Bilan des élections internes 2010 au SNUipp

Un enjeu particulier…

Dans un contexte de très forte mobilisation sociale contre la réforme gouvernementale des retraites, – sans doute le mouvement interprofessionnel le plus important depuis 1968 en terme de nombre de salariés mobilisés dans les grèves et les manifestations -, ce vote d’orientation revêtait une importance particulière pour les militants qui, comme ceux de l’Ecole Emancipée, entendent faire vivre, pour le renforcer, un syndicalisme revendicatif, antilibéral, fédéral et de transformation sociale.
Il s’inscrivait également dans la suite du congrès de Brive de juin 2010 qui avait donné lieu à une large interpellation critique de l’action du SNUipp ces dernières années et permis la construction de mandats offensifs, construction dans laquelle, avec nombre de sections départementales, l’Ecole Emancipée avait pris toute sa place.
Un bilan positif d’un congrès dynamique, mais contesté pour partie par des militants UA de la direction nationale arguant que les militants mandatés ne seraient pas représentatifs de la profession et des syndiqués.
Dès lors, il était nécessaire, pour les uns et pour les autres, de confirmer la légitimité et l’analyse du congrès par le vote d’orientation qui suivait.

1) Participation : une hausse de 4.18%

Avec 16 580 votants, elle atteint un taux de 31,8%. C’est une progression importante par rapport au vote SNUipp de 2007 : 4,18 points supplémentaires. Depuis la naissance du SNUipp (1993), c’est la première fois que la participation est aussi forte. En nombre de votants, cela fait 2 478 électeurs supplémentaires par rapport à 2007, soit une progression de 17,5%.
Il faut se féliciter de cette augmentation. Avoir plus de 16 500 syndiqués qui donnent un « avis » sur l’orientation du syndicat n’est pas rien. Etre en capacité de recueillir l’avis de plus de 30% de ses syndiqués est une bonne chose pour une organisation syndicale et n’est pas si courant dans le syndicalisme français. Cela permet d’enregistrer des signes politiques sur l’état d’esprit des syndiqués du SNUipp à un instant précis.
Si on examine la courbe des taux de participation, on s’aperçoit qu’après avoir démarré « haut » (autour de 30% en 93 et 94), elle avait fortement chuté à partir de 97 (en dessous de 20% lors de 4 scrutins) pour repasser à 25% en 2003, à 30% en 2004, pour redescendre à moins de 28% en 2007.

Comment analyser les raisons de cette hausse de la participation ?
Cette consultation intervient dans un moment très particulier, à la suite d’un congrès ancré « à gauche » et dans un contexte de très forte mobilisation sociale. On peut donc faire l’hypothèse d’une certaine mobilisation « naturelle » des syndiqués sur ses enjeux.
Mais comme pour toutes les consultations internes, c’est avant tout la mobilisation des équipes militantes des tendances qui est la principale cause de la hausse de la participation et c’est sans doute à ce niveau que le contexte a pesé tant pour nos équipes que pour les équipes UA.
22 départements ont connu une hausse de plus de 10% de participation. Les 15 premiers départements UA en nombre de voix ont eu 37,6% de votants en moyenne avec une hausse de participation de l’ordre de 7,5% (un seul, le 41 étant en baisse). Les 15 premiers départements EE en nombre de voix ont eu une participation de 43% en moyenne, en hausse de 9,4% (un seul, le 31, une baisse à 38,24%).
Nous avions plutôt une tradition de mobilisation plus conséquente qu’U&A dans les derniers scrutins (du moins « en moyenne nationale » car cela n’est pas valable partout). Là, pour des raisons politiques que nous avions annoncées avant le vote, U&A a mis le paquet : suivi national, relais dans les départements et lettre électronique.
On note une disparité importante dans la participation puisque 4 départements sont en dessous de 10% (04, 68, 973, 976) et 12 entre 10% et 20% (01, 30, 52, 57, 62, 67, 70, 73, 82, 84, 85, 91). De l’autre côté, 10 départements dépassent les 50% (03, 08, 19, 2A, 2B, 25, 33, 39, 43, 90), 14 se situent entre 40% et 50%.
Les départements où l’EE est forte (électoralement ou en nombre de militants) se situent en général au dessus de la moyenne nationale : 39 (64,11%), 90 (59,5%), 43 (58,78%), 33 (57,8%), 03 (57%), 08 (56,5%), 25 (53,7%), 24 (48,2%),17 (48,14%), 76 (47,15%), 81 (45,56%), 95 (45,5%), 34 (41,8%), 60 (40%), 13 (41,2%), 64 (38,9%), 77 (38,6%), 31 (38,24%), 71 (37,5%), 79 (35,14%), 75 (34,36%), 72 (35,5%), 47 (34,5%), 09 (31,37%), 94 (29,4%). Le 49 est à 29,10%, le 93 à 26,96%, le 52 à 18%, le 82 à 16,79%. Le 04 à 8,76% et la Guyane à 6,69% sont très en-dessous.
Pour revenir au profil des syndiqués qui ont participé, et savoir par exemple si ce ne sont que des retraités rompus aux joutes de tendances qui sont la cause de l’augmentation de la participation ou bien s’il y a un nouvel intérêt (sans avoir d’illusions sur sa hauteur…) chez les générations récentes de syndiqués, c’est au niveau départemental que les choses doivent s’apprécier finement à partir d’une étude de la liste électorale après pointages des votes. Tous les croisements (date de syndicalisation, localisation…) sont possibles pour ceux/celles qui ont accès à SNUPERS.

2) U&A en baisse de 2.25%

Avec10 587 voix, U&A progresse de 1340 voix (soit une progression de 14,5%). Par rapport à 2004, le gain est de 760 voix. Il est assez classique qu’une forte participation profite à la « majorité » nationale. Toutefois, en pourcentage, avec 66,75%, U&A recule de 2,25 point par rapport à 2007.
Ils font l’essentiel de leur progression en voix (77% du total) dans 15 départements seulement (06,13, 14, 2B, 33, 42, 56, 59, 74, 75, 76, 83, 93, 95, 974). Ils reculent en voix dans 28 départements et en pourcentage dans 56 départements avec notamment une baisse de plus de 10 points dans 17 départements (04, 08, 09, 10, 15, 16, 17, 21, 26, 38, 44, 48, 52, 71, 72, 79, 81) .
U&A s’est beaucoup investi dans ce scrutin. Leur campagne a été animée par l’ex SG, chaque membre de la direction devant « suivre » au minimum son département. UA a tenu plusieurs réunions nationales et mis en place une lettre électronique pour nourrir la campagne. Politiquement, l’enjeu pour eux était, de se « re-légitimer démocratiquement » après un congrès très critique où ils avaient été en difficulté et un changement de SG. Il s’agissait sans doute aussi de montrer qu’ils « contraient » l’EE et, pour les moins « ouverts » d’entre eux, partisans d’un fonctionnement majorité/minorité, de marquer leur emprise sur la direction du SNUipp en revenant implicitement sur le fonctionnement pluraliste du syndicat donnant, à leurs yeux, trop de place à l’EE. Le succès de cette orientation n’est pas au rendez vous. Il y a certes redressement du vote U&A en voix mais baisse en pourcentage et l’EE sort renforcée du scrutin !
Cette mobilisation des équipes militantes comme la forte augmentation de la participation a permis à U&A d’augmenter ses suffrages mais pas d’inverser une tendance globalement (hors 2007) à la baisse en % depuis 1998. Ils atteignent même leur plus bas niveau dans le SNUipp depuis sa création.

||Votes SNU |1995 |1998 |2001 |2004 | 2007 | 2010 | |

||% UA |67,3 |70,6 |68,1 |67,8 |69 |66.75 | |

||Voix UA |8148 |6893 |6993 | 9827 | 9233 | 10587 | |

Ils font plus de 80% dans 29 départements et sont à moins de 50% dans 23. La moitié de leurs voix proviennent de 30 départements qui sont pour la plupart leurs « bastions » ( 13, 93, 56, 95, 92, 77, 83, 06, 76, 41, 33, 07, 86, 74, 69, 22, 59, 26, 57, 29, 75, 38, 51, 66, 14, 94, 02, 49, 78, 42).

3) Ecole Emancipée : une hausse de 3.39%

L’EE fait 4203 voix soit 26.5% des exprimés. Elle progresse de 3,39 points par rapport à 2007. Elle est en progression de 1111 voix (gain de 35,9%) sur 2007 et de 889 voix sur 2004. Il est à noter que ces 1111 voix supplémentaires représentent 44,8% de la hausse totale de la participation (+ 2478).
Votes SNU 95 98 01 04 07 2010
%EE 15.5 20.8 23.1 22.9 23.11 26.5
Voix EE 1879 2035 2375 3314 3092 4203
En 2010, l’EE fait 11 points de plus qu’en 1995 et atteint son plus haut niveau dans le SNUipp depuis sa création. En voix, la progression est continue (sauf 2007) avec un doublement (+123%). Ces voix sont gagnées soit sur les syndiqués ne se prononçant pas jusque là, soit sur les voix U&A.
Nous faisons moins de 10% (seuil critique…) dans 18 départements et plus de 40% dans 22 départements. Nous avons plus de 20 voix dans 55 départements et la moitié de nos voix proviennent de seulement 16 départements.
D’où une implantation nationale trop inégale avec une logique de « points forts » de deux types : les départements où nous sommes en responsabilité ou co-responsabilité de la section (25, 60, 33, 31, 39, 64, 34, 17) et de gros départements dans lesquels d’ailleurs nous ne sommes pas majoritaires (77, 95, 69, 94, 13, 93).
Nous « gagnons » 5 départements (04, 50, 52, 72, 79) et sommes premiers dans 16 (04, 08, 17, 25, 31, 34, 39, 50, 52, 60, 64, 67, 72, 79, 90, 973) et premiers ex aequo dans deux autres (43, 81).

Nous perdons des voix dans 21 départements et reculons en pourcentage dans 29 départements par rapport à 2007. Nous avons moins de 10 voix dans 24 départements.

Au final, l’EE s’affirme plus que jamais comme la deuxième tendance incontournable du SNUipp. La mobilisation des équipes EE dans les départements et de l’équipe nationale ont permis une hausse en nombre de voix et en pourcentage sans précédent dans l’histoire du SNUipp. Nous pouvons montrer que nous savons mettre en oeuvre une orientation syndicale qui a la confiance des syndiqués. Les idées de l’EE s’incarnent dans une pratique syndicale au quotidien validée dans un nombre grandissant de sections départementales.
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Pour autant et malgré ce bon résultat, impossible de ne pas vouloir renforcer notre influence au plan national marquée aussi par de trop fortes disparités entre départements. Cela renvoie sans doute à plusieurs causes.
Tout d’abord, et malgré une amélioration indiscutable lors de ce scrutin, une expérience différenciée dans la prise en charge de ce type de vote notamment dans la recherche et la relance des votes. Indépendamment d’une réflexion politique de fond sur la portée des votes internes et la meilleure façon d’y peser sur notre orientation, il est utile pour l’avenir de s’inspirer et de mutualiser ce qui se fait dans certains départements en terme de « technique » électorale pour se donner les moyens d’être à la hauteur dans le maximum d’endroits.

Il faut aussi nous poser la question d’une apparition plus permanente de l’EE aux yeux des syndiqués du SNUipp qui ne peuvent pas être uniquement sollicités par nous tous les 3 ans à l’occasion d’un vote. Cela renvoie à l’existence de « bulletins de débats » où nous pouvons nous exprimer en direction de tout le monde. Force est de constater que de ce point de vue, les « gris » de débat, hors préparation de congrès, sont de moins en moins nombreux. A nous d’être plus à l’initiative et à l’offensive, notamment en Conseil national, sur les demandes de publication et les thèmes à traiter dans de tels bulletins. Le lettre du SNUipp, même si sa diffusion est cantonnée au cercle militant, doit également être réinvestie par la publication de contributions plus régulières
Nous devons aussi nous atteler (nous forcer même) à la sortie trimestrielle d’un 4 pages EE (de ce point de vue, le 4 pages spécial élections a été très bien apprécié) retraçant les points forts de nos positions du moment et ce, en direction des équipes militantes du SNUipp. L’amélioration de l’apparition de l’EE est également une problématique qui concerne les équipes départementales.

Au delà de tout cela, il faut absolument réfléchir aux conditions politiques de ce type de vote des syndiqués, comme à leur fonctionnalité.
L’articulation entre expression des tendances (accompagnée ou pas d’un vote des syndiqués) et construction de synthèses afin de déterminer largement les mandats du syndicat n’est pas chose facile. D’autant que ce vote intervient après les synthèses faites au congrès national. Personne n’a encore trouvé le point d’équilibre « parfait » et cela se reflète certainement dans l’investissement des syndiqués dans ce type de scrutin interne.
Rappelons-nous que nous sommes souvent un peu esseulés à porter le droit de tendances (qui n’est pas obligation de….), impliquant regroupement collectif sur orientation syndicale, comme mode important de constitution d’une direction syndicale, qu’elle soit départementale ou nationale…
De notre point de vue, ce qui justifie un vote d’orientation des syndiqués, c’est le fait que cela pousse au débat d’orientation affiché entre grandes conceptions en présence dans le syndicat, ce qui conduit à donner une légitimité aux orientations portées par les uns et les autres et donc, donne une base « politique » à la composition des directions syndicales. Et il est clair que ce type de vote, par la légitimité qu’il crée, donne un contenu différent aux synthèses réalisées…et donc aux mandats du syndicat.
Tenir sur ces questions de fond ne doit pas nous empêcher d’avancer dans notre réflexion sur la date du scrutin (avant/après le congrès), sur la nature des textes à soumettre (texte souvent trop « général » avec difficultés à mettre en avant les questions clefs de l’heure), mais aussi sur les éventuels « élargissements » à réaliser pour porter en commun des batailles importantes…

3) Emancipation

C’était leur troisième apparition dans un vote SNUIpp (hors vote FSU) puisque, rappelons-le, ils sont issus d’une scission de l’EE et votaient pour le même texte que nous en 2001.
Ils gagnent 160 voix et obtiennent 556 voix et 3,5%. Ils confortent leur place de troisième tendance du syndicat. Ils font 44 voix dans le 76 et dépassent 10% dans neuf départements .

2004 2007 2010

Voix 284 396 556
% 1,9 2,96 3,5

4) FU

Ils baissent légèrement avec un score de 2,03% (322 voix). Bons résultats dans le 34, le 76, le 13, le 54 et le 03.

2004 2007 2010

Voix 289 335 322

% 1.9 2.96 2.03

5) PRSI

C’est leur troisième dans un scrutin SNUipp (hors vote FSU). Ils font 193 voix et 1,22%. C’est en recul par rapport au vote de 2007 (325 voix et 2.43%). Ils ne confirment donc pas …
Bons résultats dans le 2B, le 13 et le 69.

2004 2007 2010

Voix 188 325 193

% 1.3 2.43 1.22