Je retiendrai 2 faits marquants au cours de cet été : d’abord, les horribles attentats qui ont endeuillé et meurtri la population, et profondément choqué l’opinion publique. Ensuite, le déferlement d’actes et de propos racistes qui ont envahi la société tout entière, à travers l’affaire du burkini qui en a été le révélateur. Si les arrêtés anti burkini ont été le fait d’élus de droite, proches de l’extrême droite, ils ont aussi trouvé le soutien du premier ministre en personne ! Et cette polémique honteuse a révélé un climat délétère, elle a libéré une parole raciste qui s’est largement diffusée : il faut prendre la mesure de ce changement dans l’opinion publique, car il a de quoi nous inquiéter. Nous inquiéter pour l’avenir de notre société, profondément fracturée, et nous inquiéter aussi parce que ce sont les idées de l’extrême droite qui se trouvent confortées ici.
D’autres sujets sont très inquiétants : la réponse du gouvernement aux attentats, car c’est une réponse exclusivement sécuritaire et liberticide. La prolongation de l’EU ad vitam aeternam est une grave atteinte aux libertés (pour mémoire, le nombre d’assignations à résidence a augmenté de 50 % ces trois derniers mois), et c’est une mesure qui n’a pas fait la preuve de son efficacité face au terrorisme. Très efficace, en revanche, contre le mouvement social, pour interdire les manifs, réprimer les militants, faire taire la contestation…
Hollande et Valls ne cessent de marteler que la France est en guerre, ils font dans la surenchère martiale, toujours plus anxiogène, et ce n’est pas une erreur de langage ! Maintenir la population dans la peur, ça légitime toutes les atteintes à la démocratie, tous les reculs de l’état de droit. Soyons clairs, il ne s’agit pas de minimiser le traumatisme subi par les victimes des attentats, ni de mépriser le besoin légitime et naturel pour chacun et chacune de vivre en sécurité. Mais pour ceux qui nous dirigent, ce délire sécuritaire est bien commode aussi car il permet de faire écran à d’autres questions d’importance, comme les questions sociales, par exemple.
Alors je terminerais là-dessus : c’est le rôle du syndicalisme aujourd’hui de remettre les questions sociales au premier plan des priorités, c’est sa responsabilité de porter la voix des salariés et des populations les plus fragiles, et aussi de faire contre-poids face au discours ambiant de peur et de haine de l’autre.
Le syndicalisme a donc une grande responsabilité et un défi très important à relever. La marche peut sembler haute, mais nous ne partons pas de rien : nous avons vécu un puissant mouvement au cours du printemps dernier contre la loi Travail, et construit du « commun » avec nos partenaires, les syndicats de transformation sociale avec lesquels nous avons partagé l’analyse et les perspectives.
Nous avons combattu ensemble ce gouvernement, et la FSU a su prendre sa place dans l’interpro : ces acquis sont essentiels pour conquérir des droits, pour repousser les attaques à venir. Il faut tirer parti de cette unité, et la mettre au service de la défense des droits des salariés.
Nous pensons que c’est le moment de concrétiser un rapprochement avec la CGT et Solidaires, de construire un outil syndical unitaire qui s’inscrive dans la durée et qui nous permette d’être force de propositions et de contre-pouvoir. Là encore, nous ne partons pas de rien, nous travaillons déjà avec la CGT et Solidaires contre l’extrême droite, ou dans l’intersyndicale femmes, entre autres.
Il faut aller plus loin : dans la séquence électorale qui s’ouvre, nous avons plus que jamais besoin d’unir nos forces pour faire front contre les orientations libérales et réactionnaires, pour reconquérir les acquis sociaux et imposer un projet de société solidaire. Et pour redonner espoir à la population.