En janvier 2017, la plateforme française « emplois-climat »
a publié un rapport afin de mettre en débat une proposition
de création d’un million d’emplois en France. La plateforme regroupe des syndicats et des associations(1).
La campagne emplois-climat espère construire un espace ouvert d’échanges, de débats et de propositions sur les sujets liant
les enjeux de la transition écologique avec ceux de l’emploi,
de la reconversion et de la formation.
« Si nous conjuguons justice sociale et action pour
le climat, les gens se battront pour cet avenir »
Naomi Klein, Paris, avril 2015.
Nous sommes confronté-es à deux crises d’ampleur, climatique et sociale. Une crise climatique, et plus globalement environnementale qui remet en cause notre éco-système et modifie déjà les conditions de vie sur notre planète : multiplication d’évènements météorologiques graves, migrants climatiques, disparition d’espèces vivantes sans compter les pollutions et autres conséquences pour notre santé. Une crise sociale d’autre part qui taraude nos sociétés depuis des décennies maintenant : un chômage de masse, avec les conséquences sociales et économiques pour les chômeurs évidemment, mais au-delà pour toute notre société : pression à la précarité pour tous-tes, chantage au chômage pour les salarié-es en poste, attaques contre nos systèmes de protection sociale au prétexte de défendre l’emploi via la « compétitivité du coût du travail » etc…
La création massive d’emplois « climatiques », c’est-à-dire dans les secteurs nécessaires à une transition écologique est une réponse à cette double crise. Nous avons besoin de transformer notre appareil de production, donc de créer de nouveaux emplois, plus intensifs en travail et moins en capital, dans les secteurs nécessaires à la transition écologique à la rénovation énergétique, dans l’agriculture paysanne, mais aussi dans l’éducation, la culture…pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux…Elle répond également à un enjeu stratégique : construire une alliance entre réseaux écolo et syndicaux, entre franges du salariat de l’industrie marquée par l’obsolescence et la concurrence internationale, et les franges du salariat insérés dans les secteurs des services, entre classe moyenne et classe populaire.
La campagne pour un million d’emplois climatiques n’est pas la solution, mais un outil qui peut s’avérer utile pour travailler la convergence. Sommes-nous capables ensemble de défendre une sécurité sociale professionnelle et la reconversion nécessaire de certains secteurs industriels ? De poser la question, ensemble, mouvement syndical et mouvement écologiste, de la nature des emplois mais également du statut des travailleurs (emplois précaires ou emplois garantis et protégés). De défendre ensemble des travailleurs/euses qui s’opposent à la fermeture de leur entreprise automobile tout en acceptant de poser la question de la nature de la production ?
Potentiellement, c’est une campagne ambitieuse qui pose des questions remettant en cause le système : qui décide de produire et quoi produire ? Le « marché » ou les travailleurs et les citoyens ? Comment produire ? Comment financer la transition et qui paye ? Tout le monde ou les pollueurs et exploiteurs ?
Cette campagne peut permettre de poser ces questions en partant de problèmes immédiats et concrets, il s’agit de défendre les intérêts immédiats des salarié-es et de dessiner les contours d’un projet de société alternatif au capitalisme, d’autres mondes possibles. Il s’agit donc dans cette campagne de « tenir les 2 bouts » de manière cohérente : la lutte quotidienne, dans le très court terme, contre la violence du capitalisme, et la perspective de transformer de fond en comble la société.
Pour « tenir ces 2 bouts », le cadre de la plateforme unitaire avec ses productions est un point d’appui : le rapport par exemple est utile pour cadrer et engager le débat, un support pour organiser des réunions publiques. Nous devons favoriser la confrontation, discuter des revendications des un-es et des autres, des problèmes et difficultés rencontrés, faire un travail de convictions auprès de militant-es, de syndicats. ●
Julien Rivoire