Les inspections générales interministérielles chargées d’un rapport
sur la RGPP ont remis leurs conclusions en septembre 2012.
Au-delà des symboles, la MAP s’inscrit dans une logique libérale
proche de la Nouvelle Gestion Publique à partir de laquelle
s’était déclinée la RGPP.
Pour le gouvernement, ce qui a posé problème dans la RGPP n’était pas sa logique libérale, mais la méthode, ainsi qu’une « approche limitée à l’Etat ne [permettant] pas la révision des politiques partagées avec les collectivités territoriales et les organismes de protection sociale ». Dans le même temps, le gouvernement s’enfermait dans la logique de l’austérité en signant le traité budgétaire européen comprenant les fameux 3 %. Au final, il fait le choix de l’objectif libéral du sacro saint équilibre budgétaire et entend réformer l’Etat de façon à faire des économies au-delà du court terme (reproché à la RGPP) et à faire entrer durablement la culture de l’évaluation dans l’action publique. Bien sûr, on y met les formes, on s’attache aux symboles, on est de «Gôche».
Les symboles
Le rapport puis les annonces gouvernementales ou de l’administration regrettaient dans la RGPP l’absence de concertation qui avait rendu difficiles les réformes de fond, un rythme incompatible avec une association des acteurs et des usagers et une préparation suffisante des réformes. Le gouvernement multiplie donc les signes symboliques qui cherchent à montrer que la MAP, dans la méthode, n’est pas la RGPP. Le SGMAP (M.Filippini) est rattaché non au Budget mais à Matignon pour indiquer que « l’amélioration de l’action publique ne se résume pas aux seules économies budgétaires » et pour lui donner une dimension interministérielle. Un site internet a été ouvert par Mme Lebranchu, dédié à « l’ innovation participative » et destiné aux 2,3 millions de fonctionnaires de l’Etat. Enfin, associé à la loi sur la décentralisation, c’est la mise en place d’un cycle de discussions sur la MAP qui va débattre de l’installation de formations spécialisées dans les conseils supérieurs de la FP. A ce jour, la méthode qui prévaut autour de l’acte 3 de la décentralisation montre que la concertation et la transparence sont encore des objectifs à atteindre !
Les faits
L’objectif principal reste la réduction des dépenses et l’idée qu’avec une « bonne » politique de ressources humaines, on va pouvoir faire mieux avec moins. Les suppressions de postes par le biais du non-remplacement des départs à la retraite se poursuivent, le gel du point d’indice est maintenu.
Le Premier ministre a commandé en avril à l’Inspection Générale deux missions pour faire le bilan et avancer dans les mutualisations interdépartementales et interrégionales pour certains métiers ou compétences. La ministre de la FP, de la réforme et de la décentralisation n’entend pas renoncer à une part de salaires au mérite, ni à la part pour fonction, poursuivant le détricotage de la FP de carrières. Les « malheureuses » déclarations de M. Verdier(1), actuel directeur de la DGAFP, remettant en cause l’existence des grilles indiciaires, constituaient peut-être des ballons d’essai… Depuis la mise en place de la LOLF en 2001, la logique libérale pour « réformer » l’Etat-providence, de manière plus ou moins brutale, s’est très largement diffusée, dans le PS comme ailleurs. Les formules magiques – autonomie, performance, évaluation, engagement et mérite, mobilité, contrat, gouvernance, etc – se retrouvent dans chacun des discours et des décisions.
Tout cela fait dire à Luc Rouban(2), que « le développement de la nouvelle gestion publique, même parcellaire, même bricolé, indique que l’on passe progressivement de logiques collectives, certes plus ou moins corporatives, à une logique du travail individualisé.
Ce qui se joue (…) ne tient pas seulement à des considérations économiques mais au fait que les fonctionnaires sont progressivement « dépossédés » de leur travail, réduit à des statistiques et traduit en logiques purement formelles et en chiffres abstraits dont la seule utilité est de tout ramener à la seule dimension financière » et que l’on vit « un glissement vers un nouveau modèle social où le fonctionnaire n’est plus qu’un domestique ». ●
Edwige Friso
1) Localtis du 4 avril 2013.
2) Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS, travaille au CEVIPOF depuis 1996 et à Sciences-Po depuis 1987. Il a publié un article sur la FP
dans l’Humanité du 8 avril.