L’austérité gouvernementale revêt l’habillage d’un pacte prétendument passé entre le capital et le travail. Une fois cet artifice enlevé, la réalité prend la forme de baisse des salaires, des retraites, des prestations sociales et de la dépense publique.
L’heure est au rassemblement des forces sociales et citoyennes qui rejettent sans ambiguïté les politiques d’austérité.
Face à un gouvernement qui mène une politique libérale débridée, le syndicalisme est à la croisée des chemins car la caution « sociale » d’une telle politique ne peut venir que des syndicats, du choix qu’ils font de l’accompagner ou pas.
L’enjeu avec le Pacte de responsabilité, c’est la mise en place d’une politique économique de l’offre mortifère dont la « réussite » nécessite que tout ou partie des syndicats joue le jeu sur la base des exigences du patronat.
Un pacte à combattre
Élaboré début 2014, notamment par la CFDT et le MEDEF, ce pacte se concrétise par un nouveau cadeau aux patrons avec la promesse de l’exonération de plus de 30 milliards de cotisations sociales « patronales », lesquels s’ajoutent aux 230 milliards accordés depuis 20 ans au patronat et dont chacun a pu mesurer la redoutable efficacité en matière de « lutte » contre le chômage. Les mesures de réduction du « coût du travail » opérées par le passé ont contribué à plomber les comptes publics sans relancer l’emploi.
Dans ces conditions, le marchandage « baisse des charges contre créations d’emplois » était avant tout une mise en scène propre à rendre acceptable par le peuple de gauche la politique de l’offre suivie par le gouvernement. L’accord du 5 mars convient parfaitement au MEDEF, comme il l’a clairement indiqué car de « contreparties », il n’y a point. « Rien ne semble vraiment très contraignant, dans ce texte, pour les employeurs » note Libération.
Accompagnant la réduction des charges, la thématique de la réduction de la dépense publique est aussi au centre de la politique sociale libérale. On a la combinaison des 2 pactes (« responsabilité » et « stabilité ») qui s’emboîtent l’un dans l’autre. Ce qui se traduit par 46 milliards d’euros de baisse des « charges » (partagés en 41 pour les entreprises et 5 pour les ménages…) et 50 milliards d’économie à faire sur 3 ans pour respecter les contraintes de l’UE…
Comment expliquer que cette politique qui produit du désarroi, de la colère sociale, s’accompagne d’une grande faiblesse de mobilisation syndicale ?
Bien sûr, face à ce gouvernement, les divisions du mouvement syndical pèsent, avec notamment la CFDT qui, dans sa politique d’accompagnement du libéralisme, approuve les orientations gouvernementales.
Comme on pouvait s’y attendre, l’unité syndicale réalisée en 2010 et plus généralement contre le mode de gestion Sarkozy a été mis à mal car une partie du mouvement syndical est prête à la négociation de reculs sociaux avec le gouvernement et le patronat en échange d’une concertation renforcée, voire constitutionnalisée.
Affrontement…
Il y a un risque d’intégration d’un mouvement syndical coupé des formes de conflictualité et co-gestionnaire de la crise. C’est cela qui ouvre la voie à la continuité et l’aggravation des politiques anti-sociales du gouvernement et, en réalité, prépare le tapis rouge pour un retour de la droite dans la pire de ses versions.
La voie de l’affrontement n’est pas facile mais c’est la seule possible. Le mouvement syndical, qui est l’instrument principal de défense des larges couches de la population victimes de ces politiques, est pourtant insuffisamment au rendez-vous d’une mobilisation déterminée et solidaire. Certes, il y a eu le 18 mars, sans véritable unité malgré une dynamique anti pacte. Il y a maintenant pour les fonctions publiques le 15 mai… Mais est-ce à la hauteur ? Certainement pas ! Là, tout le monde y est, y compris CFDT et UNSA, qui s’aperçoivent enfin des dégâts de la politique d’austérité et sont en pleine contradiction, ne voulant pas voir le lien entre ristournes de cotisations sociales accordées au patronat et mesures de limitation des salaires des fonctionnaires… Il faut bien prendre aux uns ce que l’on accorde aux autres ! Ce qui explique leur timidité dans l’engagement pour un appel à la grève le 15 mai alors qu’il est pourtant temps de taper contre ce gouvernement.
Rassembler
contre l’austérité
Cette faiblesse marque la situation politique car l’action et la pression du mouvement social et syndical se situent bien en dessous de celles qu’exercent la finance, le patronat, la droite et l’extrême droite.
Il faut résolument dénoncer les politiques en cours et allumer les feux rouges sur les dangers qu’elles incarnent du point de vue social, économique, démocratique…
En s’appuyant sur des propositions alternatives, en œuvrant à les rendre crédibles à une large échelle, il faut reprendre le chemin des mobilisations, de la rue, de l’action syndicale, car pour faire bouger les lignes de la résignation, il sera nécessaire de montrer qu’on est prêt à agir, vraiment.
Il faudra poursuivre la mobilisation et construire le mouvement social à la hauteur de l’enjeu. L’heure est au rassemblement des forces sociales et citoyennes qui rejettent sans ambiguïté les politiques d’austérité, la remise en cause des droits à la santé, à la retraite, qui revendiquent une réforme fiscale répartissant de manière plus égalitaire les richesses, qui veulent remettre au cœur du développement de notre pays les services publics et le développement de droits sociaux pour toutes et tous, seul rempart contre la montée de l’extrême droite. ●
Laurent Zappi