Pour un Snes-FSU tourné vers la transformation sociale

Les interventions de l’École émancipée au congrès de La Rochelle au mois de mars visaient à faire du Snes-FSU un outil pour les luttes et la transformation sociale.

Le contexte très préoccupant, mais aussi la volonté de rupture qui s’exprime dans la société, imposaient de faire de ce congrès du Snes-FSU, qui s’est tenu du 18 au 22 mars 2024 à La Rochelle, un point d’appui pour le positionner toujours plus résolument dans le camp de la lutte et de la transformation sociale, et amplifier la dynamique de mobilisation dans son secteur.

C’est en tout cas ce qu’a porté l’École émancipée (ÉÉ) dans son intervention d’ouverture. Atteindre cet objectif était d’autant plus incertain que ce congrès se tenait sans thème 3 traitant des alternatives et des droits et libertés (dilués en partie dans les thèmes restants), sur fond de divergences au sein d’Unité et Action (UA), et alors que la stratégie du Snes-FSU pour les suites de la mobilisation dans l’Éducation ne se dessinait pas lisiblement. L’intervention liminaire de Sophie Vénétitay, secrétaire générale, ovationnée, a toutefois donné le ton quant aux rapports de force internes à UA dans le cadre de ce congrès.

Thème A : « Pour un second degré démocratisant et émancipateur »

Le texte a été globalement consolidé. Des sujets sensibles ont été débattus, comme la nationalisation des établissements privés sous contrat et la laïcité. Les enjeux des cartes scolaires ont été soulevés, pointant les ségrégations sociales persistantes, notamment la compétition avec le privé, les difficultés des établissements en éducation prioritaire, et les défis liés à la ruralité. Des propositions ont émergé, dont l’idée d’une seconde avec une culture commune, moins débattue que les trois voies du lycée ou la suppression des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). Un projet de grille horaire en collège a également suscité réflexion. Des revendications ont été exprimées, incluant le retrait du « choc des savoirs » comme outil de tri social, la fin du lycée Blanquer et de Parcoursup. Des sujets comme l’accès à la seconde sous condition du brevet ont été discutés, tout comme le programme d’éducation à la vie affective et sexuelle. La lutte contre les discriminations LGBTQIA+ a été également mise en avant, reflétant l’engagement de l’ÉÉ pour une école inclusive et égalitaire.

Thème B : « Pour des personnels respectés et revalorisés et un service public renforcé »

Quelques avancées sont à mettre à l’actif de l’opiniâtreté des congressistes. Un mandat d’étude promet une réflexion sur la place des chef·fes d’établissement dans les CA et sur la création d’espaces entre pair·es pour reprendre la main sur le métier. Le débat, vif, sur le statut des assistant·es d’éducation débouche sur un nouveau mandat d’étude, ainsi que sur l’exigence de garanties pour favoriser leur CDIsation. Le Snes-FSU revendique des obligations réglementaires de service (ORS) de 24 heures pour les accompagnant·es des élèves en situation de handicap (AESH). Pour les enseignant·es non-titulaires, le Snes-FSU revendique un accès facilité au CDI, de meilleures conditions de rémunération et d’affectation, ainsi qu’un plan pluriannuel contingenté de titularisation, à défaut de l’arrêt immédiat de la précarité. Pour les enseignant·es titulaires, le Snes-FSU revendique un temps de service devant élèves de 14 heures. La défense des services publics contre le néolibéralisme est une priorité, mais le lien entre celui-ci et les méfaits du new public management n’est pas analysé. Les conceptions élitistes du métier restent structurantes : recrutement après le master, défense arc-boutée des CPGE ou de la classe exceptionnelle… Cette vision aboutit à une réflexion lacunaire, voire à des contradictions : nos mandats ne mentionnent pas les mobilisations pour obtenir des augmentations de salaire, ni la lutte contre le patriarcat pour faire avancer l’égalité salariale femmes / hommes. Ils ne questionnent pas les contenus actuels de la formation initiale, et le dispositif précaire AED-prépro y est présenté comme une forme de prérecrutement.

Thème C : « Notre syndicalisme de luttes et de transformation sociale »

Le texte a pu évoluer sur de nombreux sujets. La nécessité d’avancer sur la construction d’un nouvel outil syndical avec la CGT et Solidaires est réaffirmée, d’autant plus face à la montée de l’extrême droite. Des pistes concrètes de travail commun ont été formulées. La politique de syndicalisation du Snes-FSU prend désormais en compte les luttes à construire avec les personnels comme portes d’entrée dans le syndicalisme. L’activité du secteur international doit mieux irriguer la réflexion et l’action du Snes-FSU, comme celle du groupe écologie. Le congrès a acté la création d’un secteur égalité femmes / hommes à part entière, ainsi que celle d’un groupe de travail pour améliorer le traitement des violences sexuelles et sexistes (VSS) au sein du Snes-FSU. Il dénonce désormais clairement les violences policières, et semble s’outiller pour défendre les droits des personnes LGBTQIA+. La communication du syndicat ne passera plus forcément par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et œuvrera à une meilleure articulation avec les campagnes fédérales. Restent des chantiers sur lesquels le Snes-FSU doit encore avancer : travail fédéral, moyens concrets pour renforcer les S1 et les S2, lutte contre les discriminations incluant l’islamophobie, solidarité avec le peuple palestinien, pluralisme. À noter : le S3 de Créteil a maintenu au vote une motion pour le retour du thème 3 en tant que tel. Elle a été repoussée mais a tout de même rassemblé 43,4 % des voix.

Propositions de modifications statutaires

Bien que trois d’entre elles aient été invalidées par une partie d’UA, elles étaient nombreuses et ont été âprement débattues. La féminisation du texte des statuts et la mention de la cellule de veille violences sexistes et sexuelles (VSS) ont été adoptées à une large majorité. En revanche, aucune de celles présentées en opposition (féminisation des S1, S2, et possibilité de co-secrétariats académiques) n’a atteint les 60 %. Il en a été de même concernant celles relatives au renforcement de la lutte contre les discriminations au sein du syndicat. La proposition de l’ÉÉ sur la rotation des mandats a été rejetée, mais elle progresse et a été votée au-delà de nos rangs.

Action

Les deux plénières consacrées à l’action ont été l’occasion de débats fortement investis par l’ÉÉ et les S3 mobilisés, ainsi que par les enseignant·es de lettres et de mathématiques en collège. Le projet de texte action, qui portait une nouvelle journée de grève le 2 avril et la perspective d’une manifestation nationale en mai-juin, a pu être renforcé sur la gravité du moment, la nécessité d’articuler « choc des savoirs » et politique austéritaire, la manière de prendre en compte les différents rythmes et niveaux de mobilisation pour l’amplifier, et inscrire la manifestation nationale dans une dynamique.

De façon générale, l’ÉÉ aura marqué ce congrès par ses interventions tant en commissions qu’en plénière. Qu’il s’agisse de l’évolution des mandats et statuts du Snes-FSU, de la commission action, de celle des débats, de celle des mandats, l’ÉÉ s’est impliquée sur tous les sujets et a montré qu’elle s’appliquait à construire le syndicat, à tous les niveaux.

Par Les élu·es éé au Bureau National du Snes-FSU