Débat général – Faire face à la nouvelle internationale des autoritarismes

Grégory Bekhtari (École Émancipée)


Le choc libertarien qu’inflige l’administration Trump à la société états-unienne est sans précédent. Les attaques massives contre l’Etat fédéral (plus de 50 000 licenciements), la déréglementation environnementale, la répression des étudiant·es… 

Une internationale des autoritarismes se dessine, qui sape l’ordre international et les institutions multilatérales. Trump  a été jusqu’à prononcer des sanctions contre Karim Khan le procureur de la CPI  tandis qu’il renforce le soutien américain au gouvernement suprémaciste israélien. Il encourage la reprise du génocide à Gaza par l’armée israélienne, y promeut un plan de nettoyage ethnique, et laisse l’annexion de la Cisjordanie s’accélérer sous couvert de colonisation. Notre syndicalisme doit peser pour une paix juste et durable, impliquant un cessez le feu permanent, la libération de tout-es les prisonnier-es et otages, et une solution politique respectueuse du droit à l’autodétermination et de la souveraineté des Palestinien·nes – au même titre que les Ukrainien·nes- et de l’égalité des droits. Face aux violations du droit international par Israël en Syrie, au Liban, l’exigence de sanctions est essentielle.

L’effacement du peuple palestinien constitue un marqueur politique pour l’extrême droite à travers le monde : de Milei à Bardella et Marion maréchal, en passant par Vox et les « démocrates » de Suède, elle se presse auprès Netanyahu, après qu’en Europe, elle a reçu l’adoubement de JD Vance. Derrière l’oppression des peuples, c’est aussi une bataille pour la démocratie qui se joue, comme en atteste encore le rapprochement Trump- Erdogan en cours au moment où celui-ci achève le processus de basculement de la Turquie dans l’autocratie. 

L’autre marqueur politique clé est l’attitude vis-à-vis de l’Ukraine. La volte face de Trump à l’ONU, où les Etats-Unis ont refusé de dénoncer agression et ambition impérialistes de la Russie constitue un tournant et un contrepoint à ses  discours annexionnistes à propos du Canada, du Groenland et de Panama. Ce basculement place les démocratie libérales et particulièrement l’Union européenne dans une situation nouvelle.  Tandis que l’extrême droite poursuit son travail de sape, avec l’appui des broligarques de la tech convertis au libertarianisme, la question de la protection vis à vis des ambitions russes à l’Est est posée. 

Elle soulève des défis politiques, économiques, et sociaux inédits. Les néolibéraux tentent d’exploiter ce contexte pour imposer l’austérité au nom d’une « unité nationale ».  Il n’y a pas plus de politique sociale viable sous le néolibéralisme que sous la botte d’un tyran autoritaire. 

Le renforcement du soutien à la résistance ukrainienne et des moyens dédiés à la dissuasion militaire sont des questions que nous devons prendre au sérieux, mais pas en cédant aux sirènes d’une « économie de guerre », qui historiquement signifie sacrifices de la population, accroissement du rendement au travail et mise sous le boisseau des revendications syndicales jusqu’à la victoire militaire. D’autant plus que l’UE a largement la capacité militaire actuelle pour soutenir la défense territoriale de l’Ukraine ( la dépense militaire des pays de l’Otan membres de l’UE est déjà 3,5 X supérieure à celle de la Russie). 

Au contraire, notre camp social doit inventer des voies audacieuses pour poser la question du contrôle démocratique et de l’appropriation publique des industries d’armement, dont les dividendes explosent, et en particulier du fléchage de la production en lien avec la défense ukrainienne. Ainsi poser la question de la sécurité européenne n’a pas à se faire dans les termes de Trump qui exige une augmentation des dépenses militaires à 5 % du PIB. Les grands investissements dont l’Union européenne a besoin sont en particulier dans son autonomie énergétique et numérique. Tenir tous les bouts nécessite en parallèle de résister à la militarisation de la jeunesse et d’ouvrir une autre voie par la lutte sociale et la construction sur cette question d’analyses partagées avec les autres organisations du mouvement social et syndical.