Syndicat de transformation sociale, le SNES vise à l’émancipation des travailleur-ses. Et, comme enseignant-es, nous pensons, au SNES, que l’école doit et peut jouer un rôle fondamental dans la construction de cette émancipation.
Or, l’école d’aujourd’hui est façonnée par la pensée ultralibérale et le système scolaire est un des rouages qui participe à sa diffusion comme discours dominant. Ainsi, sous le joug des classements et des exigences performatives, la pédagogie se trouve inféodée aux obligations de résultats. Elle doit énoncer ses objectifs, être dynamique et innovante. Dès lors, puiser dans le répertoire de l’émancipation relève bien souvent de la figure de style ou de l’incantation creuse. Ne sommes-nous pas envahi-es par les injonctions aux « bonnes pratiques », les recettes à dupliquer et la présentation des contenus enseignés comme vérités indiscutables ? En amont, la recherche pédagogique est également affectée par la diffusion de ce discours et peine à s’en protéger.
Or, c’est en comprenant les mécanismes qui président à l’aliénation et en mettant en œuvre les moyens pour lutter contre que nous pouvons parvenir à l’émancipation et permette aux élèves de l’atteindre par eux/elles-mêmes. Et c’est bien l’objet d’une partie de la recherche en pédagogie. Pris-es entre les injonctions des programmes, des évaluations et du temps scolaire, les enseignant-es ont besoin de ressources et de temps pour prendre du recul sur leur pratique quotidienne et œuvrer en ce sens.
Le SNES doit donc réaffirmer que la recherche et la mise en place des conditions de travail permettant aux élèves, aidé-es par leurs professeur-es, d’accéder à l’émancipation, sont un de ses axes de travail essentiel. Il doit se redonner pour mandat de soutenir et de relancer la recherche pédagogique visant à cette émancipation, s’efforcer de solliciter les chercheurs-ses et les associations comme le GFEN qui agissent en ce sens. Il doit proposer à ses adhérent-es une réflexion entre pairs sur les ressorts et les outils d’une pédagogie émancipatrice. Il faut pour cela reformuler les problématiques ; ainsi, plutôt que de se questionner les dispositifs d’aide et de soutien, on réfléchira à la façon dont les élèves peuvent s’en passer.
Force de propositions, le SNES doit réaffirmer son projet d’une école permettant la transmission d’une culture commune à visée émancipatrice, cette thématique doit irriguer davantage les écrits syndicaux et prendre formes dans des formations syndicales qui coopèrent avec les organisations œuvrant en ce sens. Quand la communication du ministère insuffle dans le discours pédagogique ses éléments de langage, le SNES, loin de se contenter d’un refus, doit à son tour, construire un contre discours porteur d’avancées et de projets pour ses adhérent-es et leurs élèves.
Céline Boudie, Sabrina Camoreyt, Amandine Cormier, Véronique Servat (Créteil)