Faire du metier, un sujet de débat

 
Certes, le 10 septembre, la mobilisation n’a pas répondu à nos espérances, ni aux enjeux. Elle a certainement pâti du report d’une partie des réformes du choc des savoirs (programmes de cycle 1 et 2, labellisation…) et de l’instabilité institutionnelle. A qui adresser nos revendications sans ministre ? Rappelons aussi qu’une grève nationale à cette date est inédite et qu’elle a finalement été annoncée tardivement, bousculée par l’actualité politique.

Pour autant est-elle synonyme d’échec ? Pas nécessairement.

Au-delà de sa légitimité, au moment de la généralisation des évaluations nationales, elle nous a résolument positionnés dans une dynamique de résistances.  Notre communication, des articles et tribunes dans la presse, des discussions de salle des maîtresses ont popularisé nos analyses. Des questions intrinsèques au métier ont ainsi fait événement.

Cette effervescence peut être considérée comme un acquis dans un combat idéologique qui ne pourra se construire qu’au long court, avec labeur, au fil d’actions diverses dont cette séquence fait pleinement partie.  

Depuis Blanquer, les attaques contre l’école et ses personnels se radicalisent, opposant deux conceptions du service public d’éducation. D’un côté, une école fondée sur une professionnalité renforcée, visant à lutter contre les inégalités et à former des citoyen.nes capables de comprendre et d’agir sur le monde. En face, des politiques éducatives qui visent l’assujettissement du métier et augmentent la ségrégation des savoirs et des élèves. La réflexivité professionnelle en est fragilisée, les valeurs communes sont altérées et les multiples contraintes et contrôles des personnels abîment les possibles de contestations et de désobéissances.

Mais l’acceptation d’une forme de subordination et l’intégration des déterminismes sociaux ne sont pas un fait immuable. La forte mobilisation inattendue contre le choc des savoirs dans le second degré nous le rappelle.

Il y a quelques années, ici même, Yves Clot, nous enjoignait à prendre à bras le corps les questions de métier. Il nous rappelait à quel point la non-prise en charge de cette question était un des facteurs les plus explicatifs de la souffrance au travail. Aussi, renoncer à traiter la dimension politique de l’école mettrait de côté une dimension essentielle du mal-être au travail. Celle liée à la notion de « travail bien fait ».  Lequel ? Pour qui ? Pour quoi ?

Pas question d’opposer ce combat au détriment des revendications salariales ou des conditions de travail, mais ne pas mener cette bataille sur le métier laisserait les collègues seul.es face aux pratiques imposées.

Porter l’espoir d’une autre école est également une donnée incontournable pour faire alliance avec les familles et placer l’école au cœur du débat de société.

Aussi, la grève du 1er octobre doit nous amener à faire campagne, liant la défense des personnels et celle du service public d’éducation.

Nos campagnes « faire front pour l’école », notre travail avec le collectif Riposte, nos UDA, nos publications (dont FSC qui fête son 500ème) doivent continuer à lier l’abandon du choc des savoirs et pour un choc des moyens.

Une double exigence à même de redonner une dignité aux personnels. A même de permettre une école inclusive cessant de culpabiliser ou mettre en souffrance. A même de lutter contre les inégalités scolaires. A même de rêver et de construire une autre école, un autre monde.