La période précédant les vacances a été marquée par la généralisation des évaluations en CP et CE1 et par un fort engagement du SNUipp pour accompagner tout ce processus avec des analyses syndicales et des témoignages de collègues. Nous devons maintenant tirer un bilan de cette phase dans sa globalité. Plusieurs axes paraissent d’emblée importants à investir, que ce soit en termes d’appréhension du rôle de ces évaluations dans la politique éducative du gouvernement ou en termes d’action syndicale. Il faudra très vite se placer dans la perspective à court terme de l’arrivée de la nouvelle phase de janvier-février pour les CP et dans celle, plus lointaine, de la généralisation de ces évaluations à différents niveaux de la scolarité.
Le Snuipp a fait le choix d’alimenter le débat et de donner la parole aux collègues, non pas pour se défausser de ses responsabilités mais pour se faire l’écho de l’expérience réelle des enseignant-es, confronté-es, souvent seul-es, à une prescription dont ils ne percevaient pas toujours a priori les enjeux. Les verbatims de l’adresse mail font la preuve que les analyses syndicales sont pour la plupart reprises par les collègues qui s’expriment. On peut même avancer que le SNUipp a remporté une partie de la bataille intellectuelle avec l’aide déterminante des chercheurs engagés dans le débat à nos côtés, les médias ayant été beaucoup plus mesurés qu’à l’accoutumée dans leur analyse des décisions de notre ministre. Si nous pouvons affirmer que pour Blanquer, le SNU constitue un caillou dans sa chaussure en l’empêchant de dérouler tranquillement son discours pseudo-scientifique et, si indéniablement nous avons marqué des points, la guerre est loin d’être gagnée. Les collègues sont sensibles à nos arguments mais encore en difficulté pour assumer pleinement de suivre une consigne dont ils supposent, quelquefois à juste titre, qu’elle pourrait les mettre individuellement en difficulté. Tout l’enjeu de la consigne à venir pour la seconde salve d’évaluations se trouve dans cette question.
Pour aborder au mieux cette nouvelle étape, nous devons continuer à placer la question des évaluations au premier plan de nos préoccupations parce qu’elle constitue l’un des pivots essentiels de la politique Blanquer, ce qui exige d’être particulièrement attentifs à la façon dont notre administration utilisera les résultats des classes et des écoles. On sait déjà, mais les collègues n’en sont peut-être encore pas convaincus, que c’est dans les prescriptions à venir que se nichera le diable : imposition de méthodes de lecture, orientation des pratiques vers des apprentissages systématiques avec une place très importante donnée à l’entraînement, sur-investissement des apprentissages dits-fondamentaux au détriment des autres disciplines… Le fait que Blanquer se soit exprimé de façon catastrophiste alors qu’une toute partie des résultats était parvenue au ministère, plaide en notre faveur, cette précipitation laissant clairement entendre que les conclusions étaient écrites avant même la fin du processus, voire même avant son commencement. Nous avions alerté sur le risque d’instrumentalisation politique, les faits nous donnent raison.
Dans les semaines qui viennent, il est nécessaire que le SNU continue de se faire publiquement le relais de l’expérience des collègues et des élèves au travers d’articles dans FsC, sur le site, dans les RIS ou dans les stages pour alimenter le discours critique.
Si la consigne de remontée n’a pas été suivie à la hauteur de nos attentes, nous devons sereinement interroger les conditions dans lesquelles elle a été lancée pour l’améliorer, et ainsi obtenir une meilleure adhésion en janvier : timing, sentiment d’avoir à prendre une décision individuelle, crainte de sanctions… Si cette consigne devra, a minima, concerner la non saisie comme en septembre, c’est avec nos collègues que nous pourrons la rendre plus efficace voire plus percutante.
Au même titre que ce qui fonde la grève du 12, la campagne du SNU sur les évaluations est un élément déterminant de notre campagne pour les paritaires. Elle est la déclinaison de l’engagement du SNU au plus près de la réalité du terrain avec le souci d’associer les collègues, de prendre en compte la réalité de ce qu’il vivent au quotidien tout en gardant, contrairement à d’autres organisations syndicales, l’exigence de l’analyse avec l’éclairage de la recherche. C’est ce qui a toujours fait la force du SNUipp, continuons dans cette voie, les collègues nous en sauront gré.
Et on peut, sans coup férir, avancer que, sans prise de conscience de la part des collègues des intentions réelles du ministre, les conséquences seront les mêmes que dans les pays anglo-saxons : teaching for tests, réduction des curricula à ce qui sera évalué, évaluations des enseignant-es en fonction des résultats de leurs élèves et donc triche au moment de la passation ou de la saisie des résultats.