Insuffisants HLM

Depuis plusieurs années, la politique du gouvernement ne permet pas l’investissement dans le logement social. Dans le même temps, le nombre de municipalités ne respectant pas le taux prévu par la loi ne cesse d’augmenter.

Depuis 2017, le logement social, levier pourtant indispensable pour permettre à l’ensemble de la population de se loger convenablement, est très loin d’être la priorité. Symbole de l’injustice fiscale et sociale du premier quinquennat, la baisse des aides personnelles au logement (APL) a entraîné, via un mécanisme de compensation pour les locataires, une baisse des loyers perçus par les organismes HLM, qui ampute leurs ressources de 1,3 milliard d’euros chaque année depuis 2018 et diminue donc leur capacité à étendre leur parc immobilier. Les besoins de construction sont pourtant immenses, avec 2,6 millions de ménages sur une liste d’attente qui s’allonge, elle n’était « que » de 2 millions en 2017… Conséquence, le nombre de nouveaux logements sociaux financés diminue chaque année, passant sous la barre des 100 000 depuis quatre ans, alors qu’il était de 124 000 en 2016. Si rien ne change, la Caisse des dépôts se projette à terme sur un horizon de 66 000 logements annuels.

Cette insuffisance du parc se traduit par des manquements de plus en plus importants aux objectifs de la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU) d’un minimum de logements sociaux dans l’habitat, symbole de la volonté d’une mixité sociale. Le pourcentage de communes ne les respectant pas est ainsi passé de 47 à 64 % en trois ans. Et globalement, la production de HLM dans les communes concernées atteint à peine les deux tiers prévus par la loi. En plus du désengagement financier de l’État, les communes ont une large responsabilité dans cette défaillance, certaines faisant preuve d’une « mauvaise volonté » plus que manifeste. Nice en est la caricature avec un objectif de construction réalisé à seulement 13 %, ouvrant ainsi grande la porte aux marchands de sommeil et aux recours forcés aux logements insalubres… L’État est néanmoins doublement responsable avec la grande mansuétude des préfet.es envers ces communes dans l’illégalité, très loin d’être toutes systématiquement sanctionnées.

Séparatisme social

Loin de remédier à cette situation catastrophique et à ses conséquences sur la vie de la population en attente de logement social, composée de toujours davantage de ménages sous le seuil de pauvreté, avec des familles monoparentales ou né·es à l’étranger, le gouvernement s’en satisfait et entend au contraire détricoter la loi SRU. Il envisage ainsi d’englober le logement intermédiaire, largement accessible aux classes moyennes supérieures, dans le logement social. Or, le plafond pour en bénéficier peut s’avérer très élevé, il atteint ainsi 7 500 euros mensuels pour un couple avec deux enfants à Lille ou à Lyon, tandis que, de l’autre côté, seulement 3 % seulement des ménages actuellement en attente de logement social pourraient accéder à ces logements intermédiaires, compte tenu de leurs ressources insuffisantes.

Ce maquillage grossier des insuffisances de la politique du logement permettrait aux communes de contourner en toute légalité leurs obligations de construction et mettrait à mal à la fois le concept et les objectifs du logement social et l’ensemble des personnes attendant, parfois très longuement, d’y accéder. Une telle réforme serait également un énième symbole du séparatisme social privilégié par le pouvoir.

Arnaud Malaisé