En septembre, le gouvernement français a présenté un budget soumis au régime de l’austérité .
Le 7 novembre, François Fillon intensifie la rigueur
avec des mesures plus injustes encore. Au menu : paiement
des intérêts de la dette, réduction des dépenses publiques et hausse d’impôts… Qui payera la note ?
Le gouvernement dans une parfaite logique libérale a laissé filer la dette publique en privant l’Etat de ses ressources : malgré des politiques de réductions des dépenses, que nous n’avons cessé de dénoncer, le choix de privilégier les plus riches, depuis 2007 avec la loi TEPA, a mis en péril l’équilibre budgétaire. Les inégalités sociales se sont creusées et, en 2012, la crise qui s’aggrave sert de prétexte à une politique de rigueur qui continue la destruction des services publics et devrait plonger l’économie en état de récession. Tandis que les plus fragiles risquent de sombrer et que les classes moyennes sont sur-sollicitées, les plus riches le resteront au-delà de toute décence.
Un choix
Dans un premier temps, avec le budget de septembre, le gouvernement tablait sur un taux de croissance à 1,75 %. Un « trou » de plusieurs milliards était à prévoir et un autre tour de vis sur les dépenses à craindre. Il n’y aura pas eu à attendre longtemps ! En novembre, un deuxième plan de rigueur voit le jour, établi cette fois à partir d’un taux de 1 %. Cette rigueur en deux temps n’est sans doute pas à mettre sur le compte d’une erreur mais plutôt d’une stratégie gouvernementale pour annihiler toute réaction populaire et se dédouaner. Ainsi le gouvernement apparaît comme ayant cherché des solutions « douces » et finalement « contraint » de se montrer plus dur, la crise perdurant et s’amplifiant. Il laisse ainsi entendre qu’un autre choix n’existe pas et que ce budget est indépendant de sa volonté.
En se fixant comme objectif intangible de faire baisser le déficit de 5,7 % du PIB à 4,5 %, sans une refonte complète de la fiscalité pour un vrai système redistributif, Sarkozy choisit de continuer le massacre de l’action et de l’emploi publics. Le maintien du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite va conduire à la suppression de 30 401 postes (équivalent temps pleins) dont 14 400 dans l’Education Nationale, 7 462 à la Défense, 3 621 à l’Intérieur et 2 870 au Budget. Les budgets des ministères, en septembre, restaient stables et donc insuffisants avec même une baisse au ministère du travail (fin des crédits dédiés aux mesures du plan de relance et de lutte contre le chômage). En novembre, on nous annonce 500 millions d’euros d’économies supplémentaires… Le paiement des intérêts de la dette, lui, est bien le premier poste de dépense. La soumission à la Finance et la rigueur sont un choix et le gouvernement est parfaitement conscient du projet social qu’il poursuit.
Des efforts équitables ?
En septembre, le gouvernement, en augmentant la part des recettes (11 milliards) par rapport à la part qui résultera de la baisse des dépenses (1 milliard), semblait infléchir sa politique. Lorsqu’on se penchait sur le détail de la hausse des impôts, cette inflexion était déjà nettement moins évidente.
Les mesures fiscales qui mettaient à contribution les plus riches restaient symboliques au regard des cadeaux engrangés depuis l’élection de Sarkozy et surtout au regard des besoins de financement et de répartition des richesses. Les mesures qui touchaient les classes moyennes et les plus faibles, elles, pesaient proportionnellement beaucoup plus lourd sur ces ménages.
Désormais, tout en fragilisant plus encore l’économie, le gouvernement s’attaque sans détours aux salariés, aux chômeurs, aux retraités : accélération de la réforme des retraites, limitation de la progression des dépenses de santé, mise en cause du financement des collectivités locales, désindexation partielle des prestations sociales. Dans le même temps, du côté des recettes il s’obstine à refuser de revenir sur les niches les plus importantes, la défiscalisation des heures supplémentaires et le crédit impôt-recherche (5 Milliards d’euros) aux effets d’aubaine patents pour les plus grosses entreprises et à l’efficacité peu probante. L’industrie et le commerce du luxe se portent bien mais le gouvernement n’a pas prévu de hausse ciblée de la TVA sur ces produits ! Sarkozy fait bien payer l’addition au plus grand nombre et essaye de rendre la crise la plus indolore possible, voire profitable, aux nantis. L’INSEE a publié des chiffres qui indiquent déjà que ce sont les plus pauvres qui en souffrent le plus.
Nous avons raison dans nos analyses, raison de dénoncer ce budget et le choix de soumettre les peuples à la finance… mais avoir raison est loin d’être suffisant. Gardons à l’esprit que les libéraux ne sont pas dans l’erreur mais qu’ils bâtissent un vaste projet dans lequel ils cherchent à avancer le plus vite possible. Ainsi, préconiser des « recettes » keynésiennes est notoirement
insuffisant. Si la seule solution est d’imposer, par un rapport de force, d’autres choix remettant en cause le système, alors les responsabilités du syndicalisme vont bien au-delà de l’analyse et de l’argumentaire. Et ceux qui comptent uniquement sur 2012 sont loin d’être à la hauteur. ●
Edwige Friso