Ces derniers temps, jamais l’école rurale n’aura autant occupé le devant de la scène. A force d’engagements et de promesses de refondation, dans un objectif de lutte contre les inégalités sociales et territoriales en terme de réussite scolaire, elle est devenue le centre de toutes les attentions, ou plutôt sa réorganisation dans les départements.
C’est le développement des conventions ruralité ou autres protocoles ruraux qui symbolise le mieux cette soudaine frénésie de recomposition du maillage des écoles, territoire par territoire, petit bout par petit bout, comme si, par miracle, la taille des structures ou leur emplacement était soudainement la clé de la fin des inégalités. Drôle d’entrée pour celles et ceux qui connaissent bien la physionomie des départements dont il est aujourd’hui question.
Cantal, Aveyron, Lot, Allier, Dordogne… et vingt-cinq autres départements ont en commun de s’être engagés ou d’être en train de s’engager dans une démarche contractuelle pour la réorganisation du territoire scolaire du premier degré. L’assurance de faire campagne pour la sauvegarde de l’école rurale a dû motiver quelques signatures d’élus locaux, dans un contexte de baisse démographique préjudiciable aux petites écoles. Mais au final, l’illusoire co-construction promise localement, entre partenaires mis sur un soi-disant pied d’égalité, permet avant tout de remplir l’objectif de restructuration du paysage scolaire, à coups de fermetures de petites écoles, de fusions de structures, de regroupements… sur le modèle urbain. Construites sur un modèle type, les conventions laissent un peu de liberté sur les objectifs à atteindre en termes de chiffrages de fermetures, regroupements, concentrations, fusions, tout comme de hauteur de moyens alloués. Elles ont cependant en commun d’instaurer un régime à deux vitesses entre engagés et non engagés, à l’échelon national ou départemental, comme autant de coups portés à la règle générale et à l’équité territoriale.
Aujourd’hui l’école rurale n’est pas traitée avec plus d’attention que n’importe quel autre service public et qu’importe si, au bout du compte, les élèves verront leur temps de trajet en car augmenté parce que l’école de leur village a fermé. La logique de baisse de la dépense publique inscrite dans les politiques d’austérité impose les mêmes restructurations, de l’éducation à la santé, en passant par les transports. La réalité de la campagne aujourd’hui, c’est la fermeture de tous les remparts à l’exclusion sociale et territoriale et la disparition des garanties d’équité et d’égalité sur l’ensemble du territoire. C’est à terme l’assurance de la désertification d’un bon nombre de territoires.
La ruralité va constituer un enjeu important de la campagne des élections présidentielles, et l’école rurale ne sera pas écartée. Il n’y a pas de hasard non plus à ce que le premier meeting de la candidate de l’extrême-droite se soit déroulé dans un petit village de Haute-Marne de soixante habitants. Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons à porter notre projet pour l’école rurale, dans une réaffirmation d’un service public d’éducation de qualité et de proximité, avec des moyens à la hauteur des besoins pour lutter contre les inégalités et faire réussir tous les élèves. Cela passe aussi par une analyse sans concession du modèle imposé.