Il existe une écologie fasciste basée sur la protection de l’environnement par l’exclusion des étranger.es. Il est essentiel de le prendre en compte dans l’élaboration d’une écologie radicale et progressiste.
0n parle d’écofascisme pour caractériser deux phénomènes distincts. D’une part, pour faire référence à la tendance dans le fascisme historique et notamment le national-socialisme à intégrer une vision de l’écologie historiquement liée à l’idée d’enracinement : « Le mot d’ordre nazi “le sang et le sol“ visait ainsi à définir la communauté politique racialement homogène (le sang) comme celle qui s’était développée sur un territoire délimité par des frontières naturelles (le sol). »(1) D’un autre côté, le concept « d’écofascisme » est utilisé par des mouvements de gauche afin de critiquer les formes d’autoritarisme et de technocratisme mobilisées dans certaines politiques de défense des écosystèmes. La première acception du concept permet de montrer qu’une écologie fasciste est possible. Celle-ci repose sur l’accent mis sur la protection de l’environnement, la souveraineté nationale et la préservation des traditions culturelles.
L’écologie fasciste est tout d’abord liée à l’idée d’enracinement afin de garantir l’homogénéité de la communauté sur un territoire délimité. Ainsi l’extrême droite peut développer une rhétorique qui associe la protection de l’environnement à la préservation de l’identité nationale et culturelle. Elle insiste sur la nécessité de protéger les ressources naturelles du pays contre ce qu’elle perçoit comme des menaces extérieures, telles que l’immigration et la mondialisation. L’immigration est mobilisée comme une menace pour l’environnement, en arguant que l’augmentation de la population due à l’immigration accroît la pression sur les ressources naturelles et aggrave les problèmes environnementaux tels que la pollution et la déforestation. Il en va ainsi du penseur d’extrême droite Hervé Juvin, auteur de plusieurs ouvrages dont La grande séparation : pour une écologie des civilisations. Dans ce livre, il appelait par exemple à « défendre son biotope contre les espèces invasives », humaines et non humaines, et à renforcer les frontières qui permettent de préserver la biodiversité et la différence des cultures.
De la « grande séparation » au « grand remplacement »
Cet héritage de l’enracinement est renouvelé dans la théorie du « grand remplacement ». « Pour de nombreux courants néofascistes, la préservation des écosystèmes devient le fondement d’une redéfinition identitaire de la communauté à partir d’une appartenance raciale à la terre. En cela, l’écologie joue bien un rôle déterminant dans la reconfiguration des pensées réactionnaires contemporaines.(2) » Analyser la rationalité d’une écologie fasciste est essentielle pour construire une écologie politique radicale. Il existe dans les courants écologistes des velléités néomalthusiennes de contrôle des populations (par les frontières et la natalité). Ces positions peuvent faire écho à « l’idée d’une pureté ethno-raciale de la communauté politique, qui est au fondement même de la pensée fasciste ». Prendre au sérieux la question impose aux écologistes progressistes d’inclure l’antifascisme dans leurs priorités stratégiques en intégrant notamment les rapports de genre et de race à leur grille d’analyse. Et aussi de participer à « la lutte contre les politiques migratoires, coloniales et racistes » pour construire une politique qui reconnaît « la multiplicité des manières d’habiter le monde ; à commencer par la défense de la liberté de circulation pour tou·tes.(3) » ■
Julien Rivoire
1. Paul Guillibert, « La racine et la communauté. Critique
de l’écofascisme contemporain », Mouvements, vol. 104, no. 4, 2020, pp. 84-95.
2. Ibid.
3. Ibid.
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