Blandine Turki : Des retraites au 8 mars, la grève est l’outil de la lutte des femmes

Au 31 décembre 2019, 150 femmes étaient mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Le 23 novembre, à l’occasion de la journée internationale d’élimination des violences faites aux femmes, nous étions 150 000 manifestant-es à dénoncer toutes ces violences et revendiquer les moyens de les éradiquer.

Les mesures largement insuffisantes issues du Grenelle des violences conjugales seront-elles effectives en l’absence du budget nécessaire pour les mettre en œuvre ?Depuis le 1er janvier, le décompte morbide des féminicides a repris avec déjà 5 victimes en moins de 15 jours.
Dans un contexte d’inégalités encore importantes entre les femmes et les hommes, le gouvernement communique beaucoup sur l’aspect égalitaire de sa réforme des retraites. L’exemple le plus courant qu’il brandit est celui le minimum de pension de 1000€ par mois qui devraient bénéficier à davantage de femmes, en omettant de préciser que celui-ci vaut pour une carrière complète sinon il sera proratisé. Or 40% des femmes ont une carrière incomplète (20% d’hommes, Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques 2019). Une lecture attentive du projet montre que les femmes seront bien les grandes perdantes de cette réforme.

Quelques exemples …

Premier exemple, modalités de calcul du montant de la pension
Actuellement, les pensions des femmes sont inférieures à 42% à celles des hommes et les différences de salaire atteignent 25%. Dans un régime de retraite par points la pension perçue reflètera la somme des cotisations versées tout au long de la vie active. Dans cette logique d’individualisation, les plus mauvaises années seront intégrées (temps partiel, congés parentaux, chômage, bas salaire…) et feront diminuer mécaniquement le montant de la pension des femmes.

Deuxième exemple, les droits familiaux
Dans un système par points, la référence au nombre de trimestres cotisés disparait et avec elle la possibilité de valider des trimestres supplémentaires pour chaque enfant. La majoration de la pension prévue par la réforme de 5% par enfant pourrait être en défaveur des femmes puisqu’elle ne bénéficiera qu’à l’un ou à l’autre des parents. Alors que dans le couple, c’est souvent l’homme qui gagne le plus, le bénéficie de cette majoration se fera certainement au profit du père et au détriment de la mère.

Troisième exemple, la prise en compte des primes
Dans fonction publique, outre le fait qu’il existe des écarts importants entre les professions, l’attribution de celles-ci est souvent moins favorable aux femmes. Dans une profession majoritairement féminisée chez les PE, qui ne touchent 8 % de primes en moyenne, cela représentera peanuts.

La France est un des pays européens où le taux d’activité des femmes est assez élevé (2016, 67% contre 75% pour les hommes). Néanmoins, elles occupent souvent des emplois moins qualifiés et moins bien rémunérés. Augmenter les salaires des femmes permettrait un gain de 6 milliards pour le financement du système de retraites.

Dans le cadre de la mobilisation contre la réforme de retraite par points, le SNUipp avec la FSU doivent rendre visibles les discriminations dont les femmes sont victimes et mettre en avant leurs revendications en proposant dans les intersyndicales des carrés de tête de manifestation composés uniquement de femmes. A l’instar des cortèges professionnels, les cortèges de femmes ont toute leur légitimité dans les manifestations car elles sont une fraction non négligeable du salariat qui sera encore plus percutée par cette réforme. Dans ce contexte, la construction d’une grève féministe est incontournable. Le SNUipp, avec la FSU, doit participer activement aux cadres unitaires nationalement et localement qui s’attèlent à construire la grève féministe du 8 mars prochain. Parce les luttes des femmes nourrissent les luttes globales, faisons-en sorte de les faire vivre résolument.

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