En juillet 2010, le gouvernement avait gratifié les agents publics d’une hausse de 0,5 % du point d’indice et annoncé par la même occasion un gel
des salaires pour 2011, revenant ainsi sur une négociation antérieure,
ainsi qu’une possible discussion
pour 2012 et 2013… en fonction
de la « situation économique »
selon l’expression de Monsieur Tron qui, cette fois-ci, aura bien tenu
ses promesses : 0 % en 2011 et 0 %
en 2012. De fait, salaires en baisse, inégalités en hausse… Grrr !
Avec un taux de retenue pour pensions relevé à 8,12 % en 2011, c’est bien une baisse nette des salaires que vont encaisser les fonctionnaires. Et pour la douzième fois en 12 ans, le salaire minimum fonction publique passera sous le smic et l’indice minimum de traitement devra être rehaussé pour être conforme à la loi, écrasant ainsi de plus en plus les évolutions de carrière des agents les moins bien payés.
Cette baisse, associée à une politique d’individualisation des salaires, renforce les inégalités et creuse notablement les écarts entre les fonctions publiques et aussi entre les hommes et les femmes. En effet, les mesures du « travailler plus » (primes, crédit épargne-temps, heures supplémentaires défiscalisées,…) ne concernent qu’une minorité des fonctionnaires(1).
En 2008, les écarts de salaires entre hommes et femmes dans la Fonction publique étaient déjà compris entre 15,9 et 28,7 %. La situation est en train plus encore de se dégrader si l’on prend en compte les chiffres qui attestent déjà que ce sont les hommes qui bénéficient majoritairement des différentes mesures de la loi TEPA. Le gouvernement nous propose par ailleurs l’ouverture de discussions sur l’égalité hommes/femmes dans la Fonction Publique. Nous avons un scoop à lui communiquer : cela commence par une politique salariale qui garantisse cette égalité !
L’absence de mesure collective n’est pas non plus compensée par la GIPA, la garantie individuelle du pouvoir d’achat, qui demeure individuelle, ponctuelle et qui n’est déclenchée que suite à une stagnation du salaire de 4 ans (le changement d’échelon étant considéré comme une mesure de hausse salariale).
Dans le même temps, avec les réductions de postes et la politique « managériale » mise en œuvre, nous sommes toutes et tous confrontés à une surcharge et un rythme de travail devenus parfois insupportables.
Un choix politique
Le prétexte de la crise et de la dette publique est avancé pour justifier le gel du point d’indice. C’est en réalité une attaque inédite, point d’orgue d’une politique salariale délibérée et annoncée dès l’élection de Nicolas Sarkozy. Cette politique conduira à accentuer et accélérer, d’ici fin 2011, la baisse du pouvoir d’achat des fonctionnaires (nous en serons alors à -11,13 % depuis 2000) et l’individualisation des salaires. Le gouvernement confirme que le point d’indice doit devenir un élément du salaire parmi tant d’autres et cherche à dénaturer des mesures d’action sociale en faisant du supplément familial de traitement et de l’indemnité de résidence des contreparties au gel de la valeur du point d’indice (il propose d’ailleurs une redistribution entre fonctionnaires à enveloppe constante ce qui se traduira par des hausses dans certaines situations mais aussi par des baisses dans d’autres). A contrario, les organisations syndicales, dont la FSU, continuent à exiger l’augmentation du point d’indice, seule mesure collective s’adressant à l’ensemble des fonctionnaires et largement possible à financer dès lors que l’on fait le choix politique de la redistribution des richesses et non des cadeaux aux plus riches.(2)
Après un rendez-vous annuel qui se solde donc par des propositions inacceptables et injustes, le gouvernement clame que le pouvoir d’achat des fonctionnaires a augmenté en camouflant la réalité derrière des calculs ubuesques. En fait, l’Etat n’a cessé depuis 1999 d’économiser sur les salaires de ses agents en faisant baisser la part de leurs rémunérations dans le PIB (un maintien de cette part aurait conduit à une augmentation de 28 % de la masse salariale en 2010) et il veut maintenant nous faire payer une partie de la crise.
L’unité syndicale a permis des déclarations communes et une journée d’action le 31 mai, pendant laquelle la FSU a répété ses valeurs et ses exigences : la Fonction publique reste fondée sur l’intérêt général et en ce sens la politique salariale doit être guidée par l’égalité de traitement entre agents. Pour cela la question du point d’indice est cruciale. ●
Edwige Friso
1) Pour les heures supplémentaires,
en sont bénéficiaires : un agent sur 5 dans
la Fonction Publique d’Etat ; un agent sur 3
dans la Fonction Publique Territoriale (en 2009)
et pour 90 % des agents de catégorie C.
Le rachat de jours de CET (compte épargne temps) concerne moins de 54 000 agents dans la FPE,
en majorité des hommes ; la catégorie A
et les personnels âgés de plus de 50 ans
sont surreprésentés parmi les bénéficiaires.
Pas de rachat dans la FPT mais la même surreprésentation parmi les détenteurs de CET.
Taux moyen des primes :
pour les cadres hommes 56 %, femmes 45 % ;
pour les profs hommes 14%, femmes 9 %.
2) Exemple : l’allègement de l’ISF représente
900 millions d’euros par an, une somme qui permet d’augmenter la valeur du point d’indice
de 1 % dans la Fonction Publique d’Etat.