Islamophobie : dénoncer et combattre

Intervention d’Antoine Chauvel (École Émancipée) dans le débat général


Le meurtre de Grande Combe confirme de façon dramatique la montée de l’islamophobie en France. Mais aussi que des digues politiques continuent de rompre.

Ce crime est la conséquence directe d’une libération de la parole raciste qui facilite, dans un continuum abject, des passages à l’acte toujours plus graves

L’islamophobie, devenue une expression majeure du racisme en France, est la résultante d’un lent processus d’altérisation et de racialisation des musulmanes et musulmans, processus qui s’inscrit à la fois dans un contexte post-colonial et de théorisation d’un prétendu « choc des civilisations ». Désormais ils et elles incarnent les ennemi·es intérieur·es, remettant en cause modes de vie, racines et traditions fantasmées.

C’est la « panique identitaire », savamment et puissamment orchestrée politiquement et médiatiquement. 

En faisant le choix d’une réaction très tardive, de ne pas se déplacer sur les lieux du crime, de ne pas rencontrer la famille de la victime et de nommer, contrairement au ministère public, la dimension islamophobe du crime, Retailleau, un des plus hauts personnages de l’État, acte un traitement différencié, des citoyen·nes en fonction de leur religion.

Engagé dans une course à la présidence de LR dans un contexte de potentielle union des droites, il confirme que cette fusion des réactionnaires se fera sur la base des discriminations dont la xénophobie et l’islamophobie soudent, selon le chercheur Félicien Faury, le vote transclasse en faveur du RN. La question d’exiger la démission du Ministre de l’intérieur doit être posée.

Le racisme ne fait pas qu’occulter la question sociale et diviser notre camp social.

S’il s’articule avec les questions de classe et de genre, il a aussi des dynamiques propres qui doivent être traitées comme telle par le mouvement syndical notamment au vu du poids que confère la période à cette question raciale.

 La campagne intersyndicale contre le racisme sur les lieux de travail doit s’amplifier, en intégrant toutes les dimensions du racisme. Les secteurs fédéraux concernés doivent être associés pour que toutes les énergies disponibles soient utilisées à leur juste valeur et permettre ainsi à la FSU d’en être une force motrice.

 Mais la question des résistances dépasse cette campagne nécessaire. Elle oblige à construire des cadres larges avec l’ensemble du mouvement social sans exclusive aucune. Construire des cadres de luttes spécifiques à ces questions, qui rassemblent largement et en allié·es des premier et premières concernées.

 Face à l’islamophobie, mener notre travail syndical et notre travail de force progressiste est un impératif qui s’avère désormais vital.