La réforme de l’éducation prioritaire annoncée sous Vincent Peillon dans le cadre de la politique de refondation a été finalement mise en œuvre sous la mandature de Najat Vallaud-Belkacem. Cette réforme, comme d’autres avant elle, se fait à moyens constants ce qui enclenche intrinsèquement un jeu de chaises musicales entre les collèges nouvellement classés et les collèges déclassés. Ce principe est globalement accepté par le SNES, qui, certes, conteste la nouvelle carte de l’éducation prioritaire, mais pas l’ADN de la réforme. Personne ne s’inquiète non plus auprès de l’institution du contenu des conventions d’accompagnement de sortie de l’éducation prioritaire qui sont très disparates selon les établissements.
Or les établissements sortant de l’éducation prioritaire, mais aussi d’autres qui n’y entrent pas se sont mobilisés bien an amont de l’annonce tardive de cette carte en CTM le 17 décembre. Pour certains, il s’est écoulé déjà plusieurs semaines de mobilisation avant l’officialisation de celle-ci. Des mobilisations importantes, embarquant dans leur sillage parents d’élèves, élu-es départementaux et municipaux qui se sont bien souvent débrouillées seules pour se synchroniser, se connecter, et partager leurs informations. Elles n’ont pas ménagé leur peine : occupations diurnes/ nocturnes, AG, rencontres avec les parents et les élu-es, coups de force auprès des instances académiques qui leur opposent une fin de non recevoir, démarches auprès des politiques, coups médiatiques, manifestations spontanées. Les personnels ont dû se débrouiller pour vérifier des chiffres légitimant leur classement/déclassement, ont du aussi encaisser les inégalités de traitement faites selon les territoires : Paris, Dijon, Romainville, villes sensibles et tenues par le PS ont obtenu bien mystérieusement et rapidement satisfaction de leurs revendications.
Dans le contexte actuel, avec les politiques éducatives et d’austérité successives qui n’ont cesse de dégrader les conditions d’apprentissage pour les élèves et les conditions de travail des personnels, le SNES aurait du mettre en œuvre dès les premières rumeurs un mot d’ordre de sanctuarisation, « aucun établissement ne sort de l’éducation prioritaire », et d’élargissement du périmètre. Celui-ci aurait été un précieux levier pour fédérer les luttes et harmoniser par le haut des plateformes revendicatives. Il n’en fut rien. Arrivés au 17 décembre, la manifestation nationale ne ressemblait qu’à une marche funèbre, elle n’avait pour les personnels engagés depuis plusieurs semaines dans la lutte qu’un terrible parfum d’amertume.
Le SNES n’a pas cru en ces mobilisations parce que fondamentalement il ne croyait pas dans les revendications alors qu’il aurait dû s’appuyer dessus pour essayer de l’étendre à tous les établissements car elle préfigurait la baisse générale des moyens en particulier des DHG. Le SNES doit réapprendre à gérer les mobilisations, car c’est comme ça qu’on créera le rapport de force indispensable au changement de politique dans l’Education Nationale.
Amandine CORMIER, Véronique SERVAT (Créteil)