Elle est sous le métro aérien boulevard Blanqui, le long du périphérique et à toutes les bretelles d’autoroute partout en France, dans les îles, dans les villes et dans les campagnes…dans la rue, sur les barricades des ronds-points et jusque dans nos écoles.
«Quand les riches volent les pauvres, on appelle ça les affaires. Quand les pauvres se défendent, on appelle ça de la violence».
Qu’est-ce qui a changé depuis Mark Twain ? Pas grand chose.
Les trente glorieuses ont explosé sous le choc pétrolier, la mondialisation et le libéralisme débridé de la fin du 20e siècle. La politique fiscale et les lois votées depuis l’arrivée de Macron au pouvoir ont favorisé une partie de la population, les 10 % les plus riches. Les dernières données de l’Insee montrent un accroissement du taux de pauvreté qui atteindrait en France son niveau le plus élevé depuis 2011, avec plus de 5 millions de pauvres et 9 millions de personnes sous le seuil de pauvreté. Les inégalités de revenus sont à la hausse et les 10 % les plus pauvres voient leurs revenus encore diminuer avec le rabotage systématique des aides et des minima sociaux et la mise à mal des systèmes de solidarité comme la catastrophique réforme de l’assurance chômage….Un plan pauvreté ?
Mais de qui se moque-t-on quand dans le même temps un étudiant à bout de conditions de vie précaires s’immole par le feu ou qu’on divise par deux les fonds sociaux destinés à faire face aux situations difficiles que peuvent connaître certains élèves ou leurs familles. Et que penser de la disparition programmée de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, acquis de la loi de 1998 de lutte contre les exclusions, organisme indépendant dans le choix de ses thématiques d’étude.
Cette violence de la société impacte aussi l’école et nos élèves. Des chiffres qui font froid dans le dos : 3 millions d’enfants vivent dans des familles pauvres. Une précarité qui souvent les empêche de travailler à la maison, de se concentrer à l’école, de «vivre ensemble» avec les autres enfants et qui fait imputer trop souvent leurs mauvais résultats à des déficiences cognitives. Des petits déjeuners en Éducation prioritaire, mesure-phare du plan pauvreté du gouvernement ? Comme le soutient Louis Maurin de l’observatoire des inégalités «La médiatisation de la pauvreté des enfants croit en fonction du désintérêt pour celle de leurs parents». Si des mesures spécifiques peuvent être prises pour les enfants c’est avant tout de la pauvreté de leurs familles dont il faut s’occuper. Lorsqu’on sait que le logement constitue le principal souci des familles pauvres, et le principal poste de dépenses des familles aux revenus faibles et moyens, il serait temps de développer une politique du logement digne d’une société humaine plutôt que de réduire les APL.
De toutes parts, on souligne le caractère inégalitaire de l’école française et son incapacité à compenser les inégalités sociales. Comme le dit Bernard Lahire «l’école ne peut rien au fait qu’un enfant n’ait pas bien dormi, ni bien mangé, que ses parents ne soient pas dotés en capital scolaire et n’aient pas de pratiques culturelles rentables scolairement». Alors qu’est-ce qu’on fait ? Va-t-on laisser Blanquer et Macron réduire les ambitions de l’école pour les élèves des milieux populaires, en éducation prioritaire et ailleurs ? Laisser se développer des méthodes qui n’assureront rien d’autre que quelques automatismes pour ces élèves alors que c’est l’entrée dans la culture écrite qu’on leur interdit ? Refusons cette assignation à résidence pour les enfants pauvres et exigeons des moyens à la hauteur de l’ambition d’une école vraiment démocratique.