Au Parlement Européen, en décembre, droite et extrêmes-droites se sont mobilisées pour repousser le rapport Estrela (députée portugaise) sur la santé et les droits sexuels et génésiques : non contraignant, il promeut l’accès à la contraception et à l’avortement, et à l’éducation sexuelle, dans tous les pays de l’Union, et souligne aussi que ces dispositifs pâtissent actuellement d’une crise économique qui sert d’alibi pour les réductions de moyens.
Le rapport défend « une sexualité responsable, satisfaisante et sûre ainsi que la liberté pour les personnes de choisir d’avoir des enfants si elles le souhaitent et quand elles désirent ».
Cette mobilisation réactionnaire s’est faite au motif que l’Europe ne devrait se substituer ni aux Etats, ni aux familles.
Pointons, parmi les député-es français-es ayant voté contre ce rapport : de Villiers (MPF), Gollnisch (FN), Le Pen Jean-Marie (FN), Le Pen Marine (FN), Dati (UMP), Hortefeux (UMP), pour ne citer que les plus célèbres… Ce jour-là, les Le Pen étaient donc là tous les deux, alors que d’ordinaire ils figurent parmi les dix député-es les moins présents et actifs au Parlement européen !
Pire, l’initiative citoyenne « Un de nous » qui réclame le droit à la « protection de chaque vie humaine dès la conception » a recueilli (au moins) 1,9 million de signatures en Europe (dont 107 000 en France).
Il y a derrière cette formule la reconnaissance du statut de l’embryon, et donc l’interdiction de l’avortement. Une proposition législative en ce sens sera présentée devant la Commission et le Parlement européens après les élections.
En France, ce retour de l’ordre moral se traduit par les manifestations de l’extrême-droite (trois dimanches de suite début 2014 !) pour s’opposer à la prétendue « familiphobie » du gouvernement Hollande.
Sont visés : l’ouverture du mariage à tous les couples, l’avortement, la loi égalité femmes-hommes et notamment le partage du congé parental, mais aussi l’expérimentation ABCD égalité, initiative conjointe des ministères Droits des Femmes et Éducation nationale visant à lutter contre les stéréotypes de genre à l’école primaire.
Les réactionnaires profitent de la crise pour renvoyer les femmes à leur rôle de mère et à leur foyer, qui serait leur mission « naturelle ». Ce qui unit ces différents mouvements, depuis « La Manif pour Tous » jusqu’à « Égalité et Réconciliation » (et son Jour de Retrait de l’École), c’est un essentialisme profondément ancré, la croyance en la complémentarité des sexes qui leur sert à légitimer les inégalités entre les femmes et les hommes, ainsi que les LGBTphobies.
Devant toutes ces attaques, il est grand temps de repasser à l’offensive et de réaffirmer haut et fort que le droit à disposer de son corps et la déconstruction du carcan des stéréotypes s’inscrivent nécessairement dans la logique d’émancipation des individu-es. ●
Cécile Ropiteaux