Juin 2007, dans la foulée de l’élection triomphale de son patron,
l’UMP s’apprêtait à proposer l’instauration d’une TVA dite sociale.
Ce chiffon rouge agité par le PS pendant les législatives a coûté
quelques dizaines de circonscriptions à l’UMP. Silence radio depuis.
Sarkozy tente de repasser le plat (indigeste) avant la présidentielle.
« TVA anti-délocalisation », ou « TVA sociale » (quel oxymore !), cette taxe n’est rien d’autre qu’un transfert d’une part contributive des entreprises au financement de la sécurité sociale vers les ménages par le biais d’une baisse des cotisations patronales compensée par une hausse de la TVA. Parisot peut être contente.
Un pur produit toxique !
Puisée dans la boîte à idées du rapport Attali de 2010, l’idée de TVA sociale aurait pour but de « maîtriser le coût du travail en développant notamment la fiscalité sur la consommation », de « renforcer la compétitivité pour développer l’emploi » par la recherche « d’un accroissement notable de la compétitivité des secteurs exposés à la concurrence internationale, s’apparentant par ses effets à une dévaluation ». Cela pourrait consister « en un transfert des cotisations au titre de la branche famille… qui représente 5,4 points (ou 26 milliards d’euros) et qui pourrait être compensée par une hausse de 3,2 points de TVA ».
Pour faire avaler la pilule, on explique que l’effet de hausse de TVA sur le consommateur sera neutralisée par une baisse équivalente des prix HT, car l’entreprise répercuterait la baisse du coût salarial sur le prix de vente.
Sauf que ce n’est pas vrai ! Les expériences françaises de ces dernières années en attestent : les baisses de TVA à 5,5 % dans les travaux immobiliers en 1999 et dans la restauration en 2009 n’ont été respectivement répercutées qu’à 57 % et 60 %.
Sur le terrain de l’emploi, cette baisse n’a pas fait la démonstration que les marges dégagées s’orientaient vers la création d’emplois. Au contraire, ce sont les taux de marge et dividendes qui en bénéficient.
Quant à la compétitivité économique retrouvée, là aussi l’argument fait long feu. Même dans l’hypothèse maximale de baisse des cotisations rêvée par le Medef, l’écart du coût salarial avec des pays comme les PECO(1) resterait 5 à 7 fois plus cher et, avec la Chine par exemple, entre 8 à 15 fois plus cher. L’argument de la lutte anti-délocalisation n’est donc que ce qu’il est en réalité : un argument de vente d’une mesure anti-sociale.
Sarkozy à l’épreuve
de Merkel ?
Des pays européens ont utilisé l’arme de la TVA comme instrument de dévaluation. L’Allemagne a fait passer son taux de TVA en 2007 de 16 % à 19 % pour financer une partie de sa protection sociale, ne modifiant pas au passage la TVA sur les produits alimentaires. Elle y a sans doute gagné un peu en matière de compétitivité en utilisant ainsi cet instrument de concurrence fiscale au sein de l’UE, car l’Allemagne est très exportatrice. Ce faisant, elle alignait son taux de TVA sur la moyenne des pays de l’UE.
Avant elle, et bien avant l’euro, le Danemark entre 1987 et 1989 abaissait les cotisations sociales des employeurs de 50 % à 30 % en finançant la mesure par une hausse de 3 points de la TVA, portée à 25 %.
Depuis, avec la directive TVA qui veut tendre à une harmonisation fiscale européenne, les membres de l’UE n’ont plus la maîtrise de leur taux de TVA. Celui-ci se situe entre 15 et 25 % dans l’Union européenne. Il y a fort à parier qu’un passage du taux français de 19,6 % à près de 25 % a toutes les chances d’être retoqué.
TVA anti-sociale
Impôt indirect, la TVA aura un impact non négligeable sur le pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes. La hausse des prix, en particulier sur les biens et services importés, touchera davantage les ménages les plus modestes qui consacrent une partie plus importante de leurs revenus à la consommation. Or, les importations touchent 54 % de la consommation des biens manufacturés et une grande part de l’alimentation est aussi affectée au travers des denrées importées.
Injuste évidemment, une telle taxe ne fait que s’ajouter à tous les dispositifs qui se sont empilés pour favoriser le capital. Christiane Marty, de la fondation Copernic, rappelle que c’est le coût du capital qui pèse symétriquement dans les comptes des entreprises. Or, c’est bien l’explosion des dividendes, concomitante à la compression de la part salariale, qui caractérise l’évolution des coûts ces dernières décennies.
Si un coût doit baisser, c’est bien celui du capital ! ●
Springsfields Marin
1) Pays d’Europe centrale et orientale.