salariales accordées par le gouvernement.
Il nous faut maintenant à la fois poursuivre la mobilisation sur les salaires tout en mettant à jour les liens, directs et indirects, entre la loi travail et la fonction publique.
Les liens entre
code du travail
et fonction publique
Pour réussir la journée du 31 dans les écoles, nous devons montrer tous ces liens.
Par exemple, la réforme des retraites de 2003 ou celle de la représentativité syndicale mettent en œuvre une même logique dans le privé comme dans le public, seul le mécanisme pouvant varier. Les dispositions contenues dans la loi travail en terme de primauté des accords d’entreprise, de référendums, de redéfinition de la majorité syndicale… auraient bien des traductions dans la fonction publique.
Et dans la réalité quotidienne du travail, les fonctionnaires, avec le new public management, sont confrontés aux mêmes logiques managériales que celles du privé.
Quant au code du travail en lui-même, on en retrouve de fortes résonances dans la fonction publique : temps de travail et référence aux 35 heures, formation avec le droit individuel à la formation, santé et sécurité au travail avec les CHSCT directement régis par un pan entier du code du travail… Tout recul dans le privé sur un de ces sujets aurait bien évidemment des répercussions pour les salariés du public.
Une dégradation du statut de salarié-e dans le privé donnerait encore plus au statut de fonctionnaire une posture « privilégiée ». A l’instar de ce qui s’est passé sur les retraites, cette réforme facilite de façon indirecte une attaque sur les statuts de la fonction publique.
Préparer et réussir la grève du 31 mars
Préparer et réussir la grève du 31 mars passe par une campagne de conviction des enseignants, à la fois sur la nocivité intrinsèque de la loi, le lien assez étroit entre le code du travail et la fonction publique, le travail en général en s’appuyant notamment sur le chantier travail mené par le syndicat…
Ce travail de conviction doit se construire dans des rencontres avec les collègues, dans des RIS, des réunions larges et les assemblées générales de grévistes le 31 mars qui permettront des débats sur le fond de la réforme et ses conséquences.
Il s’agit de se mobiliser pour le retrait de la loi travail et parce que #OnVautMieuxQueCa. À la fois contre les régressions qu’engendreraient cette loi pour les salariés et futurs salariés du privé et pour un autre travail.
Mais pas uniquement. Il s’agit de se mobiliser également parce que cette loi aurait de lourdes conséquences sur la fonction publique elle-même.
La journée du 31 mars ne suffira pas à elle seule. De nouvelles échéances de mobilisations devront avoir lieu d’ici le 1er mai.