Dans le cadre de la mobilisation de la profession autour de notre campagne, et des communications suite aux prises de parole de la nouvelle ministre qui portent atteinte à l’école publique, il nous revient de d’affirmer que la question du sens politique des mesures éducatives prises par le gouvernement, de leurs caractères profondément inégalitaires n’est pas une affaire connexe, mais doit être un élément central.
Par son discours ministérielle et le dédain qui porte à un paroxysme inacceptable une politique éducative de caste assumée, une école de l’entre soi dont la justification était déjà la matrice de Blanquer puis Attal. Celui ci avant son départ pour Matignon, Gabriel Attal a explicitement verbalisé ce qui faisait la matrice jusqu’à ce jour non assumée des politiques éducatives menées. S’adressant d’abord, je cite, aux « Français des classes moyennes [qui] financent par leur travail le fonctionnement de nos services publics » dont les enfants seraient, encore un mensonge, « empêchés de s’envoler », il renonce explicitement à l’élévation générale du niveau scolaire et à la démocratisation de la réussite scolaire: « Le taux de réussite au brevet et sans doute au bac diminuera dans les années à venir. J’en ai conscience et je l’assume. », dit-il.
Le train des réformes issues de la mission exigences des savoirs vise au parachèvement d’une école du tri social. Rompant avec les consensus scientifiques pour marteler des mesures marquées idéologiquement à droit ::il promeut les redoublements, les groupes de niveau dès le début du collège centrés, comme au primaire, sur les prétendus fondamentaux, ségréguant davantage les acquis scolaires comme les individus, le lycée modulaire, les attaques sur la voie professionnelle, et parcoursup, ou le maintien de l’évitement scolaire permis par le privé. Le tout au bénéfice des enfants des plus riches, jusqu’à ceux de notre nouvelle ministre.
En transformant en profondeur l’entièreté des programmes à commencer par ceux de mathématiques et de français dès la rentrée 2024 de la petite section au CE2, en labellisant les manuels et en généralisant les évaluations nationales standardisées à toutes les classes du CP à la seconde, c’est au renforcement de la mise sous tutelle du métier d’enseignant·e au profit de cette école inégalitaire qu’il s’emploie.
La conscience de l’ambition inégalitaire des politiques éducatives menées n’est peut-être pas majoritaire dans la profession. Néanmoins, aucun·e enseignant·e ne fait son métier dans l’objectif de perpétuer et renforcer les inégalités. Cette contradiction permanente entre le métier tel qu’on voudrait le faire, et le métier tel qu’on nous impose de le faire est une violence au travail que le psychologue du travail Yves Clôt nous invite à traiter syndicalement. Les restrictions apportées à la liberté pédagogique, la perte d’ d’autonomie à penser, conceptualiser les pratiques pour enseigner à toutes et tous participent de la mise à mal des conditions de travail. D’autant plus que ces restrictions conduisent à l’exacerbation des inégalités et au renoncement, qui est un aveu d’échec à l’élévation du niveau scolaire et à l’émancipation de l’ensemble des élèves, en particulier des enfants des classes populaires. L’explicitation de ce conflit entre le sens du métier porté par les personnels et celui voulu par les ministères successifs est essentiel à notre campagne car elle permet de mettre des mots sur la violence au travail qu’elle engendre.
La deuxième raison de traiter le sens politique des mesures Attal réside dans la nécessité de construire l’adhésion des usagères et des usagers de l’école à nos revendications. Cette école de classe, cette école qui classe, qu’incarne jusqu’à la nausée la nouvelle ministre de l’Éducation Nationale est à l’exact rebours des intérêts de la majorité de nos élèves et de leurs parents.
Chaque enseignante et enseignant, chaque parent d’élève, chaque élu·e doit avoir conscience qu’une école égalitaire passe par une augmentation des moyens permettant une baisse des effectifs mais qu’elle doit aussi s’accompagner d’une formation enseignante à haute résonance professionnelle à même de donner jour à une conception du métier retrouvée, à des pratiques enseignantes dans le cadre d’une vraie liberté pédagogique, gages de l’émancipation des individus quelque soit leur classe sociale.
Consciente que les enseignant·es ne gagneront pas seul·es y compris sur les questions éducatives la FSU-SNUIPP doit oeuvrer à obtenir le soutien des usagères et usagers. Dans le prolongement de la démarche intersyndicale d’abandon des évaluations nationales, il est nécessaire de mettre au cœur de notre campagne, de nos communications avec les associations de parents d’élèves la dénonciation de l’école du tri social et porter une école publique pour la démocratisation et l’émancipation.