La baisse continue du niveau des pensions n’est pas inéluctable

Nous nous sommes mobilisé.es contre la réforme systémique à points et nous nous mobilisons contre tout recul de l’âge d’ouverture des droits à pension. Pour autant, le statu quo n’est pas possible tant les contre-réformes passées dégradent déjà, et vont encore dégrader, les conditions de départ à la retraite. Le dernier rapport du conseil d’orientation des retraites ( COR) montre les conséquences des régressions, notamment sur le taux de remplacement et le niveau des pensions.

Une dégradation déjà engagée
La désindexation des pensions, la non-revalorisation ou la revalorisation à un niveau inférieur à celui de l’inflation ont, année après année, comme conséquence une baisse du pouvoir d’achat des retraité·es.
Si on regarde l’indicateur « niveau de vie »(1), le COR prévoit que celui des retraité·es sera en baisse par rapport à celui de l’ensemble de la population alors qu’il est actuellement légèrement supérieur.
Si on regarde le taux de remplacement (ce que représente la première pension par rapport au dernier salaire/traitement), on observe une baisse continue au fil des générations. Il a perdu, en moyenne, 5 points entre les générations 1938 et 1948. Il est, pour la génération 1950, de quasiment 75 %. Et il va continuer de baisser en raison principalement de l’augmentation de la durée d’assurance qui est de moins en moins réalisable.

Mettre fin aux régressions
L’instauration de notre système de retraite a constitué une avancée majeure, permettant aux retraité·es d’améliorer leur niveau de vie. Il est nécessaire aujourd’hui de prendre des mesures pour garantir à toutes et tous une pension digne.

Cela passe par le retour sur les précédentes mesures d’allongement de la durée d’assurance et de recul de l’âge d’ouverture des droits, par le rétablissement des droits liés aux enfants, par la suppression de la décote.
Il faut aussi rétablir l’indexation des pensions sur les salaires et généraliser des dispositifs d’aménagement des fins de carrières à l’image de ce que la cessation progressive d’activité (CPA) a pu être.
La situation des polypensionné·es doit aussi être améliorée en permettant à celles et ceux qui ont cotisé à plusieurs régimes de retraites de bénéficier d’une liquidation dans un seul régime reprenant l’ensemble des droits ouverts dans les autres.

Financer des améliorations, c’est possible !
La question des retraites, parce qu’elle interroge notre rapport au travail, qu’elle a des conséquences sur le niveau de protection que l’on permet à chacun·e de nous après la vie active, parce qu’elle est la traduction concrète, avec les salaires, du partage des richesses produites entre capital et travail… est un choix de société essentiel.
L’allongement de la durée d’assurance et le recul de l’âge d’ouverture des droits ne sont pas les seuls leviers que l’on peut actionner pour garantir le fonctionnement et financer les améliorations du système. Augmenter les salaires et obtenir une égalité salariale entre les femmes et les hommes permettrait d’accroître les cotisations et donc les ressources des caisses de retraite. Baisser le nombre de chômeurs et chômeuses et augmenter le taux d’activité des femmes également. Sans oublier la hausse du taux de cotisations et la suppression des exonérations de cotisations patronales.
Augmenter la part des richesses produites consacrée au financement des retraites est bien une affaire de choix politique. C’est à la fois facilement envisageable et totalement indispensable pour poser les bases d’une société plus égalitaire et féministe. ●
Émilie Moreau

1) Définition du niveau de vie. Le niveau de vie d’un ménage est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation. Le revenu disponible comprend les revenus d’activité nets des cotisations sociales, les revenus du patrimoine, les transferts en provenance d’autres ménages et les prestations sociales (dont les pensions de retraite), nets des impôts directs. Le système d’unités de consommation habituellement utilisé correspond à l’échelle d’équivalence de l’OCDE qui compte : 1 part pour le premier adulte du ménage, 0,5 part pour chacune des autres personnes âgées de 14 ans et plus, 0,3 part pour chaque enfant âgé de moins de 14 ans.