- intervention au débat générale au CDFN de janvier 2024, faite par Claire Bornais –
Chères et chers camarades,
on hésite en ce début 2024 à formuler des vœux de bonne année, au vu du contexte international et national. On va se souhaiter surtout de garder le moral ! Nous allons en avoir terriblement besoin pour nous confronter quotidiennement aux conséquences de la politique des riches pour les riches. Celle-ci est très efficace, comme l’a encore documenté le dernier rapport d’Oxfam paru mi-janvier : les inégalités ont encore augmenté depuis 2020, en France comme partout sur la planète. Et partout aussi, ce n’est pas sans lien, on observe la montée de l’extrême-droite, voire son arrivée au pouvoir parfois.
En France, le CAC40 a encore plus chouchouté ses actionnaires en 2023, par le versement de plus de 97 milliards d’euros de dividendes et rachats d’actions. Nouveau record battu après ceux de 2021 et 2022. Ces inégalités croissantes de richesse vont de pair avec les inégalités climatiques, bien sûr : même en France, un des pays les plus riches du monde, ceux qui subissent directement les effets des catastrophes climatiques qui se multiplient, ce sont les gens modestes, pas les riches actionnaires du CAC 40. Et toujours pas l’ombre d’un changement de doctrine sur la fiscalité du capital pour engager résolument la transition écologique. Par contre, pour le gouvernement, pas de problème pour rétablir, au prétexte de financement de cette transition écologique, des taxes sur l’électricité et faire augmenter les factures de près de 10 % en 2024. Peu importe si cela met encore plus en difficulté la partie de la population déjà la plus touchée par l’inflation de ces dernières années. Population qui peine à vivre, tout simplement, même en travaillant.
L’injustice sociale est la règle de base du macronisme, et la ligne est bien « à droite toute », comme le confirment le discours aux relents de « Travail-Famille-Patrie » de Macron et la composition du nouveau gouvernement Attal. Le problème du logement, de plus en plus criant, ne mérite même pas un ministère de plein exercice. Les enfants pourront dormir de plus en plus nombreux sur le trottoir, ce n’est pas une priorité. Ce qui est prioritaire, c’est de revoir encore une fois la convention d’assurance chômage pour diminuer les droits d’indemnisation et obliger les personnes privées d’emploi à prendre n’importe quel travail. Une plate-forme de dénonciation des refus de CDI après CDD a déjà été mise en place, à l’occasion de la création de France Travail : tout un symbole de cette volonté d’empêcher tout rapport de force en faveur des salarié⋅es, qui pourrait obliger à une augmentation des salaires et à une amélioration des conditions de travail.
La liste des mesures d’injustice sociale est trop longue pour l’évoquer complètement ici, mais cela nous pose la question des luttes à mener, encore et encore, contre ces politiques. Celle pour les augmentations de salaires est indispensable au regard de l’augmentation du coût de la vie et fait partie des luttes syndicales prioritaires. Mais pour mobiliser mieux, nous devons articuler ces revendications avec la dénonciation des injustices sociales, pour montrer que d’autres choix sont possibles.
Les déclarations scandaleuses et mensongères de la nouvelle ministre de l’éducation nationale ont permis de remettre dans le débat public le séparatisme social des riches, financé par l’argent public pour l’école privée. Nous devons exiger que l’école privée ne soit plus financée par l’argent public.
Nous devons aussi exiger la démission d’Oudéa-Castera, non seulement parce qu’elle s’est disqualifiée pour la fonction, mais parce qu’elle est le symbole de ces politiques de tri social dans l’éducation que nous combattons et que c’est l’occasion de les mettre en lumière sur un mot d’ordre simple. Et aussi de parler des 12 milliards d’euro de réduction des dépenses publiques annoncée pour 2025 par Bruno Lemaire. Forcément ça va encore tailler dans les budgets des services publics : ce n’est pas en 2025 que les agents publics seront mieux payés ou qu’on aura des remplaçant⋅es dans les écoles . La petite famille Oudea-Castera ne va toujours pas pouvoir scolariser ses enfants dans le public ! Nous devons donc déjà sans attendre envisager des suites à la mobilisation dans l’Education du 1er février, parce que nous savons que la mobilisation se construit aussi sur le long terme. Il nous faut d’ores et déjà envisager l’action du 19 mars dans la fonction publique comme un prolongement possible de cette mobilisation dans le secteur de l’éducation, mais aussi faire en sorte qu’elle soit une journée de grève large dans la Fonction publique tout entière, tant les motifs de colère sont nombreux. Le 8 mars est aussi une journée essentielle pour lutter contre les inégalités qui touchent spécifiquement les femmes et il nous faut la réussir.
Ces luttes, il nous faut bien sûr les mener de manière la plus unitaire possible, sans en rabattre sur les mots d’ordre, pour les réussir.
Nous devons donc continuer le travail de prospective entamé avec la CGT en 2023 sur les possibilités d’un rapprochement syndical. Mais il nous faut aussi rappeler haut et fort que pour la FSU, ce rapprochement est conçu avec CGT ET Solidaires au moins, sans exclusive bien sûr. Nous devons donc à tous les niveaux susciter la réflexion des camarades de Solidaires sur ce sujet, pour pouvoir mener les discussions à trois pour créer un nouvel outil syndical, à même d’amener plus de salarié⋅es à se syndiquer et se mobiliser. Face aux attaques sociales qui se multiplient, et face aux dangers de l’accession de l’extrême droite au pouvoir en France en 2027, il y a urgence pour le syndicalisme de se renforcer. L’exemple des attaques de Miléi contre les syndicats en Argentine dès son arrivée au pouvoir nous rappelle l’ampleur du danger des gouvernements d’extrême-droite pour le syndicalisme.