Je me souviens, quand j’étais écolière, d’une boîte en fer dans laquelle se trouvaient les fameux « bons points « . Il fallait dans cette école être sage (comme une image justement) pour obtenir sa récompense à la fin du mois. Une forme déjà de capitalisation ou de rémunération au mérite, je ne sais pas trop…
Toujours est-il que pour la plupart d’entre nous, de notre profession, nous paraissons avoir logiquement intégré cette attitude d’enfants respectueux des cadres proposés. Et que nous sommes alors plus familiers aux défilés chantants qu’aux grèves reconductibles ou aux occupations de ronds-points.
Cette culture de manifestation, et d’autres raisons sans doute, n’a pas permis un investissement massif des appels à la reconduction. Pourtant, la mobilisation extrêmement forte dès le 5 décembre, le maintien d’un niveau élevé sur les temps forts de grève suivants, y compris après les congés, ou encore la participation réelle et régulière à diverses actions confirment une opposition importante aux projets de ce gouvernement. Difficile d’ailleurs de mesurer précisément la part d’une réaction contre ce projet de retraite et celle d’une colère plus large. Il est donc nécessaire de maintenir actives toutes les raisons de lutte. Celles relevant d’une profession exaspérée par les mépris et reconfigurations idéologiques de leur métier. Celles relevant d’une atteinte financière supplémentaire. Celles relevant d’une conception de société de plus en plus inégalitaire, en dissonance avec les valeurs de solidarité.
Ces trois champs de lutte ont permis un engagement fort et renouvelé dans l’éducation nationale. Même si l’accélération du mouvement attendu n’a pas lieu, même si cette journée du 14, annoncée tardivement, est très en deçà des précédentes, cela ne peut apparaître comme un renoncement des enseignant.es. Elles signifient davantage que nous sommes arrivé.es au temps d’un nouveau souffle à concevoir. Les secteurs visibles mobilisés, tels que la SNCF ou la RATP bien sûr, mais aussi l’hôpital, les pompiers, radio France, l’opéra, les avocats, les dockers ou les raffineries… restent nombreux. Il nous faut également continuer à solliciter la jeunesse (étudiant.es, lycéen.nes…) pour provoquer une mobilisation qui n’est pas encore là mais qui permettrait de compenser la fin prévisible de la reconduction stricte dans les transports.
Si nous partons du principe commun qu’il est impensable de renoncer, comment en effet faire évoluer le mouvement ? Quel nouveau tempo définir pour ne pas effriter la motivation ?
-Maintenir notre communication tant sur les effets directs pour les pensions enseignantes que sur une déconstruction du projet lui-même et de la vision de la société qui le motive ? Alimenter les collègues par des décryptages constants et percutants ? Bien sûr.
-Elargir vers une campagne autour de la revalorisation qui dénonce le marché de dupe, déconstruit les effets d’annonce, tout en exigeant une hausse salariale conséquente pour toutes et tous ?
– Continuer de proposer en interpro des temps forts de mobilisation réguliers ? Préparer dès à présent un 24 pour qu’il soit un nouveau raz de marée ?
– Prolonger jusque-là les actions de résistance multiples telles que les retraites aux flambeaux, les occupations des places publiques, les blocages de lieux symboliques ou événementiels en les calant sur des temps nationaux pour tenir jusque-là ? Evidemment aussi.
L’intersyndicale de transformation sociale a démontré une force d’unité nouvelle et mène le combat fièrement, il lui reste à présent à trouver des pistes, qui ne s’excluent pas les unes les autres, pour aller au bout et gagner.