Les idées de l’extrême droite se répandent partout. Elles gangrènent les discours politiques de la droite
et s’insinuent même dans ceux de la gauche gouvernementale. Comment les faire reculer aujourd’hui,
alors que la menace de conquêtes municipales du FN aux prochaines élections se profile…
Manifestations anti-mariage pour tous radicales au printemps, assassinat de Clément Méric, incendies de campements roms, propos racistes contre les Roms du FN jusqu’à Valls en passant par l’UMP et l’UDI, scores historiques du FN à Villeneuve-sur-Lot et à Brignoles, expulsions d’étrangers comme si Guéant n’était jamais parti, remise en cause du droit du sol par Copé…
La liste n’est pas exhaustive mais depuis un an l’ambiance est à la dérive extrême droitière de la politique et de la société française. Pour autant, ce n’est pas une fatalité.
Car il faut rapprocher tous ces éléments avec le fait que l’un des meilleurs moyens de combattre le FN et ses idées a toujours été le développement de mouvements sociaux.
Pour la simple et bonne raison que c’est un moment où la population, qui peut être sensible aux sirènes de l’extrême droite, s’aperçoit qu’il existe d’autres réponses à la crise et que le FN est toujours du côté du manche, jamais pour celles et ceux qui luttent.
Le problème est qu’aujourd’hui, il n’y a pas de mouvement social, même sur les questions antifascistes et antiracistes.
Il n’y a pas eu de raz de marée anti-extrême droite après la mort de Clément Méric, les manifestations étaient très loin de ce qu’elles étaient dans les années 1990.
À la mi-septembre à Marseille, la contre-manifestation à l’université d’été du FN qui débordait du cadre régional n’a rassemblé que 2 à 3000 personnes.
Dans les années 1980 et 1990, on avait pris l’habitude de contrer tous les rassemblements de l’extrême droite par des contre rassemblements et cette stratégie avait réussi. Le FN restait un parti marginal.
Celles et ceux qui, à droite, tentaient de s’allier avec lui étaient vite mis au ban du monde politique. Dans les années 2000, on a perdu l’habitude de manifester contre l’extrême droite, excepté entre les deux tours de la présidentielle de 2002, et le FN a repris sa marche en avant.
L’année 2013 marque un nouveau tournant puisqu’à l’occasion des manifestations contre le mariage pour tous, droite et extrême droite ont défilé ensemble dans la rue.
**Pendant ce temps…
La porosité est de plus en plus grande entre l’extrême droite et l’UMP. Ainsi, Estrosi, député-maire de Nice, invente un arrêté anti-vagabondage dont le but est d’expulser les Roms de sa commune.
L’extrême droite se prétend laïque dans le seul but de s’en prendre aux musulmans. La blogosphère Soral-Dieudonné développe des idées ouvertement antisémites sous couvert d’antisionisme.
Et pendant ce temps, le gouvernement a expulsé plus d’étrangers que Guéant lors de la dernière année du mandat de Sarkozy, ajoutant un peu plus à la confusion.
Alors, il n’y a aucune fatalité. Il ne faut pas laisser à l’extrême droite le soin d’occuper la rue. Il faut que le mouvement antifasciste et antiraciste reprenne l’habitude de descendre dans la rue et de réagir à chaque initiative de l’extrême droite.
Il faut démontrer que ce n’est pas une idéologie comme une autre et que chaque manifestation de telles idées doit amener une riposte. Et si ce sont des dirigeants de l’UMP ou Manuel Valls qui reprennent à leur compte ces idées, il ne faut pas hésiter à réagir.
C’est ce qu’on fait les lycéen-ne-s qui sont descendu-e-s dans la rue après l’expulsion des jeunes Léonarda et Khatshik.
Il faut prendre la rue mais pas seulement. C’est nécessaire mais on ne pourra plus se contenter d’agir comme par le passé car la bête s’est adaptée et si elle n’a pas changé sur le fond, elle a beaucoup évolué sur la forme.
Un véritable travail de déconstruction des idées d’extrême droite est à faire face à une population exaspérée par le libéralisme et tentée par ce vote.
Il ne suffit plus de dire que le FN est d’extrême droite pour obtenir l’adhésion populaire, il faut démontrer en quoi il est néfaste pour les travailleur-ses et les chômeurs-euses.
**Une initiative intersyndicale
Une initiative intersyndicale très importante autour des extrêmes droites (CGT, FSU SUD-Solidaires à ce jour) doit se tenir à Paris le 29 janvier 2014.
Elle doit réunir de nombreux-ses syndicalistes autour d’ateliers (immigration, lutte des peuples d’Europe, questions sociétales comme le droit des femmes, l’expérience des municipalités d’extrême droite).
La journée devrait se terminer par un meeting central en soirée. Cela doit être une étape dans la lutte contre les idées d’extrême droite avec probablement des déclinaisons en province (c’est déjà prévu dans les Bouches-du-Rhône et envisagé dans les Alpes Maritimes). ●●
Olivier Sillam