Comme à chaque nouvelle année, les vœux se multiplient. Tout ira mieux en 2013. Les marchés financiers sont calmes, les bourses, en 2012,
ont connu une montée régulière même si leurs scores
sont encore inférieurs à ceux d’août 2011,
les taux d’intérêt pour les emprunts à court terme
de la France et à moyen terme pour l’Allemagne sont négatifs
et la crise de l’euro serait derrière nous.
Poudre aux yeux d’un Président voulant croire dans la fin de la crise ?
L’année 2012 a été marquée par une récession qui a principalement touché les pays de la zone euro. L’économie française a semblé échapper à ce marasme en affichant… O % de croissance depuis le 4e trimestre 2011. L’INSEE estime que le PIB reculerait de 0,2 % au 4e trimestre 2012. Toutes les économies développées connaissent soit une récession pour la zone euro prise comme un tout et le Japon, soit une timide reprise aux Etats-Unis où le PIB a progressé de 0, 7 % au 3e trimestre 2012 grâce à la hausse de la consommation des ménages américains, malgré un chômage élevé. Globalement, la croissance mondiale est soutenue par la reprise des économies émergentes, en premier lieu par celle de la Chine. Pour la France, les prévisions pour 2013 tournent autour de 0,4 % pour l’INSEE, loin des 0,8 % du gouvernement. L’objectif des 3 % de déficits publics ne sera pas atteint.
La récession est là
La récession est présente et fera sentir ses effets pendant toute l’année 2013. Les politiques d’austérité, inscrites dans le marbre du TSCG – tout un programme ce traité de stabilité, de coordination et de gouvernance –, dépriment logiquement le marché final approfondissant la surproduction. Ce nouveau traité, ratifié sans en changer une virgule par Hollande, fixe un nouvel objectif, les déficits publics « structurels » ne doivent pas dépasser 0,5 % du PIB. Il est applicable en 2014, à condition d’être ratifié par tous les pays de l’Union Européenne. D’ores et déjà la Grande Bretagne a annoncé qu’elle ne serait pas signataire. Les tendances centrifuges sont toujours à l’œuvre. Elles le sont plus encore dans la zone euro. François Hollande a fait semblant de considérer que la ratification du traité avait satisfait les marchés financiers, que la spéculation contre l’euro connaissait un coup d’arrêt qu’il avait tendance à considérer comme définitif. Les données statistiques ne corroborent pas ce point de vue. Les taux d’intérêt restent profondément divergents, même s’ils baissent. A 10 ans, au 27 décembre 2012, le taux était de 1,328 % pour l’Allemagne, de 1,978 % pour la France – un des plus bas jamais enregistrés –, 4,521 % pour l’Italie, 5,277 % pour l’Espagne et 11,904 % pour la Grèce. La croissance prévue ne sera que de 0,6 % pour l’Allemagne, économie dominante de la zone, de – 1 % pour l’Italie, de –1,4 % pour l’Espagne et de – 4,5 % pour la Grèce. Avec des taux de chômage crevant tous les plafonds comme la montée de la pauvreté – un quart de la population européenne est menacée par la pauvreté ! – et de la misère.
La Grèce, enfermée dans les critères absurdes de la troïka – BCE, Union Européenne, FMI – ne peut lutter ni contre la crise financière ni contre la crise économique.L’exacerbation de toutes les crises, en incluant la sociale, la politique et la culturelle est logiquement prévue. A moins d’une autre politique… Le même scénario s’écrira pour l’Espagne, le Portugal ou l’Irlande du Sud. Seuls les mouvements sociaux proposent un début de sortie de crise. Ils rejoignent l’analyse de la plupart des économistes sur la nécessaire rupture avec la politique d’austérité. Tous les moteurs de la croissance – consommation des ménages, investissement des entreprises, exportations – sont orientés à la baisse.
Compétitivité, compétitivité répètent-ils en sautant comme des cabris
La solution, d’après le Medef dont les propositions ont été reprises dans le rapport Gallois, viendrait de la conquête des marchés sur les concurrents extérieurs. Cette compétitivité-prix passe par la baisse du coût du travail pour permettre l’augmentation du profit et la baisse des prix. L’accord signé par la CFDT et deux pseudopodes le 12 janvier 2013 permettra de faire reculer plus encore le droit du travail alors que la flexibilité du travail est déjà inscrite dans la réalité française. Les contrats de travail dits atypiques – CDD, contrat de mission, temps partiel, intérim – sont déjà la norme pour les entrants sur le marché du travail, désormais les CDI seront moins protégés. Le pouvoir patronal sur les salarié(e)s se trouve renforcé. Le « travailler plus » est une réalité. Dans beaucoup d’entreprises, les accords permettent de faire travailler les salariés 39 heures payées 35. On comprend, que malgré tous les discours, les patrons ne veulent pas de la remise en cause des ces lois dites sur les 35 heures. Les aménagements de ces lois ont été nombreux faisant reculer les droits collectifs des salariés et vidant peu à peu le droit du travail de son contenu. L’égalité devant la loi a laissé la place au règne de la norme, au contrat individuel faisant éclater toutes les solidarités collectives. La « culture du résultat » s’est substituée au droit du travail.
Un partage défavorable aux salariés
Depuis les années 1980, les gains de productivité n’ont pas été redistribués, ils ont été monopolisés par les profits. Le partage de la valeur ajoutée, de la création de richesses a été défavorable aux salaires. Les baisses de pouvoir d’achat du salaire direct et les exonérations de cotisations sociales patronales, jusqu’à 1,7 fois le SMIC légalisées par les gouvernements successifs expliquent cette inégalité. Un des résultats de cette politique a été de resserrer les salaires autour du SMIC.
Les profits d’aujourd’hui n’ont pas été les investissements de demain, suivant un théorème attribué au chancelier social-démocrate allemand Helmut Schmidt. Les profits ont servi à engraisser les actionnaires et à spéculer – de manière improductive – sur les marchés financiers. Là se trouve la cause principale de la perte des marchés, dans l’absence d’investissement productif. Dans le même temps, les crédits de la recherche fondamentale ont baissé mettant en cause la capacité d’innovation et la possibilité de créer des nouveaux produits. La stratégie des grandes firmes françaises, c’est visible dans l’industrie automobile, a été de rester sur des créneaux de bas gamme où elles ont subi la concurrence des pays émergents. Le libre échange même tronqué, un euro fort et un régime d’accumulation à dominante financière sont les autres causes du processus de désindustrialisation des économies de l’Union Européenne à l’exception de l’Allemagne, spécialisée dans les produits sophistiqués, notamment les machines outils. La hausse de l’euro lui a été bénéfique. Sa croissance s’est faite contre les autres économies de la zone euro aggravant les tendances centrifuges. Environ les deux tiers des échanges des pays de l’Union Européenne se font à l’intérieur de la zone. L’impératif de la compétitivité est une imbécilité au regard de la construction politique et sociale de l’Europe. Il renforcera tous les « dumpings », sociaux comme fiscaux par une mise en concurrence. Ce n’est pas une voie de sortie de la crise. Ni celle d’une nouvelle industrialisation nécessaire pour créer des richesses.
Le saut dans l’inconnu
Attendre semble être la solution hollandienne. Croit-il au miracle ? Aux forces du marché capables de proposer une voie spontanée de sortie ? On ne sait. Par contre, les reculs sont manifestes face au patronat ou aux lobbies des banques. Le projet de loi sur les banques qui devait viser à la séparation stricte des activités de dépôt et d’affaires, conserve, pour l’essentiel, le modèle de banque universelle, facteur de crise. Dans ce modèle, les banquiers se servent de l’argent des dépôts pour des activités spéculatives. C’est immoral et dangereux comme l’ont montré toutes les affaires récentes. Une réplique de la crise financière et bancaire est toujours inscrite dans le contexte, la solution de la nationalisation serait la plus efficace tout en permettant d’agir sur les stratégies d’industrialisation par la possession de l’arme du crédit. Les grandes banques françaises sont des mastodontes. Le chiffre d’affaires de la Société Générale équivaut au PIB de la France.
Les déstructurations sont à l’œuvre. Partout les suppressions d’emploi succèdent aux plans sociaux, les délocalisations sont légions et le gouvernement s’évertue à satisfaire les revendications du patronat sous prétexte de « patriotisme » tout en pataugeant dans la politique d’austérité. Hollande semble faire confiance aux mécanismes mêmes de la crise capitaliste pour résoudre les problèmes du capitalisme. S’il est vrai que la capacité d’adaptation du système n’est plus à démontrer, ses tendances barbares ne sont pas un mystère non plus. Que répondre aux mouvements sociaux ? Sinon, une politique sociale, écologique qui passe par la renaissance et le développement des services publics pour jeter les bases d’une autre manière de vivre ensemble. Ou alors, le monde s’enfoncera dans la dépression.