Retour sur le 1er mai – Claude Gautheron

Nous nous sommes fait voler notre 1er mai. Oui mais par Macron et Castaner.

Nous n’étions pas tous et toutes dans le défilé parisien du 1er mai mais tous et toutes nous avons vu des images, lu des témoignages et, je n’en doute pas, nous avons, tous et toutes, été effarées. Effarées par le déchaînement de violence auquel nous avons assisté mais aussi par le traitement qui a été fait de cette journée par le gouvernement.

De tous temps le pouvoir en place a été tenté par le recours à la fermeté, à la force ou à la violence face à des mouvements de contestation de sa politique qu’il était incapable de maîtriser et de faire taire. Mais il y a des décennies que nous n’avions pas assisté à un tel spectacle de haine et un tel déferlement de tirs d’armes qualifiées de guerre dans de nombreux pays et de gaz lacrymogènes. Les cortèges syndicaux n’ont pas été épargnés, voire ont été visés, et c’est un pas de plus franchi dans la logique d’affrontement avec la population et ses représentant-es que ce gouvernement a initié il y a plusieurs mois.

Et comme les fédérations syndicales d’Ile de France (je cite) « Nous ne sommes pas dupes de la stratégie dangereuse ordonnée par le gouvernement qui, au prétexte de lutter contre les « casseurs », établit dans les faits un climat de terreur, visant à disloquer les cortèges syndicaux et interdisant en réalité toute possibilité de manifester démocratiquement. »

Le second volet du scandale repose sur l’intervention de Castaner suite à ces événements, en particulier ceux qui se sont déroulés à la Pitié-Salpétrière. Et là on ne peut plus nier que nous sommes bien dans le mensonge d’état. Quand en 86, des affrontements déjà très violents avaient conduit à la mort de Malik Oussekine, le ministre délégué Devaquet avait immédiatement démissionné et son projet avait été retiré quelques jours après. Les policiers avaient été poursuivis et condamnés, le bataillon de voltigeurs de la police dissous. Trois décennies plus tard et à la veille du 1er mai 2019, le député LREM Jean-Michel Fauvergue déclare, interrogé sur les violences policières lors des manifestations, qu’ « il faut oublier l’affaire Malik Oussekine ». Ce gouvernement est droit dans ses bottes et assume sans état d’âme ses exactions. Rappelons-nous aussi qu’en 87, des instituteurs avaient envahi le sénat au cours d’une action contre le décret « Maîtres-directeurs ». Aujourd’hui, il y a fort à parier que cela leur vaudrait un tabassage en règle et quelques années de prison ferme pour mise en danger de la sûreté de l’état.

Dans le champ qui est le nôtre, la période est très inquiétante en ce qui concerne les rapports de force sociaux. Alors que nous sommes en présence d’un gouvernement qui détient tous les pouvoirs, politique, économique et médiatique (même des journalistes indépendants sont inquiétés) et qui bafoue en permanence ce qu’il est convenu d’appeler le dialogue social, il met au service de son idéologie les « forces de l’ordre » contre ce qui lui résiste, en l’occurrence le peuple et ses représentant-es. On sait le paritarisme en grand danger, si maintenant la possibilité de manifester nous est retirée, non pas par la loi (et encore…) mais par le danger qu’elle fait courir aux individus et la crainte qu’il provoque, quels seront nos moyens d’action et de pression pour faire respecter et avancer les droits des travailleurs ? Au risque d’employer des concepts qu’on voudrait faire passer pour éculés, c’est bien d’un rapport de classes qu’il s’agit. Les classes dominantes, les ultra-riches, sont en capacité de placer à la tête de l’état des serviteurs de leur cause sans scrupules pour utiliser les moyens de l’état à leur service.

Ne nous trompons pas d’ennemis. Ce ne sont pas les gilets jaunes ou les prétendus casseurs qui font le plus de dégâts. La violence est bien du côté de l’état et avant d’être policière, elle est sociale. Et la violence est aveu d’impuissance. Ils ont gazé Paris mais réjouissons-nous que dans de nombreuses villes, les cortèges étaient aux couleurs de l’arc en ciel. Celui de l’espoir d’une convergence plus forte que leurs gaz et leur LBD et que leurs intérêts d’ultra riches.

Des organisations syndicales ont dénoncé cette situation, la FSU doit le faire aussi. Faisons en sorte que ce CN du SNUipp-FSU porte cette exigence et son analyse de la situation au secrétariat de la FSU de demain. Une expression forte, comme elle l’avait été le 4 février dans le communiqué fédéral « Violences : trouver la voie de la désescalade » s’impose.

Et non, Messieurs Macron, Castaner et Fauvergue, nous n’oublierons pas Malik Oussekine.